Les mineurs marocains et la religion
Notice
Reportage dans une famille marocaine. Le père Hamed Kalil, est arrivé en novembre 1959 de l'Atlas marocain pour travailler dans les mines du Nord-Pas-de-Calais. La religion apparaît dans ce contexte comme un point d'encrage culturel. Comme Hamed Kalil, 500 mineurs marocains travaillent à la fosse Ledoux près de Condé-sur-l'Escaut. Ils ne sont plus que 3 600 sur l'ensemble du pays minier. Avec les familles ils représentent 45 000 personnes. Les jeunes représentent une part importante de cette population. L'apprentissage de la religion se fait par l'école coranique le mercredi après midi.
Éclairage
Cette présentation d'une famille marocaine débute par un rappel de la situation des Marocains, derniers migrants arrivés dans les mines du Nord-Pas-de-Calais. Ceux-ci sont venus travailler dans les mines à partir de 1947, quand est recruté un premier contingent marocain de mineurs. Ils sont 11 558 en 1965. Cette croissance est liée à la fois aux incertitudes de l'exploitation, et au statut du mineur qui rend difficile les licenciements économiques des mineurs français. Ils constituent un réservoir et un volant de travailleurs plus flexibles. Une autre raison conjoncturelle explique ce choix : la guerre d'Algérie qui tarit le recrutement des mineurs algériens jugés plus politisés. Les mineurs marocains sont recrutés pour des contrats de courte durée : 18 mois, souvent renouvelés pour fidéliser une main d'œuvre stable mais sans statut. Seuls les avantages en nature attachés à la profession sont acquis : logement, chauffage, allocations familiales. C'est au prix d'un mouvement de grève assez dur qu'en 1980 les mineurs marocains ont obtenu la reconnaissance du statut du mineur.
En 1985, les Charbonnages de France officialisent les fermetures à venir dans le Nord-Pas de-Calais et signent avec l'État marocain un protocole d'accord portant principalement sur l'aide au retour. En septembre 1987, la fermeture de la fosse n°5 de Sallaumines est annoncée. Les mineurs bloquent les puits et entament une grève qui durera deux mois. Mais la fermeture en 1987 fait de cette lutte une demi–victoire puisque leur carrière est souvent trop courte pour en bénéficier pleinement. Cette stabilisation a conduit aussi à un changement social : ce ne sont plus des célibataires mais des hommes mariés qui travaillent dans les dernières fosses. Le reportage insiste sur deux aspects particuliers : la place de la femme et des enfants dans cette migration et celle de la religion. L'arrivée massive des femmes et des enfants a joué un rôle majeur dans l'évolution régionale des effectifs scolaires. Les jeunes marocains représentaient en 1976-1977, 12 à 18 % de l'effectif global étranger ; 47, 1% une décennie plus tard.
Si la famille est tout d'abord saisie à travers ses pratiques culinaires et le traditionnel tajine de boulettes, les questions du journaliste tournent surtout autour des pratiques religieuses. La religion d'État au Maroc est l'Islam. Dans le reportage, le chef de famille, Hamed Kalil, père de huit enfants va à la mosquée pour prier. Le commentateur précise qu'elles sont au nombre de 33 dans la région. Généralement, présent en permanence dans chaque mosquée, un imam, personne qui dirige la prière en commun, officie et donne les sermons appelé khutba, le vendredi. Dans cet extrait, le journaliste se trouvant à l'intérieur de la maison de la famille marocaine qu'il interviewe, remarque une tapisserie sur le mur sur laquelle est représentée notamment la Kaab (Ka'ba ou Ka'aba) de la Mecque. Il s'agit d'un grand bâtiment cubique construit en granite au sein de la masjid al-Haram (la Mosquée sacrée) à la Mecque. C'est vers la Kaab que les musulmans se tournent pour faire leur prière quotidienne. La Kaaba symbolise l'unité des musulmans qui adorent un Dieu unique et représente le lieu vers lequel se dirige la prière. C'est également autour de la Kaaba que les musulmans effectuent les 7 tours du tawaf, aussi appelé la circumambulation (rite qui consiste à tourner autour ou à l'intérieur d'un symbole religieux).
Pour les enfants, l'apprentissage de la religion se fait soit, par le biais de la famille qui leurs transmet la culture religieuse, soit via l'école coranique. Les enfants de Hamed Kalil, comme ceux de la communauté marocaine, fréquentent l'école coranique le mercredi après-midi où ils apprennent le Coran et la calligraphie. Cette école est dirigée par un imam. Ce dernier a pour mission de diriger la prière en commun et apprend aux jeunes les rites de l'Islam. C'est l'Amicale des travailleurs et commerçants marocains qui organise cet enseignement grâce à des bénévoles rémunérés par les dons des fidèles. A partir de 1973, l'Amicale a joué un rôle majeur pour rassembler les Marocains et fédérer cette communauté.
Face aux problèmes d'intégration que subit la communauté marocaine, la religion constitue ainsi pour eux un point d'ancrage religieux et culturel où les 33 Mosquée construites dans le Nord-Pas-de-Calais constituent des lieux de prière où se retrouve les marocains.