La place des saisonniers dans les stations
Notice
Reportage sur le manque de logements sociaux pour les saisonniers dans les stations de sports d'hiver. De nombreuses contraintes empêchent ces immeubles de s'implanter : la question de l'architecture, car les HLM doivent s'insérer dans un paysage de montagne, ou encore le problème de financement des constructions. La plupart des saisonniers vivent dans la vallée et travaillent en station durant la saison, notamment à cause du montant du loyer souvent trop élevé.
- Europe > France > Rhône-Alpes > Savoie
Éclairage
Quelques années après la création des stations de sports d'hiver, la question des saisonniers vient peu à peu mobiliser les débats. Ce reportage de France 3 Rhône-Alpes, traitant de la thématique particulière du logement des saisonniers, est ainsi l'une des premières fois où ce sujet est porté à l'écran. Interrogeant différents professionnels de l'immobilier (Edmond Zulberti, président de l'office départemental d'HLM de la Savoie, Jean Iahns, directeur de l'office départemental d'HLM de la Savoie ou encore Joël Barbe, directeur de la promotion immobilière de la station des Arcs), le journaliste tend à mettre l'accent sur les difficultés récurrentes des saisonniers pour venir travailler en montagne et les solutions en passe d'être mises en œuvre.
Sorties de terre à compter des années 1960, les stations intégrées construites en site vierge sont vues au cours des premières années de fonctionnement comme des modèles à suivre. Cependant, ces stations, véritables industries de la neige, ne permettent pas à tout un chacun de profiter du cadre enchanteur et idyllique des « plus beaux domaines skiables ».
Les saisonniers, véritables travailleurs de l'ombre, voient ainsi leur place questionnée dans un univers où tout a été pensé et réalisé pour les skieurs. Victimes de la spéculation immobilière et du prix souvent prohibitif des loyers, ils sont, dans le meilleur des cas, contraints de se loger dans la vallée, à une trentaine de kilomètres de leur lieu de travail. En effet, rien dans le modèle de financement de ces stations n'a été pensé pour ces travailleurs par ailleurs indispensables, et la réalisation de logements sociaux n'a pas mobilisé les débats durant la période de construction. Ces stations intégrées dites de « 3ème génération » ont ainsi été financées autour d'un modèle économique particulier, où la vente d'immobilier de loisir, particulièrement rentable, a permis de financer les investissements de remontées mécaniques, elles-mêmes produit d'appel des stations pour motiver le séjour des clientèles.
Peu à peu, des opérations de création de logements dédiés sont programmées : c'est le cas aux Arcs 1800, où la réalisation de 900 logements pour les saisonniers, est en 1976, sur le point de débuter. Cependant, pour l'heure, aucune mise en œuvre n'est lancée, ce qui semble compliquer d'autant la mission du cameraman, contraint d'alterner dans un cercle répétitif vues d'ensemble de la station, gros plans sur un immeuble en construction ou encore végétation alentour.
L'articulation des rôles des acteurs publics et privés demeure toutefois une question épineuse : ces logements sociaux, malgré un coût de construction majoré par le respect de contraintes environnementales et paysagères inhérentes à l'implantation en montagne doivent-ils, comme cela est le cas en vallée, être l'action des seules autorités publiques ? Au contraire, cette réalisation doit-elle incomber aux promoteurs, ces derniers se voyant reprocher la multiplication d'opérations immobilières particulièrement lucratives, ceci alors même que la présence de travailleurs saisonniers est fondamentale ? Quoi qu'il en soit, et comme conclut le journaliste, le salarié ne doit pas être pénalisé parce qu'il travaille à la neige.
Aujourd'hui, cette question du logement des travailleurs saisonniers des stations de ski demeure un sujet d'actualité. En 2006, l'État s'est ainsi engagé à la création de 1000 places par an pour les saisonniers, et désormais tout projet d'équipement touristique se devra d'intégrer des logements pour ces travailleurs, la participation de ceux-ci dans le fonctionnement économique de la station ayant (enfin) été actée.
Pour aller plus loin :
- Clivaz Christophe. Se loger dans les grandes stations alpines lorsque l'on est employé saisonnier : la face cachée de l'or blanc? L'exemple du canton du Valais (Suisse). Urbia.
- Gerbaux Françoise, & Marcelpoil Emmanuelle (2006) Gouvernance des stations de montagne en France : les spécificités du partenariat public-privé. In : revue de géographie alpine, 94 N°1, p.9-19.