Exposition sur l'œuvre du Corbusier à Firminy
Notice
A Saint-Etienne l'exposition consacrée au Corbusier permet de redécouvrir les réalisations de cet architecte et notamment celles de Firminy. Ce sera aussi l'occasion de trouver des fonds afin d'achever l'église, seul monument de Firminy non terminé.
- Rhône-Alpes > Loire > Firminy
Éclairage
Les unités d'habitations de Le Corbusier font figure d'exception dans le contexte de la reconstruction de l'après-guerre. Firminy appartient à une série de cinq prototypes commencée en 1952 à Marseille, poursuivie à Rezé-les-Nantes, à Briey-en-Forêt et à Berlin. Cet immeuble de logement fait donc partie d'un ensemble plus vaste qui témoigne des ambitions du mouvement moderne en matière de logement et d'urbanisme, tout en montrant leurs limites.
Dans les années 1960, Firminy est une cité industrielle dont le dynamisme bénéficie de sa proximité avec Saint-Etienne. Son maire est l'ancien ministre de la Reconstruction, Eugène Claudius-Petit qui avait soutenu Le Corbusier pour la construction de la première unité d'habitation à Marseille. En 1954, pour sa propre ville, il décide la création d'un pôle nouveau pour répondre à l'évolution démographique de l'après-guerre et aux besoins de modernisation de l'habitat. Situé en pleine nature, il est baptisé « Firminy-Vert ». Il doit comprendre une maison de la culture, un stade, une unité d'habitation et une église. Le plan d'ensemble est conçu par André Sive, Marcel Roux, Charles Delfante et Jean Kling. Le Corbusier est chargé de plusieurs édifices et, après sa mort survenue en 1965, c'est André Wogenscky, l'architecte de la Maison de la Culture de Grenoble, qui prendra sa succession.
Sur le site d'une ancienne mine à ciel ouvert, Eugène Claudius-Petit prévoit un vaste complexe sportif intégrant un stade, une piscine, des terrains de sport. Un théâtre en plein air et une maison de la culture sont également programmés. Emblématiques de la politique d'André Malraux, nommé ministre chargé des Affaires Culturelles en 1959, les maisons de la culture ont été créées dans le but de favoriser la confrontation entre l'art et le public. Elles bénéficient d'un nouveau mode de financement également réparti entre l'État et les collectivités locales. Firminy est une de ces huit maisons construites en France sur la vingtaine initialement prévue par Malraux. Reconstruction, nouvelle politique culturelle et théorie architecturale moderne se conjuguent ici.
Pour la maison de la culture, Le Corbusier réalise un bâtiment sur trois niveaux comprenant l'accueil, une salle de spectacle, un auditorium-cinéma, une bibliothèque, des ateliers d'arts plastiques et des « rues » d'exposition. Sa façade inclinée en porte-à-faux au-dessus du terrain de sport ancre le bâtiment au sommet de la carrière et rappelle l'originalité du premier projet dans lequel la maison de culture et le stade étaient liés dans une même construction. L'ossature est constituée de portiques en béton armé. Le béton brut de coffrage de la façade rime avec la roche naturelle de la falaise. Une solution technique inédite a été ici mise en œuvre pour le toit incliné : un couvrement en voûte inversée qui créa d'ailleurs des problèmes d'étanchéité. Le stade, initialement prévu sous la maison de la culture, fait l'objet d'une étude à partir de 1958. Les gradins en béton, d'une capacité de 4000 places dont 800 couvertes, suivent la forme de cuvette allongée du site et délimitent un terrain de football et une piste d'athlétisme de 400 mètres. André Wogenscky construisit la piscine couverte après 1965.
Trois unités d'habitation étaient projetées. Une seule fut réalisée. Susceptible d'accueillir 2000 habitants, composée de 414 appartements, elle présente des dimensions imposantes : 131 m de longueur par 21 m de large et 50 m de haut. L'ossature en béton est posée sur des portiques qui surélèvent les dix-sept étages du bâtiment. Les appartements sont orientés nord/sud favorisant ainsi une double exposition. Sept rues intérieures donnent accès aux appartements et le toit terrasse abrite l'école maternelle. Les limites des crédits HLM ont amputé le projet de la rue commerçante interne que l'on trouve à Marseille.
Également dessinée par Le Corbusier, l'église Saint-Pierre-de-Firminy est restée longtemps inachevée. Elle a cependant bénéficié d'un programme de sauvegarde et a été terminée dans le respect du projet initial en 2006 par José Oubrerie assisté de Jean-François Grange-Chavanis, architecte en chef des Monuments Historiques. Le Corbusier avait conçu en 1961 un édifice de plan carré, sur la base duquel s'élève un cône tronqué en béton brut d'une hauteur de 33 mètres. Cette église participe du renouveau de l'architecture sacrée auquel le Corbusier a également contribué avec le Couvent de la Tourette.
L'ensemble des aménagements de « Firminy-Vert » illustre les théories architecturales qui ont été mises au point par les architectes du mouvement moderne et par le Corbusier avant la Seconde Guerre mondiale. Leur caractère expérimental apparaît ici d'autant plus clairement qu'elles se trouvèrent alors confrontées à des conditions et à des besoins qui évoluaient rapidement. Les profondes mutations de l'après-guerre réclamaient en effet la construction de logements en grande quantité. Alors que Firminy-Vert restait inachevé, les tours et les barres de « grands ensembles » apparaissaient, trahissant une part des idéaux humanistes et sociaux qui furent à l'origine de cette cité.