Plantation de haies paysagères

30 novembre 2004
02m 14s
Réf. 00284

Notice

Résumé :

Depuis 30 ans, le Conseil Général d'Ille et Vilaine mène une politique de reconstitution du bocage. Des techniciens dispensent leurs conseils à des volontaires qui souhaitent participer à la plantation de haies bocagères.

Date de diffusion :
30 novembre 2004
Source :

Éclairage

Élément patrimonial essentiel des campagnes bretonnes, le bocage qui est un système de haies organisé en réseau a fait couler beaucoup d'encre depuis 50 ans. Il a subi en effet une évolution rapide liée à la modernisation de l'agriculture : le maillage très dense des haies, les chemins étroits et profonds, la petite superficie des parcelles qui caractérisaient le bocage breton étaient incompatibles avec les tracteurs et les moissonneuses-batteuses exigés par l'agriculture intensive. Le remembrement va déstructurer le bocage : selon les communes, 50 à 80% du linéaire des haies va disparaître, cette disparition s'étalant jusqu'aux années 2000 (En Ille-et-Vilaine, 38% du linéaire a disparu entre 1980 et 1995).

Le film n'évoque pas l'origine de ce bocage. Voyons quand même rapidement cette question bien analysée par l'historienne Annie Antoine. Le bocage n'est pas naturel, il est une construction sociale évolutive dont la densité maximum se situe entre le milieu du XIXe siècle et 1950. Les haies ont été construites pour répondre à certaines fonctions : au Moyen Age et à l'époque moderne, il s'agissait de bâtir des "cages" afin de protéger les espaces cultivés de la divagation des animaux. Au XIXe , quand l'élevage prend de l'ampleur et que les landes sont converties en prairies, le maillage des haies se densifie. Ces dernières ont toujours comme fonction essentielle la protection des troupeaux mais elles ont aussi des fonctions annexes : donner du bois, drainer le sol, abriter des vents. Le bocage est alors perçu comme nécessaire mais il va perdre son intérêt au milieu des années 50.

Les agriculteurs vont le faire disparaître, aidés par la puissance - toute récente - des tractopelles. Les organisations professionnelles les y incitent d'ailleurs au nom de la modernité.

A la fin du XXe siècle, pourquoi le reconstruire ? La question n'est pas vraiment posée dans le film. Est-il redevenu utile aux agriculteurs ? Oui peut-être, mais le replantage est surtout souhaité par d'autres groupes soit pour des finalités écologiques, soit pour des finalités patrimoniales.

Comment le reconstruire ? Il ne s'agit bien sûr pas de le refaire à l'identique et les essais de reconstitution ou de regénération, souvent réalisés à l'initiative des collectivités territoriales, se multiplient pour dégager des programmes cohérents qui respectent les nouveaux usages. C'est ainsi que depuis 1970, les conseils généraux bretons, relayés par les chambres d'agriculture ont lancé plusieurs programmes qui concernent le plus souvent des haies à plats (et plus rarement des talus). Il faut à la fois rénover et reconstituer le bocage en privilégiant les lieux fragiles. Le nouveau bocage ne ressemble pas à l'ancien faisant apparaître de nouveaux paysages : il aura une maille de 4 à 5 ha en zone cultivée et de 2 à 3 ha pour les prairies. L'essence des arbres dépendra de la finalité recherchée (bois de service, bois d'œuvre, bois de feu), en respectant toutefois l'alternance entre bois de grands fûts (le charme, dans le documentaire) et le bois de bourrage. Il faudra également entretenir la strate herbacée qui pousse au pied des haies.

