Paotred an Ognon e Breizh-Veur [Les Johnnies en Grande-Bretagne]
Notice
Johnniged a vez graet eus ar vretoned divroet e Breizh-Veur evit gwerzhañ ognon. Pennad-kaoz gant unan anezho, Henri Argouach. [A Southampton, Henri Argouach fait partie des Johnnies qui vendent des oignons venus de Bretagne au porte-à-porte. Sa clientèle lui est fidèle, même si ses tarifs sont parfois plus élevés que dans le marché.]
Éclairage
An dielou a ra ano dija er 14ved kantved euz ar gwerza legumach etre Rosko ha porziou Bro-Zaoz. Ar hapusined eo a zo ar re genta o tigas an ognon e Rosko e 1622. Daou hant vloaz goude, Henri Olivier gand pevar mignon a 'ferm eur gobar ; karga a ra anezi gand ognon ha mond a ra da Blymouth. Eur zizunvez goude e teuont endro gwerzet ganto o hobarad ognon hag arhant leun o godellou. Azaleg neuze al lusk a zo kemeret gand tud Rosko da vond evel-se en tu all da Vor-Vreiz evid gwerza o ognon : e 1860 ez int 200 hag a-hed an naontegved hag an ugentved kantved e kresk an niver. E 1931 ez int 1500 : e kreiz he brud emañ neuze ar genwerz ognon ha tost da 9 000 tonenn ognon a zo gwerzet gand ar Johniged. Med e 1932 gand an enkadenn ekonomikel, diskenn talvoudègèz al livre-sterling, politikèrèz Bro-Zaoz da brena marhadourez saoz nemet-ken hag ouspenn hand kudenn an dorifor, kenwerz an ognon a 'z a war zigresk. E 1938 n'int nemed nao c'hant ken o ober ar veaj. E 1969 an niver a gouez da 250 ; e 1978 n'int nemed 38 ken.
Azaleg ar penn kenta ar Johniged a en em reñk e kompagnunez, gand mestri en o 'fenn greet anezo ar " master ". A-raog 1914 e hell eur gompagnunez digemer beteg 60 den. Goude ar vrezel genta e kresk niver ar hompagnuneziou med digreski a ra niver an dud e-barz. Kalz a domestiked, pe tud war hanter gand tud all, a fell dezo kemer penn eur gompagnunez : aliez e chomont gand ar famill. E 1934 e konter 93 kompagnunez. E 2002 n'int nemed eun daouzeg bennag o labourad evito o unan, ha ne jom nemed eur gompagnunez e Cardiff, hini Patrick Mével : hemañ a implij 5 pe 6 den yaouank deuet da Vro-Gembre evid distagella gwelloh saozneg.
Beteg 1939, ar Johniged a guitae Rosko goude pardon santez Barba, d'an trede lunvez a viz gouere. D'ar poent-ze etre 10 ha 20 bag leun a ognon a lohe asamblez. Ar veaj a helle padoud 3 zizun. Dont a ree endro ar Johniged etre miz kerzu ha miz c'hwevrer, rag e rankent beza e poent evid amzer ar haol-fleur, red e oa planta ar patatez, dastum ar re nevez, hada an ognon, piketa ha troha an artichoad kenta, toud an traou-ze a-raog mond endro da werza an ognon. Kasimant toud ar Johniged a ranke hag a rank c'hoaz labourad pa zeuont endro da Vreiz rag ne hounezont ket awalh gand ar werz ognon evid beva e doug ar bloavez.
E Bro-Zaoz, buez ar Johniged a oa renet mad : deuz eun tu ar botellerien ha deuz an tu all ar werzerien. Ar botellerien a oa karget d'ober ar pakajou ognon ; ober a reent war-dro 150 pakad en eun devez. Karget e oant ive da farda boued. Ar werzerien int-i a zave war-dro 6 eur mintin ; a-raog 1914 e lakeent o japeledou ognon war eur vaz, pe stick, greet eun ask e pep penn evid miroud ar pakadou da vond d'an traoñ. Implijet e veze ivez karigellou pe karriou-bout. Er bloaveziou ugent eo deuet ar velo, êset neuze al labour, war ar gidon e veze gellet kas beteg 200 lur ognon. D'ar poent-se ive ar vistri a bren kamionetennou evid mond pelloh da jinf. Ar werzerien a zo kaset diouz ar mintin hag adpaket goude o zroiad. En devez a hirio emañ echu gand ar china ognon : bremañ ar famillou a en em glev gand ar Johniged evid lakaad digas 20 pe 30 pakad dioustu. Gwerza a reont ivez d'ar gomersanted diwar eun dregantad.
