L'industrie du ski

12 janvier 1994
03m 55s
Réf. 00406

Notice

Résumé :

La région Rhône-Alpes possède 35% du marché mondial du ski. Deux entreprises majeures agissent dans ce secteur : l'entreprise Rossignol, premier fabricant mondial, et l'entreprise Salomon. La concurrence est dure et les secrets jalousement gardés.

Date de diffusion :
12 janvier 1994
Source :

Éclairage

En janvier 1994, un coup de tonnerre retentit dans la petite ville iséroise de Saint-Etienne de Saint-Geoirs : Dynamic, la plus ancienne société française de matériel de ski, délocalise son usine en Autriche, supprimant au passage 123 emplois. Le magazine d'information de France 3, Rhône-Alpes Première, commun à Grenoble et à Lyon, consacre un reportage à ces déboires économiques, rappelant au passage que les années fastes sont loin puisqu'elles remontent aux Jeux olympiques de Grenoble, en 1968. La marque, qui avait équipé le triple vainqueur Jean-Claude Killy de ses VR 17, les premiers skis conçus selon le modèle de la boite de torsion qui resta longtemps d'actualité, avait alors connu un tel succès qu'elle n'avait pu répondre à la demande et finit par être rachetée par le groupe SOFISPORT en 1973.

Mais dans Rhône-Alpes Première, les commentaires de Laurent Esposito et Berry Sautel suggèrent d'autres difficultés : les trois dernières saisons ont été marquées aussi bien par une météo peu propice dans les Alpes que par la crise économique qui touche les vacanciers. Plus sûrement, c'est le marché même des sports d'hiver qui est arrivé à maturité, et remet en question les perspectives radieuses qui faisaient pourtant consensus quelques années plus tôt. Le nombre de skis vendus stagne, voire décline légèrement depuis une décennie. C'est alors l'occasion de rappeler que les firmes rhône-alpines contrôlent plus d'un tiers du marché mondial du ski et que les effets de la mauvaise conjoncture ont des conséquences économiques significatives au plan local. Sur fond de scène de sports d'hiver, le reportage place d'ailleurs en incrustation le nombre de skis vendus par les principales marques que sont Rossignol, Salomon, Dynamic, Dynastar et Lacroix, et, en parallèle, le nombre d'emplois directs concernés. Il s'achève cependant sur une note plus positive, en s'arrêtant sur les cas de Salomon et de Rossignol, leaders mondiaux pour les fixations et les skis. Les séquences montrant leurs départements Recherche et Développement et les ingénieurs devant leurs écrans d'ordinateur se veulent autant de promesses pour l'avenir. Elles évoquent aussi deux stratégies différentes de ces groupes : pour Salomon, le choix de l'équipement de luxe, à grand coup de Design ; pour Rossignol, le pari de la performance, en équipant les meilleurs skieurs du moment afin de faire de la compétition un banc d'essai et des champions des représentants de sa marque. Le reportage ne dit cependant rien des Jeux olympiques d'Albertville qui se sont déroulés deux ans plus tôt et dont l'impact fut très limité sur les industries locales. Il ne rappelle pas davantage que Rossignol et Salomon développent des stratégies de diversification dans les raquettes de tennis et le golf, par exemple, ou qu'ils équipent autant les skieurs étrangers que ceux de l'équipe de France. Autant de signes que la crise des sports d'hiver n'est pas un épisode passager et que la conviction d'un marché en extension ne tient guère à l'analyse.