Si le coût de cette restauration doit être portée par la communauté, puisqu'il n'y a plus de rentabilité immédiate et que le bocage participe de la protection de l'environnement, elle ne pourra toutefois se faire sans la participation active des propriétaires souvent agriculteurs. Les plus jeunes n'ont pas acquis ce savoir-faire, donc des équipes proposent des formations. Retrouverons-nous dans 100 ans les ragosses - c'est à dire les arbres à fagots chênes, châtaigniers ou charmes torturés par un élagage latéral - dont l'abondance est spécifique au bassin rennais ? Oui peut-être, leurs coupes alimenteront alors les inserts et peut-être formeront elles encore, comme le veut la tradition, les brise-lames de la plage de Saint Malo.

Malgré tous ces projets, le solde de replantations demeurent négatif : en Ille-et-Vilaine, entre 1975 et 2002, 150 km ont été replantés chaque année alors que 800 km ont disparu chaque année entre 1980 et 1995.

Bibliographie :

- Philippe Bardel, Jean-Luc Maillard, Gilles Pichard, L'arbre et la haie, Mémoire et avenir du bocage, PUR, 2008.

- Jacques Baudry, Agnès Jouin, De la haie aux bocages. Organisation, dynamique, gestion, INRA, 2003.

- "La Terre", Bretagne[s], n° 9, 2008.

Martine Cocaud

Transcription

Gilles Le Morvan
Nous sommes à Saint Aubin du Cormier pour une démonstration de plantation de haies bocagères.
Technicien
(...) de plant quand on le prend entre le pouce et l'index. Donc là vous voyez il a tendance à venir vers le système racinaire, c'est trop lourd, donc on va faire une coupe jeune.
Gilles Le Morvan
Les conseils sont dispensés par les techniciens du conseil général. 30 ans maintenant que l'Ille et Vilaine développe ainsi une politique de reconstitution du bocage. Objectif : limiter les ruissellements, l'érosion, maintenir la qualité de l'eau, ralentir les vents, etc. Bref, panser les plaies du remembrement.
Guillaume Binois
On a demandé à un moment aux exploitants agricoles de, de produire, produire, produire, et pour produire il fallait de l'espace, et euh donc la solution a été, de, de, ça a été de faire des grandes parcelles. Aujourd'hui, on se rend compte que c'est pas forcément la bonne solution, et donc on, sans revenir en arrière, je dirais qu'on essaie de recomposer avec un maillage moderne euh un bocage en cohérence et en adéquation avec la production agricole.
Gilles Le Morvan
Le département aide donc les communes et les particuliers à redessiner le paysage. 350 km de plantations cette année. Critère : avoir au minimum 200 mètres à créer. Paillage et arbres sont fournis avec la marche à suivre.
Technicien
Voilà, nous on vous a demandé de respecter certaines formes, c'est-à-dire les hauts jets, c'est les arbres qui montent en flèche, tous les 5-6 mètres, et entre eux, mettre des arbustes de bourrage.
Agriculteur
C'est nous qu'on fait ?
Technicien
C'est vous qui allez faire oui. Voilà le charme, est-ce un arbuste ou c'est un haut jet, monsieur ? Si que vous le taillez, le charme, ça fait de la charmille, et si vous (... )d'ici quelques années, vous le laissez monter ça vous fait un haut jet.
Gilles Le Morvan
Pour les particuliers c'est forcément intéressant. Le jour de la plantation chez eux ils n'auront que la sueur à fournir, ils travailleront seuls, mais intelligemment, c'est le but.
Technicien
Il y a rien, il y a juste le praliné.
Patrick Girodon
J'aurai pas su, j'aurai fait un peu au flanc, j'aurai été cherché des, des trucs à droite à gauche, mis un peu en vrac comme ça...
Gilles Le Morvan
En espérant que ça pousse ?
Patrick Girodon
En espérant que ça pousse, mais il y a des trucs qui ça, des fois ça pousse hein. J'avais commencé d'ailleurs.
Gilles Le Morvan
Si cela vous intéresse, sachez que les inscriptions se font en mairie, mais qu'il y a un délai. Eux se sont inscrits il y a un an et demi. Ils recevront leurs arbustes au mois de janvier, et dans 3-4 ans leur paysage commencera petit à petit à ressembler à ça.