Michaël Denard dans L'Oiseau de feu de Béjart
Notice
Michaël Denard, étoile de l'Opéra de Paris, interprète en studio deux solos de L'Oiseau de Feu, ballet que Maurice Béjart a conçut pour lui, et qu'il a créé avec huit solistes de l'Opéra de Paris au Palais des Sports le 31 octobre 1970. Il s'agit de l'apparition de l'Oiseau de feu au milieu des Partisans, et de la mort de l'Oiseau de feu, héros porteur d'espoir.
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Éclairage
Trois ans après lui avoir confié un des rôles principaux de sa Tentation de Saint-Antoine aux côtés de Jean-Louis Barrault, Maurice Béjart crée un pas de deux pour la première danseuse de l'Opéra-Comique Josiane Consoli, avec le partenaire de son choix. Ce sera Michaël Denard, du Ballet de l'Opéra de Paris, troupe alors séparée de celle de l'Opéra Comique.
C'est dans cette salle que les deux artistes remportent un grand succès en février 1970 dans Comme la Princesse Salomé est belle ce soir. Le titre évoque la première phrase chantée par Narraboth dans la Salomé de Richard Strauss.
Frappé par la beauté, l'élégance et le potentiel du jeune Denard, le chorégraphe décide d'en faire la vedette du prochain ballet que l'Opéra de Paris vient de lui commander pour une soirée Stravinski.
De son premier ballet composé à la demande de Diaghilev en 1910 L'Oiseau de feu, qui le rend célèbre du jour au lendemain, Stravinski tire plusieurs suites de concert. C'est la seconde, d'une vingtaine de minutes, pour un orchestre réduit, et en cinq numéros seulement, que Maurice Béjart choisit. Peu intéressé par l'argument original tiré d'un conte de fée russe, il imagine une pièce intemporelle. Dans le programme de l'Opéra il précise :
«Il n'est pas question de remplacer l'argument par un autre ni même de le transformer. Essayons plutôt de dégager l'émotion qui parcourt la succession de numéros de la partition ainsi réduite, en trouvant les deux élément chocs qui frappèrent à la création en 1910 : Stravinsky, musicien russe, Stravinsky musicien révolutionnaire. Que la danse soit donc l'expression abstraite de ces deux éléments, toujours présents dans la musique »... « L'Oiseau de feu est le phénix qui renaît de ses cendres. Le poète comme le révolutionnaire est un oiseau de feu ».
Le ballet est créé par le Ballet de l'Opéra de Paris au Palais des Sports, le Palais Garnier étant fermé pour travaux. Dans la pénombre on aperçoit un groupe de neuf Partisans en costumes bleu-gris Mao, préparant sans doute un acte héroïque, mais cherchant avec angoisse un guide. C'est alors que dans un rayon de lumière éclatante (sur le thème musical de l'entrée de l'Oiseau de Feu), l'un des Partisans, l'Oiseau de feu, débarrassé de sa tenue de combat, s'élance tel un jeune dieu, dans un maillot rouge vif. Il se livre à une danse jubilatoire, celle que Michaël Denard interprète en premier sur ce document. Un solo conçu pour mettre en valeur la technique classique du danseur, son élévation, ses équilibres, sa grâce, tout en symbolisant la vaillance de l'Oiseau porteur d'espoir.
Cet être supérieur transmet son message à chaque Partisan qui part accomplir son devoir. Mais l'Oiseau de Feu doit se sacrifier pour parachever sa mission, et sur la douce mélodie de la Berceuse de Stravinski, l'Oiseau succombe, vaincu. C'est le deuxième solo, d'un caractère plus dramatique et contemporain que l'on peut voir sur ce document.
Non formé à l'Ecole de Danse de l'Opéra de Paris, Michaël Denard a réussit à intégrer le corps de ballet à 21 ans comme surnuméraire. Particulièrement doué, il est promu Premier Danseur quatre ans plus tard en 1969.
«C'est Maurice Béjart qui m'a révélé à moi-même et au grand public avec l'Oiseau de Feu. Ma rencontre avec lui est essentielle et j'en garde un souvenir fantastique » dira le danseur « Béjart vous prend par la main et vous mène au but en sachant exactement ce qu'il peut tirer de vous car il est très psychologue. On peut discuter avec lui et on est prêt à affronter toutes les difficultés car il donne une explication logique de chaque chose ».
De son côté, Brigitte Lefèvre, une des Partisane de la création, et future directrice de la Danse à l'Opéra confie « C'est avec l'Oiseau de Feu que j'ai ressenti si profondément la possibilité d'exprimer certaines de mes pulsions de la vie et que m'est venue le désir de créer moi-même ». Deux ans plus tard en 1972 elle prend son envol pour fonder avec Jacques Garnier, autre Partisan de L'Oiseau de feu le Théâtre du Silence et créer ses propres chorégraphies.