Thierry Terret

Transcription

Présentateur
A Saint Etienne de Saint-Geoirs, un comité d’entreprise extraordinaire, pour la société Dynamic, le plan de 123 suppressions d’emplois, a été confirmé sur un total de 160 emplois, le groupe atomique qui coiffe la filiale française Dynamic a décidé de rapatrier la fabrication des skis en Autriche, seuls seront maintenus à Saint-Geoirs, un centre de recherches et un centre de distribution, c’est aussi une page d’histoire qui est tournée, Dynamic est la plus ancienne marque française. Elle a été lancée par un artisan grenoblois, c’était en 1931, son âge d’or et bien ce sont les jeux olympiques de Grenoble en 1968, Jean Claude Killy avait adopté la marque. Il serait exagéré de dire que les difficultés de Dynamic sont en quelque sorte l’exception qui confirme la règle, mais globalement l’industrie du sport d’hiver se refait en quelque sorte une santé après trois années calamiteuses.
Journaliste
Sur 6 millions de paires de skis vendues dans le monde, 2 127 000 ont été fabriqués dans notre région soit 35%, autrement dit, plus d’un ski sur trois dans le monde vient des Alpes. Premier fabriquant mondial, l’entreprise Voironnaise Rossignol avec plus d’un million de paires de skis auxquels s’ajoute dans le même groupe, la marque DYNASTAR fabriquée à Sallanches. En tout 1 330 emplois. Juste derrière, Salomon, la firme emploie 1 430 personnes en Savoie et Haute Savoie pour seulement 270 000 paires de skis vendus. Un petit chiffre car Salomon s’attaque d’abord au marché de la fixation et de la chaussure de ski. La marque Dynamic, elle est en pleine restructuration, les 160 employés de l’usine de Saint Etienne de Saint-Geoirs risquent de voir leur production rapatriée en Autriche, chez Atomic, la maison mère. Enfin, le petit poucet du ski français, la marque Lacroix, 22 000 ventes dont la moitié en surf, cette PME de 52 personnes implantée à Perrignier en Haute Savoie remonte sur la pente, elle envisage de créer une dizaine d’emplois d’ici un mois.
Présentateur
Salomon et Rossignol sont donc deux leaders sur le marché du ski. Pour se développer vous allez le voir, elles misent sur des stratégies opposées. En revanche, une chose qui les réunit c’est le secret de fabrication de leur centre de recherche.
Journaliste
Ces images de conception assistées par ordinateur sont fournies par Salomon, car il n’est pas question de filmer n’importe quoi ici. Les prototypes sont protégés comme de véritables secrets militaires, l’enjeu, le ski de demain plus performant et plus esthétique. Aujourd’hui on peut pas vendre un ski s’il n’est pas joli ?
Gilles Descamps
Exact.
Journaliste
Et ça c’est de la recherche et du développement également ?
Gilles Descamps
Oui parce que bon, c’est de la recherche développement dans le domaine graphique, dans le domaine esthétique, mais c’est aussi de la recherche développement dans les procédés de décorations. Parce que bon, quand on veut atteindre un certain nombre d’effets sur les matières, sur les brillances, sur le toucher et ainsi de suite, bon, c’est pas uniquement du travail de designer, c’est derrière aussi un gros investissement sur la technologie.
Journaliste
Un investissement que paye le consommateur puisque Salomon se positionne d’abord sur le marché du ski haut de gamme à plus de 2 000 francs. Et ça marche grâce au marketing et à la publicité. Autre philosophie, celle de Rossignol, en tête de la coupe du monde des fabricants de skis, le top50 de la glisse. Là aussi, on investit dans la recherche et le développement. 120 millions de francs pour cette usine ultra moderne et ultra secrète. Mais surtout on investit sur les champions.
Jean-Marc Forneri
La mise au point des produits de compétition permet à des coureurs qui sont d’un très haut niveau de gagner le centième de seconde qui les fera monter ou pas sur le podium.
Journaliste
Ça veut dire que finalement la recherche se fait aussi sur les pistes.
Jean-Marc Forneri
La recherche se fait sur les pistes, elle se fait avec des hommes, parfois avec des ordinateurs mais essentiellement à travers cette expérience.
Journaliste
Résultat des podiums comme s’il en pleuvait et aussitôt les ventes qui grimpent. Mais dans les années à venir le marché mondial du ski devrait connaitre une faible progression plus 3% par an selon les prévisions. Rossignol, Salomon et autres devront se livrer une lutte sans merci, gare alors à la mauvaise chute.