L'institut d'études occitanes (IEO) : occitanisme et politique
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Notice
Résumé
Introduit par Maurice Andrieu, Jean-Louis Viguier donne des exemples de l’implication de l’IEO dans la société contemporaine. Alain Alcouffe mentionne les études économiques et politiques réalisées. Christian Caujolle évoque la création de mouvements politiques défendant la culture occitane. Alain Alcouffe souligne enfin le sentiment d’appartenance à l’Occitanie qui se développe dans les classes populaires.
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Date de diffusion :
09 janv. 1976
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Contexte historique
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C’est dans le cadre de la tribune libre régulièrement offerte à des associations ou partis sur la troisième chaîne publique que, en 1976, des membres de l’Institut d’études occitanes (IEO) interviennent. Comme le rappelle au début l’extrait Jean-Louis Viguier, l’IEO, fondé en 1945, avait à l’origine une fonction strictement culturelle et scientifique. Peu à peu, et en particulier après la grande grève de Decazeville de l’hiver 1961-1962, l’IEO s’est saisi des questions économiques et politiques. D’abord dans une structure parallèle mais extérieure à l’IEO, le Comité occitan d’étude et d’action (COEA) fondé en 1962 puis, notamment après 1968, en son sein même. Dans les bouleversements sociétaux qui agitent le France mais qui voient aussi dans le monde se développer les mouvements d’émancipation des peuples dans les années 1960, l’IEO initie de son côté, notamment avec Robert Lafont, une réflexion sur la place de l’Occitanie dans la nation française en s’appuyant en particulier sur le concept énoncé ici par Alain Alcouffe du colonialisme intérieur.
Les Universités occitanes d’été qui existent depuis 1972 participent de cette réflexion. Ainsi en va-t-il de celle de Marseille annoncée ici, qui doit débattre de l’insertion de l’occitanisme moderne dans le monde contemporain et dans la cité. C’est que depuis quelques années, l’occitanisme sent que l’intérêt de la population pour la langue et la culture occitanes est plus vif. Il accompagne surtout une revendication sociétale plus large déterminée aussi par la prise de conscience des difficultés économiques des pays d’oc que des mouvements comme ceux du Larzac et des viticulteurs languedociens évoqués dans cet extrait viennent mettre en relief.
Les militants occitanistes présents sur le plateau de FR3 veulent d’ailleurs croire qu’une part de plus en plus importante de la population prend conscience de son occitanité et donc des questions culturelles mais aussi politiques qui viennent s’y rattacher. Comme l’indique Christian Caujolle, les intellectuels occitanistes, membres de l’IEO – Robert Lafont au premier chef – ont ressenti le besoin de créer des mouvements politiques. Le plus important, au début des années 1970, a été Lutte occitane qui a pu ponctuellement mobiliser des milliers de personnes, comme lors de son rassemblement de 1973 à Montségur. Après 1974 et la candidature de Robert Lafont à l’élection présidentielle, c’est un autre mouvement, issu des comités formés pour soutenir la cette candidature, Volèm Viure al Païs, qui prend l’initiative et qui, en 1976 déjà, porte un discours aux accents nationalistes. Néanmoins, et si les militants que l’on voit dans cet extrait n’en sont pas alors forcément conscients, le mouvement politique occitan dans son ensemble a déjà amorcé sa décrue. Tiraillé par des débats internes sur la stratégie politique à mettre en place entre – pour résumer – le choix d’une revendication purement occitaniste et l’insertion des problématiques régionalistes dans les grands partis nationaux (particulièrement le Parti communiste et le parti socialiste), le mouvement se délite et l’IEO lui-même finit par se diviser autour de ces questions avant de se recentrer durant les années 1980 sur un rôle d’animation culturelle et de promotion de la langue et de la culture d’oc.
