La plage de l'étang d'Isle à Saint-Quentin
Notice
Reportage à Saint-Quentin où une association gère avec l'aide de la municipalité une plage le long du canal pendant la durée de l'été. Cela permet à de nombreux enfants qui ne peuvent pas partir en vacances de s'adonner à des jeux nautiques. Le président de l' association présente l'activité et évoque les problèmes d'envasement du canal.
- Europe > France > Picardie > Aisne > Saint-Quentin
Éclairage
La "plage de l'étang d'Isle", qui jouxte le canal de Saint-Quentin et et la Réserve naturelle du marais d'Isle, constitue aujourd'hui le rendez-vous estival des baigneurs axonais. Le projet de création de cette plage remonte à la fin des années 1970. S'il brille alors par son originalité, l'aménagement d'un espace de baignade à la proche périphérie de la ville n'est pas réellement une nouveauté. Les bains citadins (dits également "pleine eau") ont en effet une histoire centenaire en Picardie. On pense par exemple à ceux de l'Île aux Fagots : implantés au cœur des hortillonnages et alimentés par les eaux de la Somme, ils deviennent dans les années 1930 un espace de loisirs prisé de la population amiénoise. Les bains constituent alors un lieu de détente, de convivialité et de régénération du corps mais aussi un espace éducatif où les jeunes citadins apprennent les rudiments de la natation. Plébiscités à l'origine par des jeunes issus de milieux populaires, mais aussi des militaires et des mariniers, ils touchent progressivement l'ensemble du corps social au cours de l'entre-deux-guerres. Ils tendent néanmoins à péricliter en Picardie après la Seconde Guerre mondiale : la pollution des cours d'eau conjuguée au succès de la pratique en bassin amènent en effet les populations à délaisser les rivières et les plans d'eau au profit des piscines.
Ce désintérêt n'est que provisoire. Les baignades de pleine eau, dont celle de Saint-Quentin, connaissent un nouvel essor au cours des années 1970. C'est en effet à cette période qu'émergent, dans la société, de nouvelles représentations du corps : la "civilisation des loisirs" valorise le "corps de plaisir" (sensations, hédonisme) au détriment du "corps productif" (efforts, souffrance). C'est également à ce moment que s'opère une "naturalisation de la ville", c'est à dire le développement, au sein des espaces urbains, de pratiques revendiquant un lien avec la nature. Suivant le modèle des stations balnéaires, la plage de Saint-Quentin s'organise alors principalement autour de pratiques récréatives (toboggans, plongeoirs, pédalos, balancelles) et de détente. Elle devient par ailleurs le lieu où le baigneur se met en scène, où il montre toute l'attention qu'il porte à son corps (bronzage, musculature). Mais le développement de la plage axonaise correspond aussi à un enjeu social et sanitaire. Cet équipement accueille des populations de tous âges et de toutes conditions sociales. Il contribue ainsi à l'amélioration du cadre de vie local, prenant le relais des grandes institutions traditionnelles (colonies de vacances, mouvements de jeunesse, patronages) dont certaines sont sur le déclin. C'est en ce sens que l'association qui assure le fonctionnement de la plage reçoit d'importants subsides de la part de la municipalité.
Le succès rencontré par le site de l'étang d'Isle incite la ville de Saint-Quentin à développer d'autres initiatives autour des loisirs d'eau, telle la "plage de l'Hôtel de Ville". Aménagée pour la première fois en 1996 (soit six ans avant "Paris Plages"), cette animation transforme tous les étés le cœur historique de Saint-Quentin en un espace de détente et de jeux aquatiques. Accueillant plus de 270 000 visiteurs en 2013, elle constitue un temps fort de la vie locale et vient avantageusement compléter l'offre de loisirs déjà proposée à la "plage de l'étang d'Isle".