La foire de Beaucroissant
Notice
La foire de Beaucroissant comprend un grand marché au bétail. Les acheteurs, aussi bien français qu'étrangers peuvent y acquérir des vaches, des mulets ou des chevaux.
Éclairage
Connue pour être une des plus anciennes, la foire de Beaucroissant, village situé à une trentaine de kilomètres de Grenoble, reste une institution au niveau régional, au niveau alpin et même plus largement au niveau international. Sa notoriété tient à sa longévité puisqu'elle existe sans discontinuité depuis le début du XIIIe siècle. En réalité elle aurait même des origines antérieures puisque l'on trouve des traces d'une activité commerciale depuis la fin du IXe siècle. Mais la foire « actuelle », immense foire aux bestiaux et autres biens matériels, trouve son origine en 1219. Selon les historiens cette manifestation serait liée au rassemblement massif que les Grenoblois avaient organisé un an après le « tsunami » catastrophique qui avait submergé Grenoble. Les survivants se seraient regroupés au pied de la colline de Parménie, site détenu par les évêques de Grenoble, pour rendre hommage aux disparus. Ce rassemblement aurait drainé des commerçants et des marchands de toute la région, initiant une foire à l'instar de celles de Pézenas et Montagnac en Languedoc. En effet, comme ces dernières, Beaucroissant est au carrefour de grands axes de circulation de l'époque, entre les Alpes, la vallée du Rhône mais aussi entre l'Empire, le Royaume de France et les différents duchés et comtés qui composaient l'espace français de cette époque. En raison de sa proximité avec les zones de montagne, d'emblée la foire de Beaucroissant a été une grande foire aux bestiaux, notamment celle du mois de septembre.
Cette spécialité a fait la notoriété et la richesse de Beaucroissant. C'est elle qui focalise l'attention, notamment lors de la journée d'ouverture. Le reportage de septembre 1988 privilégie l'ambiance qui règne sur ce champ de foire plutôt que de se livrer à une description du déroulement. Chaque année en effet, un reportage plus ou moins long (allant de la brève informative à un reportage de quelques minutes) est consacré à la foire de septembre par FR3 Alpes, attestant de l'importance de l'événement pour la région. Le journaliste veut montrer les coulisses de la foire qui échappent au visiteur classique, en suivant les démarches des acteurs majeurs, éleveurs et maquignons. Dans la semi obscurité du petit matin éclairée seulement par les phares des camions, on suit l'arrivée des bêtes qui en sont débarquées pour être présentées au public, celui des acheteurs en premier lieu. C'est d'ailleurs le thème du reportage que ce commerce des bêtes, avec ses rites et ses pratiques qui échappent à l'attention d'un visiteur : une vente qui passe par l'examen attentif et rapide des bêtes, nécessitant un œil aiguisé et surtout, même si cela reste non dit, une connaissance mutuelle entre commerçants et éleveurs. A l'heure des transactions numérisées, en tout cas écrites, les pratiques restent séculaires : une négociation codée et rapide et un engagement oral. Devant la caméra, les négociants semblent jouer leur rôle sans dévoiler vraiment les usages. Alternent les vues d'ensemble des bêtes qui défilent devant le chaland ou qui sont alignées dans des parcs montés pour l'occasion. Le choix du sujet ce jour là ne donne aucune idée de l'immensité du champ de foire, qui a structuré l'organisation du village. En dehors de la période de la foire, cet espace reste la trace visible de cette manifestation hors normes. Quelques brèves indications en matière de fréquentation donne cependant un aperçu de son importance ; pour les bêtes (10 000 : essentiellement des bovins et des équins et plus rarement des moutons et des porcs, même si à une époque volailles et autres animaux étaient aussi présents), pour les visiteurs (en moyenne 300 000). Aucune indication du montant des affaires pour les éleveurs et maquignons, encore moins sur ce que la manifestation apporte au village et à ses habitants. Pour seule réponse à sa question sur la bonne tenue des affaires, le journaliste obtiendra de l'homme interrogé une moue étudiée et un propos lacunaire sur leur médiocrité.... Mais avant de tourner le dos à la caméra, son regard malicieux dément ses propos. Cette attitude renvoie à la difficulté de saisir la réalité d'un monde qui fonctionne selon des pratiques certes traditionnelles, mais efficaces. La longévité de cette manifestation est sûrement le meilleur signe, même si à côté des activités classiques, cette foire est devenue très largement un moment patrimonial.