Le patrimoine médiéval de Lattes

En 2004, la commémoration des 800 ans de Lattes a donné lieu à la nécessaire revalorisation du patrimoine médiéval de la ville. En effet, si le passé étrusque, gaulois et gallo-romain de Lattara est bien connu d’un large public grâce aux recherches archéologiques et aux expositions du musée, la prospérité médiévale de la « ville de la lagune » reste jusqu’à ce jour fort mal connue et peu dévoilée. À ce titre, la magnifique sculpture romane du songe des Rois Mages, entrée dans les collections du musée sous l’impulsion de Christian Landes, conservateur, comble très partiellement une lacune que Bruno Cosme, architecte des Bâtiments de France, explique par les nombreuses destructions consécutives à la désertion de Lattes à la fin du Moyen Âge et surtout par l’urbanisation de la seconde moitié du XXe siècle.

Depuis la création d’un comptoir littoral à Lattes/Lattara par des marchands étrusques, au VIe siècle av. J.-C., jusqu’au développement de la ville de Montpellier au XIIe siècle, le littoral méditerranéen a joué un rôle de premier plan dans la dynamique du peuplement. Les établissements humains n’ont cessé de se déplacer au cours de ces dix-huit siècles, sous l’effet des profondes transformations du littoral lagunaire. Ce milieu instable imposait autant de contraintes qu’il offrait de potentialités au développement des sociétés. Cet espace en recomposition régulière accueillit puis vit s’effacer au cours des siècles pas moins de quatre centres urbains : Lattara, Sextantio (Castelnau-le-Lez), Lattes à nouveau, et un siège épiscopal, Maguelone, avant que, au XIIe siècle, la ville de Montpellier n’impose durablement son emprise sur un domaine où la terre le dispute à l’eau.

D’intenses recherches archéologiques, conduites depuis plusieurs décennies, mettent en lumière l’ancienneté et l’ampleur des aménagements humains dans cet espace lagunaire façonné pour répondre aux besoins et aux ambitions de ses occupants. Dans un tel contexte, la définition d’un « milieu naturel » apparaît illusoire quand s’affirme de longue date l’impact d’une maîtrise humaine, facteur de résilience des sociétés littorales dont les « naissances » successives de Lattes donnent l’exemple. 

Si des fouilles partielles ont apporté quelques lueurs sur le castrum, village fortifié en protection du port médiéval, si le visiteur peut apprécier l’architecture romane de l’église Saint-Laurent, qui a partiellement conservé son austère décor architectural du XIIe siècle, ou découvrir des éléments de l’enceinte, Lattes médiévale est bien loin d’avoir livré tous ses secrets. L’épisode fêté en 2004 a toutefois donné lieu à une prise de conscience de la fragilité du patrimoine. En cela, le cas de Lattes paraît emblématique de la longue négligence à l’égard de la période médiévale en Languedoc. Pour en donner un seul exemple, il faut savoir que l’archéologie médiévale n’est que très partiellement enseignée à l’université de Montpellier, les étudiants et les chercheurs se tournant pour leur formation vers Aix-en-Provence et Toulouse.