Marie-Françoise Keramprant – CRBC - UBO / UBE Brest
Un nebeud levrioù
Gwyn Griffiths, Le monde des Johnnies, Editions Le Télégramme, Brest, 2002.
François Guivarch, Les Johnnies de Roscoff, Nature et Bretagne, Quimper, 1979.
Johnnies du Pays de Roscoff, hier et aujourd'hui, Editions Skol-Vreizh, 1986.
Version française
Dès le XIVe siècle les archives parlent de l'existence du commerce des légumes entre Roscoff et les ports anglais. Ce sont les capucins qui les premiers introduisent les oignons à Roscoff en 1622. Deux cents ans plus tard, Henri Olivier et quatre de ses amis affrètent une gabare, ils la remplissent d'oignons et s'en vont pour Plymouth. Une semaine plus tard, ils rentrent les poches pleines, après avoir vendu leur cargaison. L'initiative est prise et à partir de ce moment les Roscovites vont prendre l'habitude d'aller vendre leurs oignons de l'autre côté de la Manche. En 1860 ils sont 200, et tout au long du XIXe et du XXe siècles leur nombre augmente, en 1931 ils sont 1 500 : c'est l'apogée du commerce de l'oignon, et près de 9 000 tonnes d'oignons sont vendues par les Johnnies. Mais en 1932 avec la crise économique, la dévaluation de la livre-sterling, la politique protectionniste de l'Angleterre du " buy English " et la lutte contre le doryphore, le commerce de l'oignon décline. En 1938 ils ne sont plus que 900 à faire le voyage. En 1969 on n'en dénombre plus que 250 et en 1978 ils ne sont plus que 38.
Dès l'origine les Johnnies s'organisent en compagnies dirigées par des patrons que l'on appelle les " masters ". Avant 1914, les compagnies peuvent regrouper jusqu'à 60 personnes. Après la Première Guerre mondiale, beaucoup de domestiques ou d'associés souhaitent créer leur propre compagnie, souvent en famille : le nombre de compagnies augmente mais elles comptent moins de membres. On dénombre 93 compagnies en 1934. En 2002, ils ne sont plus qu'une douzaine à travailler pour leur compte et il ne subsiste qu'une seule compagnie, celle de Patrick Mével à Cardiff qui emploie 5 ou 6 jeunes venus au Pays-de-Galles pour perfectionner leur anglais.
Jusqu'en 1939, le départ des Johnnies avait lieu après le pardon de sainte Barbe, le troisième lundi du mois de juillet. A cette époque, entre 10 et 20 navires remplis d'oignons appareillaient ensemble pour un voyage qui pouvait durer 3 semaines. Le retour des Johnnies s'échelonnait de décembre à février. En effet, ils devaient être là pour la saison des choux-fleurs, il fallait planter les pommes de terre, récolter les nouvelles, semer les oignons, repiquer et couper les premiers artichauts, et cela avant de repartir pour une nouvelle campagne. Presque tous les Johnnies devaient et doivent encore travailler durant leur séjour en Bretagne, les gains de la vente des oignons ne leur rapportant pas suffisamment pour en vivre toute l'année.
En Angleterre la vie des Johnnies était bien réglée : d'une part les botteleurs et d'autre part les vendeurs. Les botteleurs confectionnaient les chapelets d'oignons, ils pouvaient en faire jusqu'à 150 par jour. Ils préparaient aussi les repas. Les vendeurs étaient debout à 6 heures du matin, avant 1914 ils installaient leurs chapelets d'oignons sur des bâtons au bout desquels ils faisaient une encoche afin d'éviter que les oignons ne tombent. Ils utilisaient également la brouette et la charrette à bras. Dans les années 20 l'apparition du vélo facilita le travail. Le guidon pouvant supporter jusqu'à 200 kg d'oignons. C'est aussi à cette époque que les patrons investissent dans des camionnettes leur permettant d'élargir leur périmètre de porte à porte. Les vendeurs sont déposés le matin et repris le soir après leur tournée. A présent le porte à porte n'existe plus : les familles s'entendent pour passer leurs commandes aux Johnnies qui livrent de 20 à 30 chapelets d'un coup. Ils vendent aussi aux commerçants moyennant une commission.
Marie-Françoise Keramprant – CRBC - UBO / UBE Brest
Bibliographie
Gwyn Griffiths, Le monde des Johnnies, Editions Le Télégramme, Brest, 2002.
François Guivarch, Les Johnnies de Roscoff, Nature et Bretagne, Quimper, 1979.
Johnnies du Pays de Roscoff, hier et aujourd'hui, Editions Skol-Vreizh, 1986.