Zadig de Voltaire
Notice
Extraits de l'adaptation théâtrale de Zadig de Voltaire par Georges Coulonges, mise en scène par Jean-Louis Barrault. Jean-Louis Barrault explique ses nombreux changements de costume.
- Zadig ( Voltaire - Auteur / Jean-Louis Barrault - Mise en scène)
- Europe > France > Ile-de-France > Paris > Théâtre d'Orsay
Éclairage
Voltaire, l'un des grands esprits qui ont éclairé le XVIIIe siècle, est considéré en son temps comme un poète dramatique d'exception, à qui l'on doit près de soixante pièces et dont on dit qu'il surpasse volontiers les vers de Racine. Mais ses poèmes épiques (La Henriade), ses livrets d'opéra ou ses tragédies (Œdipe, Zaïre, Sémiramis, Tancrède...) sont tombés en désuétude sur la scène moderne et l'on ne donne plus de Voltaire aujourd'hui que des adaptations à partir de ses contes philosophiques : Candide, L'Ingénu, Micromégas et Zadig sont ainsi régulièrement portées à la scène.
Voltaire a fait imprimer Zadig en 1747, sous pseudonyme, et l'a fait republier un an plus tard dans une version plus développée. Sa source d'inspiration principale vient d'un conte persan du XVIe siècle, Voyages et aventures des trois princes de Serendip. La thématique orientale est à la mode au XVIIIe siècle, on découvre en France les Mille et une nuits et les romans, les nouvelles ou les pièces qui ont pour décor le Proche Orient sont monnaie courante à l'époque : l'exotisme, la peinture des charmes et du luxe orientaux, les récits teintés de merveilleux séduisent le public. La littérature de l'époque se fait aussi l'écho du vaste programme de conquête coloniale et des voyages anthropologiques menés par les grandes nations européennes. Candide de Voltaire, Les Lettres persanes de Montesquieu, ou encore Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre, Robinson Crusoé de Daniel Defoe, les écrits de Rousseau sur le mythe du « bon sauvage », Le Supplément au voyage de Bougainville de Diderot participent d'une même curiosité pour l'ailleurs et des mondes à la fois cruels et raffinés. Cet effet de délocalisation permet aux auteurs et notamment à Voltaire, dont on connaît le goût pour l'ironie, de mettre en scène dans une autre temporalité et dans des espaces où l'Europe projette tous ses fantasmes d'une société idéale. Rien d'innocent donc à ce que Voltaire situe au départ l'action de Zadig à Babylone pour construire une critique des mœurs de son temps, brocarder les querelles de savants et surtout le fanatisme et les superstitions qui fourvoient le bon sens, poussent les hommes à l'excès et aux pratiques les plus barbares. Zadig incarne la figure du philosophe, souvent incompris voire persécuté par ses contemporains, parfois désillusionné mais toujours en quête de vérité et de sagesse. . Zadig en effet, jeune homme au caractère bon et juste, plein de mesure, féru de science et de la philosophie de Zoroastre, est tantôt couvert d'honneur pour la sagesse de son jugement, tantôt accablé par des revers de fortune. Il est trompé par les femmes, manque plusieurs fois d'être tué en duel ou d'être exécuté pour des fautes qu'il n'a pas commises, doit fuir Babylone où il s'est épris d'Astarté, la femme du roi, devient esclave en Arabie, puis poursuit ses pérégrinations vers la Syrie où il apprend que le roi de Babylone a été tué et que l'empire est à feu à sang. Après ces diverses mésaventures, Zadig retrouve Astarté et, grâce aux enseignements d'un vieil ermite et à sa sagacité, il emporte le trône de Babylone et la main de la reine pour rétablir l'ordre dans son royaume.
L'adaptation de Zadig, sur un texte de Georges Coulonges, mise en scène par Jean-Louis Barrault, a été créée au Théâtre d'Orsay (Paris) en 1978 et peut se rattacher à tout un ensemble de spectacles touchant au XVIIIe siècle, dont Jean-Louis Barrault a cherché à montrer la diversité en mettant en scène Lesage (voir ce document), Diderot (voir ce document), Beaumarchais, Marivaux. Le document laisse voir un travail intéressant sur les costumes (couleurs vives, matières transparentes évoquant l'orientalisme), le maquillage, le jeu de l'acteur et la chorégraphie des corps sur le plateau. On voit aussi comment Jean-Louis Barrault utilise des masques et des marionnettes pour représenter la foule et donner vie à l'ensemble des personnages du conte ; comment il cherche aussi à inclure le spectateur dans le système de la représentation en débordant vers la salle et en faisant passer ses acteurs dans le public.