Giselle et Le Sacre du Printemps de Mats Ek au théâtre de la Ville

08 octobre 1984
08m 26s
Réf. 00722

Notice

Résumé :

En 1984, Mats Ek et le Ballet Cullberg présentent au Théâtre de la Ville deux chorégraphies inédites et révolutionnaires : Giselle et Le Sacre du Printemps dans les versions de Mats Ek. Interview du chorégraphe qui révèle que ses dieux sont d'abord deux peintres, René Magritte et le Douanier Rousseau. Ana Laguna et Yvan Auzely dansent un extrait de la première scène de Giselle suivi d'un duo du Sacre du printemps.

Date de diffusion :
08 octobre 1984
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Éclairage

L'amour de Mats Ek pour René Magritte et le Douanier Rousseau explique le double caractère de ses chorégraphies : une vision étrange, teintée de surréalisme et des personnages sincères jusqu'à la naïveté.

Ana Laguna et Yvan Auzely dansent la première scène de Giselle quand la jeune paysanne repousse les avances d'Hilarion. « C'est un vieux ballet, dit Mats Ek, mais j'aime les contes de fée, et son caractère psychologique et social me paraît très moderne. J'ai fait ce nouveau ballet pour montrer la voie que je veux prendre ».

Plus rare est le duo qui ouvre la seconde partie (Le Sacrifice) du Sacre du Printemps. Cinq minutes de danse pure sur un ample Largo de Stravinsky, avec un Samouraï rigide, crâne rasé et tout de noir vêtu (Yvan Auzely) et sa fiancée (Ana Laguna) pure et timide japonaise en kimono blanc à large ceinture rouge. Elle marche à petits pas ou sur les genoux, et tous ses gestes traduisent crainte et soumission. Un extrait précieux car interprété par ses créateurs en 1984, et parce que ce Sacre n'a plus été remonté semble-t-il, ne trouvant probablement pas sa place entre le Sacre de Béjart, celui de Pina Baush et celui de Nijinski reconstitué. Sans compter plus de deux cents autres versions !

« Les oscillations de la musique entre les soucis, le tumulte, le plaisir et la force sont rendus possibles grâce à la précision de Stravinski » explique Mats Ek en 1984. « Cette froide maîtrise d'un contenu bouillant m'a donné l'image d'une famille de samouraïs. La société féodale japonaise, construite sur un modèle rigoureux truffé de lois, de convenions, de modes de pensée, avait engendré une forme de société pleine de rituels. Tous les détails sur les rapport entre les classes, les sexes et les générations étaient réglés ».

Conçu deux ans après sa Giselle, Le Sacre du Printemps de Mats Ek apparait comme une curieuse synthèse entre son style très personnel (bras tendus et jambes écartées du Samouraï, comme dans Giselle) et un japonisme qui ne relève ni du Nô ni du Kabuki, mais d'un esthétisme stylisé non dépourvu d'intérêt. Le langage est riche, fort, teinté d'humour. La Fille, le Fiancé, le Père et la Mère, entourés de six samouraï et six jeune geishas en kimonos orangé confèrent un caractère original mais fidèle à l'esprit et à la musique de Stravinski.

C'est en 1969 que les parisiens découvrent Birgitt Cullberg (auteur du célèbre ballet Mademoiselle Julie d'après Strindberg) au Théâtre des Champs Elysées où elle révèle un chef d'œuvre de son maître Kurt Jooss, La Table Verte. Spectacle qui lui vaut de remporter l'Etoile d'Or de la meilleure compagnie au Concours International de la Ville de Paris, et son fils Niklas Ek, celle du meilleur danseur.

Mariée à l'acteur Anders Ek, célèbre en Suède, Birgitt Cullberg a trois enfants : une fille actrice, Niklas danseur et Mats qui partage sa carrière entre la chorégraphie et la mise en scène de théâtre.

Birgitt Cullberg revient au Théâtre de la Ville en 1962 avec Niklas en vedette, puis en 1981 avec les toutes premières chorégraphies de son jeune fils Mats Ek : Saint Georges et le Dragon (créé en 1976) et La Maison de Bernarda (1978). Cette dernière pièce de soixante minutes d'après Garcia Lorca produit un choc par sa froide violence, d'autant plus que le rôle de l'austère Bernarda est dansé par un homme, Luc Bouy. Mats Ek de son côté danse Saint George avec Ana Laguna et Nacho Duato.

Lors de sa troisième saison au Théâtre de la Ville, Birgitt Cullberg, âgée de 75 ans, revient avec son fils Mats Ek, 39 ans, devenu co-directeur du Ballet Cullberg. C'est au cours de cette saison, en juin 1984 que Mats Ek acquiert une dimension internationale avec sa géniale relecture de Giselle.

René Sirvin

Transcription

Journaliste
Il y a longtemps que le ballet suédois, défraie la chronique de la danse. Le ballet Cullberg depuis une bonne trentaine d’années, lui est à la pointe du progrès, de la découverte et qui se trouve aujourd’hui incarné par Mats Ek qui est maintenant l’héritier de toute une tradition et de toute une famille de danseurs. Mats Ek, Which are your gods ?
Mats Ek
Mes dieux sont deux peintres, Magritte et Rousseau. J’aime la combinaison d’une extrême profondeur et d’une extrême simplicité. Chez les chorégraphes, ma génération admire par-dessus tout Kylian, Pina Bausch, et aussi Béjart.
Journaliste
You have made a new Giselle, why ?
Mats Ek
J’aime Giselle, parce que j’aime les contes de fée.
Journaliste
But you think you plot for it ?
Mats Ek
Je suis intéressé par la combinaison dans ce ballet d’un problème psychologique et d’un problème social. Une combinaison qui me paraît très moderne.
(Musique)
Mats Ek
Le mouvement est pour moi un moyen d’expression, et non un moyen de décoration.
(Musique)
Mats Ek
J'ai transposé le Sacre dans l’univers samouraï, parce que j’ai trouvé dans la musique, un mélange de précision et d’éruption, de contrôle et de sauvagerie.