Election de Jean-Marc Ayrault à la mairie de Nantes

Le changement de configuration politique qui survient dans le grand Ouest dans les années 1970 rend la conquête des mairies particulièrement intéressantes pour les partis. Dans les villes, la politisation des élections municipales s'accélère aux élections de 1977. Elles apparaissent comme un "test" après les élections législatives de 1973 et présidentielles de 1974 qui ont montré la poussée du PS. La possession des villes est un élément clef du pouvoir local étant donné leur inaluence directe ou indirecte sur une part importante de la population. Les résultats sont à la hauteur des espérances et de nombreuses villes basculent en faveur de la gauche. Les socialistes acquièrent notamment Rennes, Brest, Saint-Malo, Lannion, Pontivy et Nantes.

Ces conquêtes sont dans la logique des élections locales et nationales qui se sont succédées depuis le début des années 1970. Elles confirment aussi que les villes votent plus à gauche que le monde rural, y compris dans des villes considérées comme "bourgeoises", mais dont la composition sociale a changé. A Nantes, la victoire de l'union de la gauche s'est réalisée de justesse avec 50,2% des voix contre la liste du maire sortant, André Morice.

La victoire socialiste aux élections municipales en Bretagne est un élément important pour asseoir les transformations politiques en cours. La gestion socialiste des mairies dans un pays traditionnellement méfiant envers la gauche permet d'habituer les électeurs à l'idée d'une politique socialiste à un échelon plus élevé. En 1983, le climat n'est plus le même. Depuis deux ans le pays a un Président, une Assemblée Nationale et un gouvernement socialistes. Dans l'Ouest, dès le premier tour, la gauche perd Brest et Nantes, toutes deux conquises par des listes conduites par le RPR. Une nouvelle fois, à Nantes le score est serré (50,5% des voix) : la victoire de la droite a surtout été rendue possible par la présence de quatre listes de gauche et une abstention plus forte dans les quartiers populaires que dans les quartiers aisés. Au second tout, le PS perdra également Saint-Malo, Lannion et Pontivy. Assurément ces échecs retransmettent un vote sanction contre le gouvernement en place. Ces élections municipales de 1983 marquent donc un tassement de la gauche socialiste et non un recul, contrairement au reste du pays. En 1989, les élections des 12 et 19 mars 1989 apportent quelques surprises avec des gains significatifs de la part du PS : dès le premier tour, les candidats socialistes sont élus au poste de maire dans les deux plus grandes villes de l'Ouest que sont Rennes et Nantes. Malgré une forte abstention, la liste menée par le socialiste Jean-Marc Ayraud, âgé de 39 ans, est élue dans la ville ligérienne avec 50,19% des voix.

Le nouveau maire appartient au groupement des socialistes bretons issus des milieux catholiques de l'ouest. Né en 1950 à Maulevrier dans le Maine-et-Loire, cet ancien professeur d'allemand fut en effet membre de la JAC Jeunesse Agricole Chrétienne dans les années 1960. Agé de 18 ans en 1968, il est séduit par Mitterrand et intègre le PS en 1971, à la suite du congrès d'Epinay. Conseiller général de Loire Atlantique de 1976 à 1982, maire de Saint-Herblain de 1977 à 1989 et député depuis 1986 réélu en 1988, 1993 et 2002 Jean-Marc Ayraud est toujours maire de Nantes réélu en 1995 et 2001. Il est même l'un des porte-parole de Lionel Jospin lors de sa campagne présidentielle de 1995 et président du groupe socialiste à l'Assemblée Nationale depuis 1997.

Cet homme de terrain et de dialogue, même s'il ne fait pas l'unanimité au PS, a su gérer de nombreuses crises, dont celle du PACS en 1998 : on se souvient qu'à cette époque, les députés socialistes s'étaient absentés le jour du vote et avaient ainsi empêché le projet gouvernemental d'être adopté en première lecture. Au final, Jean-Marc Ayraud apparaît comme l'un des principaux personnages politiques ayant contribué au renouvellement politique en faveur de la gauche qui toucha l'Ouest au cours des années 1970-1980.