Election du nouveau président du conseil général des Alpes-Maritimes
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La succession de Charles Ginésy n'a sucité aucun suspense. Ce matin Christian Estrosi a comme prévu été élu président du Conseil Général des Alpes-Maritimes par ses pairs avec 38 voix sur 44.
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18 sept. 2003
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Cette élection à la tête du département confirme l'ascension de celui qui s'impose peu à peu aux diverses factions de la droite parlementaire des Alpes-Maritimes, très divisées depuis la chute de Jacques Médecin, dont Christian Estrosi était l'un des protégés. Lui-même avait contribué à cette situation mais s'étant assagi, ayant pris une certaine étoffe politique, étant plus mesuré dans ses propos publics, comme on peut s'en rendre compte dans son interview, il a réussi à faire l'unité autour de lui. Il est vrai qu'il bénéficie désormais du soutien de celui qui porte les espérances d'une droite déçue par le chiraquisme, autrement dit Nicolas Sarkozy, devenu son nouveau mentor.
En 2003, cela fait vingt ans qu'il est entré dans la vie politique locale. Jacques Médecin l'a appelé au conseil municipal de Nice parce que ses victoires en compétition motocycliste l'ont rendu populaire et qu'il donne une certaine image de Nice qui plaît à l'amateur de grosses cylindrées. En effet, Christian Estrosi est d'abord un pilote de Grand Prix motocycliste, plusieurs fois titré, et c'est comme adjoint aux sports qu'il entre en 1983 dans la municipalité niçoise. Deux ans plus tard, il devient le benjamin du Conseil général et, en 1988, à 32 ans, il est élu député de la 5e circonscription des Alpes-Maritimes, celle de Nice-Montagne, puis responsable de la fédération RPR des Alpes-Maritimes et secrétaire national de ce parti. Mais son parcours n'a pas été sans incidents. Il s'est donc trouvé en première ligne lorsque Jacques Médecin a été contraint d'abandonner ses responsabilités et, sans doute, a-t-il voulu un peu vite combler le vide laissé par le départ du "patron". Il se "grille" partiellement en démissionnant du conseil municipal de Nice, afin de provoquer, en vain, de nouvelles élections municipales, alors que Jacques Médecin, de son exil uruguayen, souffle le chaud et le froid, paraissant lui préférer sa rivale, Martine Daugreilh, à moins qu'il ne semble pencher pour Jean-Marie Le Pen. Dans la période chaotique qui suit, Christian Estrosi paraît préférer le Conseil régional où il est élu en 1992 et où il devient premier vice-président de Jean-Claude Gaudin, que le Conseil général. Il est réélu député en 1993, mais difficilement, ayant abandonné, à la demande de Jean-Claude Gaudin et Jacques Chirac, sa circonscription pour la 2e, où il bat difficilement Jacques Peyrat, alors candidat FN, et où il a dû affronter la concurrence de la soeur de Jacques Médecin. Mais il est invalidé en décembre 1993 et déclaré inéligible pour un an et Alain Juppé le désavoue en plaçant la fédération RPR sous la tutelle de Paris. Christian Estrosi voit ses ambitions sur la mairie de Nice compromises. Jacques Peyrat, passé au RPR, peut s'en emparer en 1995 et la conserver en 2001, (mais l'épouse de Christian Estrosi est adjointe au maire). Il est remis en selle par son nouveau mentor, Nicolas Sarkozy, en 1997 en retrouvant le siège de député dans la 5e circonscription. En 1998, il est le chef de la fronde qui, après les élections régionales de 1998, s'oppose à François Léotard, tête de la liste RPR-UDF sur laquelle il avait été élu, parce que celui-ci refuse tout compromis avec le FN. Il pousse en avant un autre RPR, adjoint au maire de Nice, et se voit accusé par Jean-Pierre Giran, le chef de file du RPR varois, de vouloir "s'associer aux factieux de l'OAS".
En menant campagne sur le terrain du FN, comme la plupart des autres élus de droite dans les Alpes-Maritimes, il entend bien "assécher" le vote FN en même temps que rassurer un électorat conservateur, souvent âgé, comptant nombre de rapatriés d'Afrique du Nord (dont il faut vaincre les réticences vis-à-vis d'un parti qui se réclame du gaullisme), de retraités, de professions indépendantes ou libérales, d'entrepreneurs et de cadres, alors que la gauche reflète plutôt le vote ouvrier et celui des fonctionnaires (les deux opposants interviewés sont des enseignants). Christian Estrosi fait alors partie des adversaires d'Alain Juppé et se distingue par ses prises de position virulentes. Dans un article publié par Le Figaro le 3 août 1998 et intitulé "Pour en finir avec mai 68", il affirme qu'à cause de cette période, "aujourd'hui, le pouvoir n'a plus le pouvoir". Il est, à l'Assemblée nationale, à cette époque, le rapporteur des lois sur la sécurité intérieure, et a signé en 2001 un ouvrage au titre éloquent, Insécurité : sauver la République. C'est alors qu'il abandonne le Conseil régional pour le Conseil général, ayant été élu dans le canton montagnard de Saint-Étienne-de-Tinée (2 245 inscrits) avec plus de 84 % des suffrages. Devenu vice-président du Conseil général, il succède naturellement à Charles Ginésy, élu depuis 43 ans du canton de Guillaumes (3 075 inscrits, où son fils va lui succéder), lorsque celui-ci abandonne la présidence le 27 août 2003. Il s'agit de préparer les cantonales de 2004 et d'affermir, comme il dit dans l'interview, une UMP acquise à la cause de Nicolas Sarkozy. Il ne quittera la présidence du Conseil général qu'en décembre 2008, après avoir assuré sa succession en faisant élire un fidèle, son directeur de cabinet, devenu député en 2007, d'abord, le 8 décembre, dans le petit canton montagnard de Saint-Martin-de-Vésubie, puis dix jours après à la présidence de l'assemblée. Lui-même avait battu Jacques Peyrat aux élections municipales de mars 2008 et il était devenu maire de Nice, et ne pouvait donc plus continuer.
Issu d'une famille originaire d'Italie, autodidacte ("motodidacte" comme diront ses détracteurs et comme il le reprendra lui-même avec fierté), Christian Estrosi est assez représentatif d'un "modèle" de promotion sociale par la politique, assez fréquent dans la région, puisqu'actuellement Jean-Noël Guerini (président PS du Conseil général des Bouches-du-Rhône) ou Hubert Falco (maire de Toulon et secrétaire d'État) en relèvent. La sucess story de Christian Estrosi est assez semblable à celle de ce dernier, puisque, tous deux UMP, tous deux fidèles soutiens du président Sarkozy, tous deux ayant accédé au pouvoir départemental avant de conquérir la principale ville de leur département, tous deux faits ministres. Christian Estrosi a été nommé, en effet, en juin 2005 ministre délégué à l'Aménagement du territoire, puis secrétaire d'État à l'Outre-Mer. Mais il se situe aussi dans l'héritage de son premier mentor, Jacques Médecin, en contrôlant un à un les principaux rouages du pouvoir dans les Alpes-Maritimes et, dans une tradition encore plus longue, en perpétuant un système qui permet de dominer les villes du littoral grâce à l'influence acquise dans les cantons de l'arrière-pays montagnard et peu peuplé.
Bibliographie :
Christian Estrosi, Insécurité : sauver la République, Monaco, Éd. du Rocher, 2001.
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