Possibilité de retraite à 60 ans à taux plein à partir du 1er avril 1983

22 janvier 1982
02m 01s
Réf. 00037

Notice

Résumé :

A partir du 1er avril 1983, la retraite peut être prise à 60 ans à taux plein pour 37,5 ans - au lieu de 65 ans - dans le Régime général des salariés du privé. Les régimes complémentaires doivent adapter leur financement pour attribuer également la retraite sans minoration à partir de 60 ans.

Date de diffusion :
22 janvier 1982
Source :
A2 (Collection: JA2 20H )

Éclairage

A la suite de l'élection de François Mitterrand à la Présidence de la République et d'une majorité socialiste aux législatives en 1981, le gouvernement conduit par Pierre Mauroy décide de mettre en oeuvre ce qu'il est coutume d'appeler la “retraite à 60 ans”, qui constitue une revendication de longue date, déjà évoquée dans le cadre de la loi dite “Boulin” de 1971 (voir le document Robert Boulin : Amélioration des retraites et allongement de la durée d'assurance) ; et l'une des propositions de la campagne présidentielle.

Il faut rappeler cependant que :

- d'une part la possibilité de prendre sa retraite à 60 ans existait déjà, mais dans des conditions telles que le montant en était faible (25% du salaire moyen des 10 meilleures années) et que les retraites complémentaires n'attribuaient la retraite à taux plein qu'à partir de 65 ans.

- d'autre part certaines catégories (inaptes au travail, déportés ou internes politiques de la résistance, anciens combattants et prisonniers de guerre, travailleurs ayant exercé des emplois pénibles pendant 5 ans au cours des 15 dernières années d'activité et ayant 41 ans d'assurance, mères de famille ouvrières de 3 enfants justifiant de 30 ans d'assurance, femmes réunissant 37,5 ans d'assurance) pouvaient prendre leur retraite à 60 ans à taux plein (50% du salaire moyen).

Les ordonnances des 26 et 30 mars 1982, qui entrent en vigueur le 1er avril 1983, permettent aux personnes non concernées par l'une des catégories énumérées ci-dessus, et qui le souhaitent, de prendre leur retraite dans le Régime général (et les régimes alignés, voir ce document) à partir de l'âge de 60 ans avec un taux de pension de 50 % du salaire moyen des 10 meilleures années, dès lors qu'elles justifient de la durée totale d'assurance de 37,5 ans (150 trimestres) dans tous les régimes auxquels elles ont été affiliées au cours de leur vie professionnelle.

A noter que la durée d'assurance exigée pour savoir si le taux maximum de 50% est atteint n'est pas modifiée. La nouveauté réside dans le fait que, pour la comptabiliser, les durées d'assurance acquises, par une même personne, dans différents régimes, sont additionnées. Ensuite, chaque régime verse le montant de sa retraite en fonction de la durée d'assurance qu'il a validée.

Les partenaires sociaux gestionnaires des retraites complémentaires Arrco et Agirc (voir les documents Retraites complémentaires : l'Arrco et Généralisation de la retraite complémentaire pour les salariés du privé et les retraités) doivent tirer les conséquences de cette mesure. L'accord du 4 février 1983 créée l'association pour la gestion de la structure financière - ASF - chargée notamment d'assurer le surcoût pour les régimes complémentaires des retraites désormais attribuées dans le Régime général à taux plein entre 60 et 65 ans alors qu'à l'Arrco-Agirc l'âge de la retraite à taux plein demeure 65 ans. L'ASF a été remplacée en 2001 par l'AGFF (Association pour la gestion du fonds de financement de l'Arrco-Agirc). Ces accords sont conclus pour une durée limitée et renégociés régulièrement.

Cette mesure d'abaissement de l'âge de la retraite à taux plein a transféré sur les régimes de retraite une partie des “garanties de ressources” à hauteur de 70 % du dernier salaire financées par l'Etat et l'assurance chômage depuis les années 70 (pour les salariés licenciés à partir de 1972 et les démissionnaires à partir de 1977). Elle correspondait à une demande sociale mais s'est également inscrite dans le contexte de l'augmentation du chômage touchant particulièrement les personnes en fin de carrière. Cette réforme a-t-elle accompagné ou a-t-elle accentué la baisse d'activité des “seniors”, qui a été très significative en France ? Sans doute les deux.

Vincent Poubelle et Annie Rosès

Transcription

Présentatrice
Si vous avez 60 ans le 1er avril 83 et si vous le désirez, vous pourrez prendre votre retraite à taux plein au lieu d’attendre 65 ans. La condition reste la même pour les salariés, 37 ans et demi de cotisations. Pour les femmes salariées, situation inchangée à part l’abaissement de 2 ans et demi de la durée d’activité. Le gouvernement a donc décidé de mettre en oeuvre la promesse électorale de François Mitterrand dans le but de libérer 100 à 200000 emplois même si l’addition promet d’être lourde. Mais voyons déjà avec Laurence Graffin ce que cela veut dire dans trois cas précis.
Journaliste
Imaginez Messieurs Dupond, Durand et Dubois qui travaillent dans la même entreprise. Monsieur Dupond a 65 ans, il prend sa retraite, il a cotisé 37 ans et demi. Il reçoit 50% de son salaire des 10 meilleures années dans les limites du plafond de la Sécurité sociale, soit un maximum de 3300 francs. En plus, il reçoit une retraite complémentaire, l’ensemble représente environ 70% de son salaire. Monsieur Durand, lui, a 60 ans, il voudrait bien prendre sa retraite. Mais à moins de faire partie d’une catégorie particulière de salariés, les travailleurs manuels accomplissant des travaux pénibles, par exemple, il n’a droit qu’à la moitié de ce que reçoit Monsieur Dupont, soit un maximum de 1650 francs. Evidemment, il peut demander la garantie de ressources qui est une sorte d’allocation de chômage prolongée jusqu’à l’âge de la retraite. Mais ce système n’est pas destiné à durer. Troisième cas, Monsieur Dubois a 59 ans. Il a envie de prendre sa retraite l’année prochaine, donc à 60 ans. A partir du 1er avril 83, il pourra, s’il a cotisé 37 ans et demi, recevoir la même pension qu’à 65 ans, 50% du salaire des dix meilleures années mais avec un maximum donc de 3300 francs. Mais pour arriver au même niveau que son collègue de 65 ans, il lui faut aussi la même retraite complémentaire. Et cela, ce n’est pas le gouvernement qui le décide, ce sont le patronat et les syndicats.