Corso fleuri à Esch-sur-Alzette
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Corso fleuri et son traditionnel défilé de chars fleuris à Esch-sur Alzette,ville luxembourgeoise à la frontière lorraine.
Date de publication du document :
Février 2022
Date de diffusion :
01 juil. 1971
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Contexte historique
ParMaître de conférences HDR en Histoire médiévale, Crulh, Université de Lorraine, Académie de Stanislas
Ce corso fleuri à propos duquel est réalisé le reportage se déroule en juillet 1971 à la frontière de la France et de la Belgique, à Esch-sur-Alzette, deuxième ville du Grand-Duché de Luxembourg qu’elle a rejoint en 1830 après avoir été française pendant plusieurs siècles. Cette ville est connue de la fin du XIXe jusqu’aux années 1980 comme métropole du fer, ce qui a valu d’attirer des milliers d’ouvriers d’Allemagne, de France, de Belgique et d’Italie. Elle a vécu une période faste pendant les trente glorieuses, au cours desquelles se déroule ce corso. Suivi par une foule nombreuse et joyeuse estimée à plusieurs dizaines de milliers de spectateurs, il connaît un succès exceptionnel. Sous un gai soleil, il a vu défiler dans les principales rues de la localité trente chars garnis de fleurs naturelles et des habitants costumés qui représentaient divers tableaux (dont les fruits du sud, le carrosse des noces et l’Alaska et ses chiens) accompagnés d’une centaine de majorettes et d’une fanfare de 600 musiciens dont une partie relevait de l’armée américaine car le Luxembourg a été l’un des pays européens les plus favorables à l’OTAN (Organisation du traité de l'Atlantique nord).
Ce défilé s’inscrit dans une tradition bien connue dans une partie de l’Europe des corsos dont le nom vient de l’italien qui signifie « rue » et désigne une fête extérieure qui coïncide avec la fin de l’hiver (Carnaval) et l’arrivée des beaux jours (printemps, été). En fait les défilés costumés qui se multiplièrent à la fin du XIXe siècle sont des dérivés des cortèges du Carnaval et du Mardi gras remontant au Moyen Âge, mais, en Lorraine et dans les contrées limitrophes, sont aussi à rapprocher d’autres cortèges populaires comme les chars de la Saint-Nicolas. Vers 1900 au Luxembourg, en Belgique, en Hollande et en France ces défilés sont souvent appelés cavalcades, d’un terme d’origine italienne désignant un défilé à cheval qui s’est ensuite élargi à tous types cortèges. Leur nom s’explique par le fait qu’ils sont composés de charrettes tirées par des chevaux, décorées de branchages et de fleurs, avec des participants grimés et habillés de façon fantaisiste pour faire sensation et parfois pour se moquer des autorités, comme c’était le cas pour le Mardi gras, période où l’on se travestissait et bouleversait les codes sociaux, offrant à la population la possibilité de « se défouler » avant les rigueurs du Carême. Préparées des mois à l’avance sur un thème renouvelé chaque année, ces cavalcades se déroulaient dans une atmosphère de liesse au son des fanfares municipales. Au XXe siècle elles sont devenues plus conventionnelles, tout en restant spectaculaires et conviviales, et associèrent aux chars traditionnels des voitures puis, après la Seconde Guerre mondiale, des tracteurs. Depuis les années 1910 commence à être employé le mot « corso » qui tend à s’imposer dans l’entre-deux-guerres où il connaît son apogée. Toutefois, celui de cavalcade perdure pour les fêtes du carnaval au Luxembourg (Remich, Wasserbilling, Pétange, Schifflange) et dans le nord de la Lorraine (Thionville, Carling, Hagondange, Creutzwald, Villerupt, Fameck, Créhange…), tandis que celui de corso y désigne plutôt d’autres fêtes qui ont lieu à la belle saison (Metz, Épinal, Golbey, Gérardmer, Ramberviller, Wiltz, Geenfest et Esch-sur-Alzette). Si les corsos fleuris évoquent davantage la Côte d’Azur, ils ont donc été bien présents en Lorraine et dans les contrées limitrophes, le plus souvent associés à des fleurs comme le muguet à Ramberviller, les jonquilles à Gérardmer et le genêt à Geenzefest (le plus important corso du Luxembourg attesté depuis 1923), voire à un fruit emblématique comme la Mirabelle à Metz. Si certains ont disparu comme celui d’Esch-sur-Alzette, d’autres se sont perpétués jusqu’à nos jours. Ces corsos et cavalcades, qui reposent sur la transmission d’un savoir-faire pluriséculaire, font participer associations, familles, quartiers de villes et villages. Ils représentent un moment festif majeur renforcé par la présence de la foule. Signe d’une culture populaire partagée, ils favorisent la construction du lien social, l’animation de la vie locale et le rayonnement des territoires.
Les archives municipales d’Esch-sur-Alzette conservent des épreuves photographiques des corsos fleuris tenus de 1910 à 1963 et des dossiers de leur organisation assurée par l’office de tourisme jusqu’en 1973. Les corsos se sont arrêtés à cette date et celui de 1971 évoqué dans le reportage est donc l’un des derniers. La ville a aussi tourné la page de la sidérurgie et s’est engagée dans des projets d’avenir en misant sur l’économie, l’écologie et la culture, mais reste fière de son passé et de ses traditions.
Transcription
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