La descente de l'Eyrieux par le kayak club valentinois
Notice
Cette descente a lieu le lundi de Pâques. Environ 40 membres du kayak club de Valence, dont 3 internationaux, descendent 25 km de rivière entre Saint Sauveur De Montaillu et Beauchastel en passant par Saint Fortunat. Ils fabriquent eux-mêmes leur matériel.
Éclairage
Le lundi de Pâques de 1957, le Kayak club valentinois organise une sortie en canoë et kayak pour ses membres. Quelques dizaines d'entre eux sont filmés pour les besoins d'un reportage de l'Office national de radiodiffusion télévision française de Lyon sur les 25 kilomètres du parcours qu'ils ont choisi sur l'Eyrieux entre les communes de Saint-Sauveur de Montaillu et Beauchastel, en Ardèche. Seuls ou en couple, ces jeunes adultes s'adonnent à une pratique de loisir où l'entre-soi convivial compte au moins autant que l'exercice physique. Le film n'insiste d'ailleurs en aucune façon sur la présence de trois internationaux dans le groupe. Au contraire, les séquences de la journée s'enchaînent à un rythme lent et reposant, quasiment hors du temps. Les moments de descente, régulièrement scandés par le passage de quelques rapides, alternent avec des phases de repos où baignades et préparation du repas familial avec la « popote » utilisée en camping sont de la partie.
Le reportage montre des couples mixtes. Depuis l'entre-deux-guerres, la descente de rivière sous sa forme récréative se pratique volontiers sous cette forme. La femme est en général placée devant, l'homme derrière, c'est-à-dire dans des positions qui valorisent techniquement celui-ci au détriment de celle-là en assurant aux hommes la fonction plus noble de conduite de l'embarcation. La position inverse ne sera adoptée qu'ultérieurement et uniquement pour les besoins de la compétition, l'année 1957 étant d'ailleurs aussi celle où le canoë mixte est reconnu comme une catégorie spécifique par les instances fédérales.
L'institutionnalisation du canoë kayak s'est accélérée après la Seconde Guerre, mondiale, mais les effectifs de sa fédération stagnent autour de 4500 dans les années 1950. Dès lors, ce dont témoigne en vérité le reportage est le maintien d'une pratique collective de plein air, qui reflète, au sein des classes moyennes urbaines, une demande croissante pour la nature, l'aventure sans les risques et le dépaysement. L'engouement est toutefois encore limité et les villageois pas encore suffisamment coutumiers du fait pour qu'ils puissent se permettre de rater, du haut d'un pont, le passage de la caravane d'embarcations. Pas de loisir de masse, ici : les berges ne sont pas aménagées et les équipements de sécurité tels que bouées ou casques ne sont pas prévus. Les bateaux eux-mêmes sont construits par les membres du club ; l'innovation est artisanale car, en l'absence de véritable démocratisation du canoë-kayak, l'étape de la fabrication industrielle du matériel n'a pas encore véritablement démarré.