Mondrian

17 mars 1968
05m 04s
Réf. 00052

Notice

Résumé :

Court portrait de Piet Mondrian et interview de Michel Seuphor, critique d'art abstrait, qui raconte le parcours du peintre : son attirance pour le cubisme à son arrivée à Paris et son évolution vers l'abstraction.

Type de média :
Date de diffusion :
17 mars 1968
Source :

Éclairage

Peintre emblématique de la modernité et de l'abstraction dans l'entre-deux-guerres, Piet Mondrian (1872, Amersfoort ? 1944, New York) a embrassé plusieurs courants avant de fonder le sien. Il doit à l'Académie des Beaux-Arts d'Amsterdam, où il a étudié de 1892 à 1895, l'esthétique classique de ses premiers tableaux, sombres paysages naturalistes. Il évolue au début du siècle vers le fauvisme et le néo-impressionnisme en découvrant Munch, Seurat et Van Gogh. C'est à Paris qu'il précise son orientation vers l'abstraction, en se familiarisant d'abord avec le cubisme. Progressivement, mer et arbres se stylisent sur ses toiles pour devenir ces entrelacs de lignes noires qui caractérisent son oeuvre.

La Première Guerre mondiale le ramène en Hollande où il crée en 1917 De Stijl (Le style) avec Theo Van Doesburg. Ce groupe de peintres développe le néoplasticisme, art utopique dans un environnement européen instable et insécurisant. Les oeuvres de Mondrian vont ainsi se décliner autour de l'harmonie, l'unité et l'abstraction de rectangles de couleurs primaires vives sur fond blanc. En 1938, sentant l'imminence de la guerre, le peintre part pour Londres, et fuit finalement les bombardements à New York. Mondrian trouvera peut-être l'environnement idéal de ses toiles dans cette ville verticale et rythmée.

Cécile Olive

Transcription

(Musique)
Journaliste
Piet Mondrian naît en 1872, en Hollande. Il commence par peindre des paysages, portraits ou natures mortes d'une facture fort classique. En 1911, entre Noël et le jour de l'an, il vient à Paris sur les traces de Van Dongen, qui l'avait nous rappelle Michel Seuphor...
Michel Seuphor
Van Dongen qui était le Hollandais qui faisait, à ce moment là, parler beaucoup de lui, à Paris et qu'il admirait.
(Silence)
Michel Seuphor
Mais lui Alain avait été très sensible au cubisme, à la discipline cubiste, et il s'est engagé en plein là dedans quand il est venu à Paris. Il a peint pendant un an des tableaux cubistes, des sujets même qu'il avait emporté avec lui de Hollande, qu'il retravaillait à la manière cubiste, qui se transfiguraient peu à peu. Alors, il y a eu cette évolution extrêmement intéressante, qui est un des cas les plus émouvants de la peinture de ce siècle, un des plus lourds de conséquences, c'est que Mondrian a évolué au-delà du cubisme avant 1914 déjà.
(Silence)
Michel Seuphor
Oui Il faudrait alors revenir à un peu en un mot sur...
Journaliste
Le cubisme, qu'est-ce que c'est en somme qu'un tableau cubiste ? Un tableau cubiste?
Michel Seuphor
On pourrait définir un tableau cubiste par une sorte de symphonie sur des lignes droites, une variation infinie de petites lignes droite. Avec quelques courbes les agrémentant. Et le tout en grisaille.
(Silence)
Journaliste
Cette variation infinie du trait droit s'est développée graduellement, au cours de l'évolution, d'une année, d'une année et demi chez Mondrian, jusqu'à se réduire au trait vertical et horizontal, à l'exclusion de toute autre.
(Silence)
Michel Seuphor
En même temps Mondrian abandonne la représentation des objets, et glisse progressivement, entre 1910 et1912, vers l'abstraction. Il a glissé de la figuration à l'abstraction, d'abord par l'idée.
(Silence)
Michel Seuphor
L'idée de l'ordre, de la discipline horizontale, verticale, qu'il découvrait dans la nature, dans toute chose.
(Silence)
Michel Seuphor
Ces carnets de notes de 1900, qui sont difficiles à dater d'ailleurs, mais je pense qu'on peut dire qu'elles vont de 1912 à 1914, contiennent des pensées extrêmement indicatrices dans ce sens, et qui reviennent plusieurs fois. Il voit partout dans la nature, parce qu'il aime beaucoup la nature, il est peintre et il la peint tellement ; peu à peu, il se met à voir dans la nature l'horizontalité et la verticalité. La mer, c'est l'horizontalité, les arbres qui descendent dans la mer, c'est la verticalité. Ainsi l'horizontal et le vertical se rencontrent et ça devient le masculin et le féminin ; un dualisme fondamental sur lequel il basera, il fondera tout.
Musique
Journaliste
Et finalement, vers 1914, tous les tableaux se ressemblent, horizontales et verticales se coupent et se recoupent pour composer la trame d'un univers qui sera désormais celui de Mondrian durant toute son oeuvre. Nous sommes en 1919, Mondrian, après un bref séjour en Hollande, revient à Paris, rue de Coulmiers d'abord, rue du Départ ensuite, où il vivra près de 20 ans et fera la plus grande partie de son oeuvre, pauvre et presque toujours solitaire.
Musique