Des cépages anciens retrouvés en Gascogne
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Résumé
Dans ce reportage consacré aux cépages anciens du Gers, Nadine Raymond chargée R&D du conservatoire ampélographique privé de la société coopérative Plaimont, présente le cépage tardif. Celui-ci est désormais autorisé à la plantation, selon Olivier Yobrégat, ampélographe de l’Institut français de la vigne et du vin. André Dubosc, ancien directeur de Plaimont, très investi dans la redécouverte des cépages oubliés, se réjouit des perspectives d'avenir qu’ils offrent à la viticulture gasconne.
Date de publication du document :
14 sept. 2021
Date de diffusion :
02 janv. 2018
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Contexte historique
ParEthnologue
Publication : 14 sept. 2021
À la fin du XIXe siècle, les vignobles gersois, comme ceux de France et d’Europe, sont victimes des ravages du phylloxéra, un insecte venu d’Amérique qui prolifère très rapidement par le système racinaire des plants. Les seuls remèdes sont l’arrachage et la replantation de porte-greffes américains résistants au parasite. Mis à l’épreuve, le vignoble du Saint-Mont se remet mal de l’épisode. Il est en partie abandonné, réservé à une production d’appoint ou familiale dans un contexte polycultural, ou encore replanté en partie de cépages hybrides, plus productifs ou plus résistants aux maladies. Au cours de la première moitié du XXe siècle, il ne connaît pas les mêmes transformations que ses voisins.
Au début des années 1970, un projet coopératif émerge localement laissant présager le renouveau du vignoble. Les coopératives viticoles de Plaisance, Aignan et Saint-Mont alors en difficulté économique s’unissent autour d’une même bannière : la société coopérative Plaimont. Un double objectif est visé : orienter la production vers la qualité et redynamiser les conditions de production par la mutualisation des vignerons. André Dubosc et Jean-Paul Houbart, respectivement ingénieur et technicien, sont recrutés pour relever ce qui tient alors du défi : restructurer l’ensemble du vignoble.
Dans ce souci de requalification, Jean-Paul Houbart arpente le vignoble. Il observe les parcelles, procède à des relevés de terrain et inventorie les cépages présents dans les rangs de vigne en se référant à la banque de données du conservatoire ampélographique national de l’INRA [1], au Domaine de Vassal. Des souches très anciennes, non greffées et endémiques au piémont pyrénéen, sont identifiées. La propriété de la famille Pédebernade à Sarragachies en offre 600 pieds. Les plus grands ampélographes (agronomes spécialisés dans l’étude des cépages) sont consultés : Pierre Marcel Durquety, Jean-Michel Boursicot, Thierry Lacombe et Olivier Yobrégat. Le constat de l’investigation est insolite. On retrouve sur cette parcelle des cépages locaux tels que le Tannat, le Fer Servadou, le Morrastel, le Miousap (nom gascon de l’Humagne blanche) et le Camarou noir. Sept d’entre eux restent pourtant inconnus de l’inventaire national et auraient été oubliés du savoir agronomique.
Les recherches qui suivent cette découverte sont riches d’enseignement. La composition des sols propres à ces terroirs de l’ouest du département du Gers et aux Landes, les Sables Fauves, parce qu’ils sont justement riches en sable, ont permis, tout comme en Camargue, à ces souches de résister à la prolifération du phylloxéra. Les cépages retrouvés auraient alors été plantés entre le début et le milieu du XIXe siècle. Ces 2000 m² de vignes retrouvées sont alors un témoignage unique des pratiques culturales et agronomiques d’il y a près de 150 ou 200 ans. Ce phénomène a valu à la parcelle de Sarragachies d’être classée, en 2012, au titre des Monuments historiques (titre généralement réservé au patrimoine bâti) pour assurer la protection de ce patrimoine végétal, identifier ses qualités et les transmettre.
Les découvertes ne se limitent pas à Sarragachies. Certaines parcelles de Viella et de Pouydraguin offrent les mêmes mystères. Malgré les identifications génétiques, au total, près de 12 cépages restent inconnus. Forte de ce patrimoine génétique, Plaimont valorise dès les années 1980 cet héritage et crée, en 2002, un conservatoire ampélographique ad hoc dont les connaissances sont aujourd’hui internationalement reconnues. Avec le concours de l’INRA et de pépiniéristes aguerris, des parcelles expérimentales sont alors plantées et suivies pied par pied.