C’est symboliquement par la chanson Los carbonièrs de La Sala (Les mineurs de Decazeville), dont les paroles ont été écrites par l’écrivain occitan Jean Boudou et mises en musique et interprétées par Mans de Breish en 1975 que se clôt la tribune de l’IEO. Ce choix marque la volonté de l’IEO d’alors de s’insérer dans les luttes sociales et politiques de son temps en faisant de la grève de Decazeville un point de départ.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Maurice Andrieu
Jean-Louis Viguier, Alain Alcouffe, Christian Caujolle.Jean-Louis Viguier, l’Institut d’études occitanes est-il en prise directe sur la réalité contemporaine ?
Jean-Louis Viguier
Je crois qu’il a toujours manifesté ce souci, effectivement et que, sur tous les plans, on peut en trouver une démonstration ainsi que nous avons pu le voir tout à l’heure du point de vue littéraire dans la mesure où il arrive à développer la création et promouvoir la création littéraire.Ensuite, et surtout du point de vue intellectuel où il y a eu un conseil d’étude qui a édité un certain nombre de numéros d’annales de l’Institut d’études occitanes qui sont des numéros très recherchés et de grande valeur.Et ce conseil d’étude avec ses différentes sections, justement, section scientifique, section linguistique, historique, géographique, pédagogique, peut prétendre, justement, étudier les plus grandes recherches et les recherches les plus importantes dans le domaine occitan contemporain.Mais depuis 1972, il a également, pour développer, justement, cette recherche et la prise directe sur le monde quotidien et ses phénomènes économiques dans la recherche d’une Occitanie à venir.Il a créé avec le directeur des études, son directeur des études Robert Lafont, l’Université occitane d’été.La première s’est tenue à Montpellier, la quatrième avait lieu à Egletons l’année dernière en 1975.Elle s’est penchée sur quantité de problèmes, notamment, essentiellement, un projet pour l’Occitanie.Et la prochaine qui doit avoir lieu la première semaine de septembre à Marseille à laquelle vous êtes tous conviés si vous vous intéressez quelque peu à nos problèmes.Doit étudier les problèmes de complexe de force et l’insertion de l’occitanisme moderne dans le monde d’aujourd’hui et dans la cité.
Maurice Andrieu
Et cette réalité sociale, économique, politique, Alain Alcouffe, Christian Caujolle, est-ce que vous pourriez nous en parler ?
Alain Alcouffe
Oui, cette réalité économique et sociale est prise en charge, est analysée par les intellectuels occitans, d’abord au sein de l’IEO par leurs recherches sur la culture.Ils ont été amenés à se poser des questions sur la vie économique et politique de l’Occitanie.Cette réflexion a été dynamisée, en quelque sorte, par la grève de Decazeville en 1962, grève à l’occasion d’une fermeture de mine qui était jugée non-rentable au niveau de l’hexagone alors qu’elle condamnait à mort toute la région.De cette réflexion est sortie, en dehors de l’IEO, une série d’analyses pour caractériser l’Occitanie au niveau politique et économique.Cette analyse, c’est celle du colonialisme intérieur, terme sous lequel nous définissons l’Occitanie en insistant sur chacun des adjectifs.Intérieur d’abord, parce que l’Occitanie, les Occitans jouissent des mêmes droits politiques que le reste des Français.Mais aussi colonialisme, parce que cette région est victime d’une sous-industrialisation, d’un exode des cerveaux et d’une dépossession par le capital foncier et par l’armée.Chacun connaît l’affaire du Larzac.Nous n'oublions pas pour autant les problèmes culturels.
Christian Caujolle
C’est d’ailleurs ce qui explique qu’un certain nombre d’intellectuels qui ont commencé cette réflexion au sein de l’Institut d'études occitanes aient ressenti le besoin de créer en dehors de l’Institut d'études occitanes des mouvements qui se définissent clairement comme politiques et qui essaient de faire le lien entre la lutte culturelle et la lutte pour un autre système économique.
Alain Alcouffe
Aujourd’hui, cette réflexion gagne des couches beaucoup plus larges que les cercles d’intellectuels, en particulier, je veux citer ici la viticulture languedocienne qui prend conscience de son occitanité et les grandes manifestations de jeunes et d’autres couches populaires comme les grands rassemblements de Montségur qui ont eu lieu depuis deux ans.
(Musique)
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