Difficile cohabitation entre touristes et agriculteurs dans le Parc du Vercors

16 juin 1978
03m 02s
Réf. 00048

Notice

Résumé :

L'objectif de la création du Parc du Vercors en 1970 était la sauvegarde des emplois et le ralentissement de l'exode rural. Ce parc s'étend sur 50 communes, avec une population de 25 000 habitants et 1 millier d'exploitations agricoles. Les touristes profitent également de cet espace, mais tous ne le respectent pas toujours. Une association d'agriculteurs s'est créée pour lutter contre ces incivilités qui polluent les terres qu'ils exploitent.

Date de diffusion :
16 juin 1978
Source :

Éclairage

Tourné dans le parc du Vercors, ce reportage diffusé le 16 août 1978 au JT FR3 Rhône-Alpes, explicite une problématique de conflits associés à la fréquentation touristique dans un milieu d'exploitation agricole. Le film débute en rappelant ce qu'est un Parc Naturel Régional (PNR) : d'une part comme instance de gestion à travers le Syndicat Mixte formé notamment de l'ensemble des communes (elles étaient 50 à adhérer dans les années 1970 dans le Vercors) et composant un territoire avec une spécificité de grande fragilité agricole, et d'autre part comme organisme chargé notamment de l'animation et du développement de ce territoire. La première interview (Alain Isnard, technicien du PNR du Vercors) permet de contextualiser cette mission de développement dans un cadre de montagne où les équipements collectifs (adduction d'eau, routes, réseaux téléphoniques...) nécessaires au maintien des populations font encore défaut. Le Parc s'affiche comme un levier pour un développement qui permettrait de « vivre et travailler au pays » (un slogan évocateur de cette fin des années 1970). La perspective est à la fois sociale et économique.

Les enjeux de préservation environnementale, qui ne sont pas d'emblée évoqués comme une mission du parc, vont cependant trouver toute leur place dans le reportage par le biais des conflits associés aux pollutions et non respect des touristes dans l'espace agricole. Un agriculteur et des images de déchets témoignent de ces dégradations. Ici le reportage se fait l'écho de la revendication des exploitants agricoles de faire en sorte que soient préservés leur paysage, leurs prairies, c'est-à-dire une nature qu'ils contribuent à façonner et qui leur tient lieu d'outil de travail. Organisés en association au sein de l'APAP (Association pour la Promotion des Agriculteurs du Parc naturel régional du Vercors), ils endossent la mission d'une éducation des touristes qui doivent apprendre à respecter leur cadre de travail. Ils rejoignent par là l'une des missions importantes du PNR visant à accueillir, informer et éduquer à l'environnement. Mais rien n'est dit des moyens mis en œuvre de part et d'autre pour y parvenir (si ce n'est une communication diffusée par affiches et dépliants) et rien n'est dit non plus du contenu associé à cette mission éducative qui vise à faire découvrir les spécificités de la faune et de la flore locales et le respect de l'environnement. Le reportage laisse voir, par le choix des images qui associent prairies agricoles, torrents et plus largement vues sur des montagnes, une représentation qui serait partagée sur ce qu'environnement veut dire dans le Vercors. La nature à protéger et celle produite par l'agriculture s'entremêlent dans un ensemble paysager harmonieux alors que les enjeux de préservation portés par les associations environnementalistes et ceux défendus par les professionnels agricoles ne sont pas toujours les mêmes. Ces acteurs ont eu tendance à s'affronter dans les premières années de mise en place des parcs (rappelons que le PNR du Vercors a été créé en 1970). Le reportage témoigne finalement de la possibilité d'une convergence de leurs intérêts visant à faire respecter la qualité de cet environnement naturel et construit et donc les pratiques agricoles qui permettent de le maintenir.

Véronique Peyrache-Gadeau

Transcription

Gérard Moulinet
Lorsque l’on parle de parc du Vercors, il faut considérer sous ce vocable deux choses. D’une part, un organisme juridique qui est un syndicat mixte de communes, avec les conseillers généraux des deux départements de la Drome et de l’Isère, et puis il y a un territoire. Ce territoire, c’est 50 communes, 25 000 habitants et un millier d’exploitations agricoles. Un parc naturel régional, c’est un endroit qui est déshérité, où les agriculteurs s’en vont, où ceux qui restent ont des difficultés à vivre, où il y a de petites communes ; la plus petite, à titre d’exemple, du Parc du Vercors a 11 habitants. Le rôle d’un parc naturel régional, c’est d’aider, c’est d’être un organisme de développement pour l’ensemble de la région. Des efforts ont été faits pour fixer les gens et ce n’est pas le plus facile, loin de là.
Alain Isnard
On s’intéresse d’abord aux problèmes des communes, si vous voulez. C’est-à-dire, bon, les équipes, ce qu’on appelle les équipements de base, c’est tout simplement l’adduction d’eau. Il faut savoir que dans le parc du Vercors, il y a encore des gens qui n’ont pas l’eau, l’eau sur l’évier, qui récupèrent l’eau du toit et qui nourrissent, enfin qui abreuvent leurs troupeaux et eux-mêmes avec cette eau. Alors donc, d’abord, les routes, l’eau, l’assainissement, le téléphone, tout ce qui fait qu’on peut vivre dans un pays et y rester. Les écoles aussi, la fermeture des écoles, c’est un problème énorme qui nous intéresse en premier lieu. Et puis ensuite, bon, pour vivre dans un pays, il faut pouvoir y travailler, y gagner sa vie, y nourrir sa famille. Alors ça aussi, c’est une préoccupation actuellement du parc du Vercors, on essaie d’installer des artisans, de les aider à vivre, de les mettre en contact pour qu’ils travaillent ensemble, etc.
Gérard Moulinet
Le parc a été créé en 1970, c’est en fait la naissance administrative. Tout a commencé véritablement en 1974 car il fallait mettre d’accord ensemble les 50 maires. Depuis cette création, beaucoup de visiteurs, les week-end bien sûr, mais également l’été. Il faut bien le dire, des touristes qui ne respectent pas grand-chose, surtout dans les endroits, bien sûr, les plus agréables.
Louis Jalliffier
Toutes ces prairies, qui sont agréables à regarder, ne sont ni plus ni moins que la matière première qu’ils prélèvent pour nourrir leur bétail toute l’année et produire le lait et la viande qui partent après pour alimenter les villes. Il faut bien savoir qu’une prairie, quand elle est piétinée, quand elle est détériorée, elle n’a plus aucun intérêt pour l’agriculteur, et pour lui, c’est une perte. Donc, je pense que les touristes que nous recevons avec beaucoup de gentillesse devraient penser à respecter cette nature, à en profiter, mais non pas à la détériorer.
Gérard Moulinet
Les prairies, bien sûr, mais également les aires de pique-nique, on trouve des bouteilles un peu partout, des morceaux de verres, qui provoquent la mort du bétail. Une association s’est créée, qui regroupe l’ensemble des agriculteurs, et qui a vocation de protection de la nature, mais également, d’aides économiques à leur apporter. Mais en premier lieu, il s’agit surtout, pour protéger ce magnifique parc du Vercors, de faire l’éducation de ceux qui le visitent. C’est la raison pour laquelle affiches et dépliants sont distribués en grand nombre. Il est évident qu’un tel parc fait partie du patrimoine régional et qu’il convient donc de tout faire pour qu’il prospère dans les meilleures conditions.