La relance du charbon ?
Notice
La crise du pétrole de 1979 et son coût de plus en plus élevé soulève des inquiétudes et des questionnements. Une solution serait de relancer la production du charbon.
Éclairage
À la suite du second « choc pétrolier » de 1979 et de l'augmentation des coûts de l'énergie pétrolière, la question est posée - avant de l'être au ministre de l'Industrie André Giraud - dans le reportage du 12 mars 1980 de la série « Dialogues », de la relance possible de la production charbonnière malgré le coût de la main d'œuvre qui fait parfois préférer l'importation de charbons étrangers moins chers. Deux secteurs miniers des Houillères du Centre-midi sont, dans la région Rhône-Alpes, concernés par cette relance potentielle : le bassin de la Loire (175 000 tonnes en 1979) avec, à cette date, un seul puits encore en activité (le puits Pigeot à la Ricamarie près de Saint-Etienne) et le bassin d'anthracite de La Mure en Isère (360 000 tonnes).
Le bassin de la Loire est le plus ancien : son exploitation industrielle a débuté dans le premier quart du XIXe siècle et l'histoire de la mine et des mineurs a marqué l'histoire et les mémoires des populations stéphanoises. Preuves en sont dans le reportage, d'une part la statue ricamandoise de Michel Rondet, responsable de La Fraternelle des mineurs, emprisonné après la manifestation du Brûlé de 1869 (qui a servi de modèle à Émile Zola pour écrire son Germinal), devenu dirigeant du syndicat des mineurs de la Loire (1881) puis de la Fédération nationale (1883) et, d'autre part, l'interview en 1980 du maire de Saint-Étienne, Joseph Sanguedolce, lui-même ancien mineur, devenu après la Libération dirigeant du syndicat CGT (voir son portrait). Ce qui explique ses considérations dithyrambiques – mais peu crédibles - sur le charbon stéphanois « le meilleur du monde » avec un coût très bas de la thermie. En effet l'ancienneté de l'exploitation explique les difficultés pour rendre opérationnelles les réserves estimées à 2 à 3 millions de tonnes : seulement 1/10e peut en être extrait sans avoir à se livrer à des travaux importants qui oblitéreraient le prix de revient. Si le maire de Saint-Étienne et le délégué des mineurs de la CGT Loire, soulignent le coût social d'une fermeture éventuelle que l'on ne peut mettre en balance avec les coûts purement financiers, le président du Conseil général de la Loire, le sénateur Lucien Neuwirth, est plus nuancé en mettant cependant la question du prix de revient en regard avec l'augmentation des prix du pétrole : le Conseil général (comme le Conseil régional) a d'ailleurs à l'unanimité émis un vœu pour la poursuite de l'exploitation. Quant au directeur des Houillères de la Loire, il précise que la fermeture du Puits Pigeot est programmée pour le mois de juillet 1980.
Le bassin de La Mure en Isère semble être, à court terme, moins menacé du fait de sa production spécifique d'anthracite, malgré la concurrence - à cette date - du charbon vietnamien. L'exploitation du charbon des Houillères du Dauphiné nationalisées en 1946 (et ayant rejoint les Houillères du bassin Centre-midi en 1968), situées sur le plateau de la Matheysine au sud de Grenoble, a été facilitée par la construction en 1888 d'une ligne de chemin de fer pour évacuer le charbon dans le cadre du Plan Freycinet (1878). La construction de ce chemin de fer à voie unique fut difficile, avec ses 18 tunnels et neuf viaducs. À la fin de l'exploitation de la houille, il a été transformé en train touristique jusqu'à l'automne 2010. La main d'œuvre traditionnelle formée de mineurs-paysans venant des vallées alpines a été remplacée par des immigrés, des Italiens dans un premier temps, puis des immigrés de l'Afrique du nord après la Seconde Guerre mondiale. L'anthracite de la Mure alimente les foyers domestiques, une centrale thermique et les cimenteries proches (en utilisant les poussières de charbon très importantes dans le gisement) et ce jusqu'en mars 1997 où le dernier puits du bassin sera fermé.