Face à l’uniformisation des plantations de cépages certifiés comme le Cabernet ou le Merlot, l’objectif est de redonner une expression locale à ces terroirs, d’évaluer leurs propriétés et de diversifier le capital génétique du vignoble grâce à ces cépages dits autochtones. N’y aurait-il pas là aussi, des solutions à espérer pour répondre aux enjeux de production contemporains et futurs ? Équipes de recherche et vignerons poursuivent les expérimentations, toujours guidées par le souci d’un vin de grande qualité mais aussi celui d’une production responsable et durable adaptée à ses terroirs.
[1] Institut national de recherche agronomique.
Bibliographie
- Marie-Ange Lasmènes et Alain Tendero, À hauteur d’hommes. Plaimont, une aventure vigneronne, Plaimont, Saint-Mont, 2018.
- Simon Lesage, « Menacés par le changement climatique, des viticulteurs replantent des cépages oubliés », Le Monde, 19 août 2020.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Pierjean Frison
Retour en plaine pour notre feuilleton de la semaine qui nous emmène à la découverte des vieux cépages qui font la viticulture occitane, mais qui ont parfois été presque totalement oubliés.Aujourd’hui, deuxième épisode dans lequel nous allons nous rendre dans le Gers pour y apprécier les qualités du cépage tardif.Mais aussi nous rendre sur la seule parcelle classée monument historique en France, une série signée Odile Debacker et Jean-Pierre Duntze.
Odile Debacker
Après Marseillan, direction Saint-Mont dans le Gers, à la redécouverte des cépages historiques abandonnés.On vous emmène découvrir le conservatoire ampélographique privé le plus important de France à Pouydraguin.Propriété de la cave coopérative de Plaimont, il abrite de nombreux pieds de vigne identifiés ou non.L’un d’eux, le bien nommé cépage tardif, est une promesse d’avenir.
Nadine Raymond
Surtout, c’est un cépage qu’on redécouvre totalement.On avait trouvé deux pieds dans une de nos très vieilles parcelles, sur l’appellation Saint-Mont.On en a mis vingt pieds sur ce conservatoire, plantés en 2002.Depuis, on l’étudie, on l’observe tout au long de l’année.On regarde comment il se comporte.Est-ce qu’il est sensible à certaines maladies ?Est-ce qu’il produit correctement ?Quinze, seize, dix-sept...Au moment des vendanges, nous, on va compter le nombre de grappes sur tous les pieds récoltés.Nombre de grappes, nombre de pieds.Ça nous donne une idée du nombre de grappes par pied.On va peser la quantité totale de vendange et ça nous donnera une idée du rendement par pied.
Odile Debacker
Un travail de longue haleine, mené conjointement avec l’ampélographe Olivier Yobrégat.Identifié génétiquement par l’INRA de Montpellier, le Tardif vient d’être inscrit au catalogue national des cépages autorisés.
Olivier Yobrégat
C’est un acte, pas un acte de naissance mais un acte de renaissance pour ce cépage, qui passait complètement à côté des ampélographies, probablement ancien mais qui était un petit peu disséminé en tant que cépage secondaire dans les anciennes vignes.Donc, à partir d’aujourd’hui, les vignerons ont le droit de le multiplier et de le planter.
Odile Debacker
Il y a tout juste un an, nous étions venus pour l’une des premières micro-vignifications du Tardif .
Nadine Raymond
Le côté épicé du cépage, c’est d’ailleurs pour ça qu’on pense qu’il a un petit peu trouvé sa place parmi nos cépages actuels.
(Bruit)
Nadine Raymond
En tout cas, on est persuadé que c’est notre avenir.On veut exploiter au maximum notre patrimoine végétal local qui, non seulement a évolué dans cet environnement, donc s’y est adapté, et qui en plus de ça nous offre une diversité et une richesse qui est exceptionnelle.
Odile Debacker
Cette redécouverte, on la doit à une poignée de pionniers, à l’origine de la seule parcelle classée monument historique :Sarragachies, véritable musée végétal préphylloxera.
André Dubosc
Je suis fier d’avoir préservé cette biodiversité.Moi, j’en faisais un musée, je ne pensais pas qu’il y avait une telle richesse pour l’avenir de nos jeunes, moi qui suis à la retraite, qui regarde, j’ai le coeur qui bat quand je vois les cépages qu’ils remettent en place et les espérances dans les conservatoires et dans la remultiplication de ces cépages.
Odile Debacker
Une course contre la montre est enclenchée depuis quelques années.Elle s’intensifie afin de sauvegarder tous ces cépages traditionnels abandonnés.C’est la quête inlassable des ampélographes amateurs ou scientifiques.
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