Les Fausses Confidences de Marivaux
Notice
Répétitions des Fausses confidences de Marivaux par Didier Bezace et interview de Pierre Arditi, dans le rôle de Dubois, le valet manipulateur.
Éclairage
Comédie en 3 actes, représentée pour la première fois en 1737 au Théâtre-Italien, dernière œuvre théâtrale développée en terme de durée et de construction dramaturgique avant que Marivaux ne se consacre plus qu'à des pièces en un acte. Monsieur Rémy présente son neveu Dorante, jeune homme de bonne famille ruiné, en qualité d'intendant à Araminte, une jeune veuve en plein démêlés judiciaires. Dorante, qui en est follement épris veut gagner son cœur. Dubois, son ancien valet, entreprend de l'assister dans son entreprise. Mais la mère d'Araminte, Mme Argante, a d'autres projets pour sa fille et veut lui faire épouser un comte. Dubois piège les uns et les autres et manipule si bien les divers protagonistes à force de fausses confidences et de stratagèmes que Dorante finit par obtenir les faveurs d'Araminte, au grand dépit de sa mère.
On peut noter dans Les Fausses confidences, et contrairement à ses précédentes pièces, l'insert d'éléments réalistes qui ont sans doute quelque peu déconcerté le public d'alors, qui réserva un accueil mitigé à la pièce avant qu'elle ne trouve son véritable succès soixante ans plus tard, lors de sa reprise à l'Opéra-comique et de son entrée au répertoire de la Comédie-Française : la description d'un Paris plus précis que dans les intérieurs ou les jardins indéfinis dans lesquels Marivaux plaçait auparavant l'action dramatique et l'ajout, notamment, de personnages qui n'appartiennent pas à proprement parler aux types de la comédie traditionnelle mais font plutôt écho aux tableaux et aux peintures sociales de La Vie de Marianne - vaste roman inachevé auquel Marivaux travailla de 1728 à 1742 et dont Pierre Cardinal a tiré un feuilleton télévisé en six épisodes, en 1976 - ; toutes ces nouveautés ont pu passer à l'époque de la création des Fausses confidences comme des étrangetés ou des maladresses dramaturgiques.
On sent bien en effet un changement de ton dans l'œuvre de Marivaux avec Les Fausses confidences, l'abandon des arlequinades et du système de conversation qu'on appelle le « marivaudage ». Et l'on voit déjà pointer les prémisses de la révolution formelle qui donnera naissance au drame bourgeois et à la comédie larmoyante, genres qui seront portés à leur paroxysme par Diderot. De fait, Marivaux recentre son intrigue autour d'un personnage central, Dubois, qui manipule à son aise - comme un démiurge dans lequel on peut voir le double fictionnel de l'auteur - les autres protagonistes. Le valet de comédie devient le maître d'œuvre du microcosme social dans lequel s'agitent les autres personnages, il fait et défait la vérité, rapporte les discours, influence sur les décisions, provoque l'accident et sa solution.
C'est dans cette voie que Didier Bezace et son acteur, Pierre Arditi, ont choisi d'orienter la représentation, en faisant du valet Dubois un personnage manipulateur, non exempt d'une certaine noirceur. Ce spectacle, présenté au Théâtre de la Commune d'Aubervilliers lors de la saison 2009-2010, a fait l'objet d'une captation et d'une diffusion en direct sur France 2, le 30 mars 2010.