Chantecler d'Edmond Rostand
Notice
Jean-Claude Dreyfus dans Chantecler d'Edmond Rostand mis en scène par Jérôme Savary à Chaillot en 1994. Extraits du spectacle et interview de Jean-Claude Dreyfus.
Éclairage
On pourrait penser que la mise en scène de Savary est tout à fait exubérante, avec ces acteurs animalisés au jeu roublard, ces effets comiques et visuels qui tirent vers le cabaret, mais la pièce d'Edmond Rostand tient à la fois de la fantaisie et de la farce, tout en pointant un aspect tragique : Chantecler, le coq de basse-cour, pense que son chant fait lever le soleil chaque matin. Il règne en roi absolu sur ses poules jusqu'à l'arrivée d'une faisane... Le sujet de Chantecler, la satire sociale et politique par l'animalisation des personnages, sont audacieux et leur traitement dramaturgique ne l'est pas moins. Rostand propose en effet un texte versifié pour un genre comique, ce qui est bien loin des modèles conventionnels de la « pièce bien faite ».
La pièce devait être originellement jouée par le grand Coquelin (créateur du rôle de Cyrano, voir ce document), mais ce dernier n'eut que le temps de répéter le rôle, il mourut avant la première. C'est Lucien Guitry qui prit la relève et la pièce fut créée en 1910 au Théâtre de la Porte Saint-Martin (on peut voir à quoi ressemblaient les costumes animaliers du début du XXe siècle grâce à des photos du studio Nadar, où l'on voit Romuald Joube, en costume de coq) [1]. Après le succès de Cyrano et de L'Aiglon, et après son élection à l'Académie française, critiques et spectateurs attendent Rostand au tournant. Mais la truculence de Chantecler et le développement de la pièce sous forme de poème lyrique, la difficulté de sa réalisation scénique en regard de l'immensité du projet de l'auteur, vont déconcerter et finalement décevoir le public. Après cet échec cuisant, Rostand en est pour ses frais et cesse d'écrire pour le théâtre.
Depuis, malgré la qualité poétique et la gageure que ce texte peut constituer pour un metteur en scène, peu ont osé s'attaquer à ce morceau du répertoire : Jean-Luc Tardieu en 1986, avec des costumes de Christian Lacroix, à l'Espace 44 de Nantes ; Jean-Paul Lucet en 1986 au Grand théâtre romain de Fourvière (Lyon). Signalons aussi un téléfilm de Jean-Christophe Averty en 1977.
[1] Cf. la médiathèque en ligne (archives photographiques) du Ministère de la culture