Hagetmau : le Meuble chalossais

07 janvier 1984
03m 10s
Réf. 00112

Notice

Résumé :

Quatorze anciens employés d'une fabrique de meubles d'Hagetmau, licenciés en janvier 1982, décident de créer leur propre entreprise, le Meuble chalossais, sous la forme d'une société coopérative et participative. Présentation de la constitution et du fonctionnement de la SCOP et rencontre avec son PDG.

Date de diffusion :
07 janvier 1984
Source :

Éclairage

Située en plein cœur de la Chalosse, la ville d'Hagetmau est l'un des berceaux du meuble en France. Dans les années 1980, cette industrie représentait 19% des effectifs (102 000 personnes) et 20% du chiffre d'affaires (30 milliards de francs) de la filière bois dont elle était un maillon essentiel. Elle fournissait un débouché primordial pour la production sylvicole.

La fabrication de meubles souffrait toutefois d'un déficit structurel, l'activité étant majoritairement artisanale. Très dispersée, moins compétitive que la concurrence étrangère, cette filière qui exportait peu était soumise aux fluctuations du marché intérieur. Lorsque la crise économique éclata dans les années 1980, nombre de fabricants ne purent s'adapter et durent licencier en masse.

C'est dans cette période troublée que nait en 1982 l'entreprise Le Meuble Chalossais. Créée par des ouvriers qui venaient d'être licenciés, elle fut placée sous le régime des SCOP, Sociétés Coopératives et Participatives [1] alors en plein essor.

L'intérêt majeur de ce régime résidant notamment dans l'entraide des sociétés membres du réseau, la jeune entreprise a pu bénéficier d'une expertise technique et d'une aide au démarrage. Le statut présentait toutefois un inconvénient majeur, celui d'être considéré comme l'héritier des mouvements ouvriers. Il souffrait donc d'un problème d'image susceptible de nuire à ses activités commerciales.

Le Meuble chalossais réussit néanmoins à prendre son essor, dans un marché en difficulté, ainsi qu'en atteste sa présence en 1984 au salon du meuble de Paris. Il s'implanta ensuite durablement dans le paysage d'Hagetmau aux côtés des usines Capdevielle et Lonné.

[1] Voir l'article "Société coopérative et participative" sur Wikipédia

Sébastien Poublanc

Transcription

Journaliste
Le Meuble Chalossais, c’est une entreprise qui a un peu plus un an d’existence et déjà une histoire. En janvier 82, une cinquantaine de personnes sont licenciées dans une fabrique de meubles à Hagetmau. 14 d’entre elles décident alors de créer leur propre entreprise, toujours dans le meuble, sous forme de coopérative.
Marcelle Dessa
C’est quelque chose de tout à fait étranger à eux. Ils ne se sentaient peut-être pas capables de se lancer dans une telle opération.
Journaliste
Et vous, vous étiez 14. Et vous étiez sûr de réussir ?
Marcelle Dessa
Ah non, quand on a démarré, on ne savait pas du tout si notre projet aboutirait. Mais on s’est quand même accroché pour y arriver.
Journaliste
Cette jeune femme de 31 ans, c’est Marcelle Dessa, le PDG de la Scop. Elle a été élue, sur les 14, c’est la seule femme. Auparavant, elle était comptable dans l’entreprise qui venait de fermer. Pour faire naître cette fabrique de meubles, il aura fallu 9 mois. 9 mois durant lesquels la fédération des Scop fait une étude du marché et le montage financier. Pour démarrer, il a fallu 1 600 000 francs de matériels. On constitue le capital 320 000 francs avec les 6 mois de salaire de chacun des 14 fondateurs, une partie étant payée par les ASSEDIC au titre de création d’entreprise. Enfin, restait à trouver un local, la municipalité d’Hagetmau leur prête gracieusement un hangar de 500 m². Et dans quelques jours le Meuble Chalossais s’installera dans une usine relais qu’il louera. La grille des salaires a été établie par tous. Elle est plutôt compressée. Les salaires varient entre 4 100 francs et 9 100. C’est le directeur technique et non le PDG qui gagne le plus. Après 14 mois d’existence, le Meuble Chalossais ne fait pas encore de bénéfice. Cela devrait se faire au bout de 3 ans. Mais n’y a-t-il pas un risque de se lancer dans un secteur malade et où les usines ont du mal à survivre ?
Marcelle Dessa
Mais ce n’est pas parce que le secteur du meuble ne marche pas qu’il faut baisser les bras. Et je crois qu’il y a quelque chose à faire dans le milieu du meuble en France. Il ne faut pas laisser la porte grande ouverte aux importations.
Journaliste
Et Marcelle Dessa d'ajouter notre petite taille, notre bonne entente, une bonne gestion et surtout notre créneau du mobilier de complément pas très cher devraient permettre de nous en sortir.
(Bruit)
Journaliste
Alors, sur le plan commercial, lorsque vous dites que vous êtes une Scop, est-ce que c’est un bon argument de vente ou au contraire un handicap ?
Marcelle Dessa
Ça dépend.
Journaliste
Il vous arrive de cacher que vous êtes une Scop ?
Marcelle Dessa
Oui, oui. Oui, au niveau de négoce traditionnel notamment. Au niveau des marchés avec la collectivité ou l’aménagement des villages de vacances ou… Là, ça nous aide, mais au niveau du négoce traditionnel quelque fois, il vaut mieux ne pas le dire.
Journaliste
Pourquoi ? Ça ne fait pas sérieux encore une Scop ?
Marcelle Dessa
Oui, on a l’impression que les gens ne prennent pas ça au sérieux, certains, certains.
Journaliste
Le Meuble Chalossais aura son stand au salon du meuble à Paris. Certes, un petit stand de 25 m² mais cette présence est indispensable. D’autant que pour 84, l’objectif est de doubler le chiffre d’affaires qui a été en 83 de 2 millions 5.