Bagad d'Auray

Les bagadoù tiennent une place fondamentale dans le renouveau de la musique traditionnelle en Bretagne. Malgré une création assez récente, qui remonte aux années 1940, le bagad jouit d'une popularité sans pareille dans le monde de la musique bretonne. Son ouverture à la jeunesse en fait un vecteur de transmission peu commun et son organisation offre une diversité et un bouillonnement musical bienvenus.

C'est à l'initiative de Polig Montjarret et Dorig Le Voyer que les principaux bagadoù (pluriel de bagad en breton) se regroupent au sein de la fédération Bodadeg ar Sonerion, plus communément appelée B.A.S. Elle-même est divisée en six sections : cinq départementales et une section dite d'expatriés, qui regroupe les bagadoù exerçant hors des frontières bretonnes. On trouve ainsi un bagad à New York, par exemple. Succès aidant, certains bagadoù ont même créé leur bagadig (le petit bagad), destiné à la formation des jeunes et qui sert de tremplin vers le bagad.

Le bagad est divisé en trois pupitres : les bombardes, les cornemuses et les percussions. Ceci marque une différence avec le modèle du pipe-band écossais ayant servi aux bagadoù. Ainsi, ces derniers ne possèdent que deux pupitres, cornemuses et percussions. L'ajout d'un pupitre de bombardes, hautbois rustique à la tessiture plus étendue que la cornemuse, est le seul lien direct à la tradition populaire bretonne dans l'instrumantarium.

Le bagad a aussi évolué par rapport à sa vocation première, le défilé, pour devenir un véritable orchestre. Le style du bagad apparaît plus éloigné de l'inspiration militaire qui anime la musique d'un pipe-band. C'est grâce au travail et à l'influence du penn-soner (le chef d'orchestre) que s'est progressivement opéré ce changement. On peut par exemple citer l'exemple de Roland Becker, compositeur, arrangeur, ethnomusicologue mais aussi sonneur de bombarde, qui a participé à ce changement au sein de la Kevrenn Alre (Bagad d'Auray) dans les années 80.

On le voit ici lors du concours organisé tout les ans. Celui-ci se déroule en deux manches, la première au début de l'année à Brest et la seconde, la finale, dans le cadre du Festival Interceltique de Lorient, en août. A chaque fois, les bagadoù doivent jouer une suite d'une dizaine de minutes, avec pour contrainte musicale d'utiliser les airs traditionnels d'un terroir spécifique. A cette époque la Kevrenn Alre choisit de bousculer les cadres établis et de délaisser complètement la tradition, provoquant le courroux de certains spectateurs. Cette rupture est représentative de son époque dans le milieu musical des bagadoù.

Youenn Chapalain