Pierre Boulez dirige Pelléas et Mélisande au Covent Garden de Londres
Notice
A l'occasion de la première d'une nouvelle production de Pelléas et Mélisande de Debussy au Royal Opera House de Covent Garden, à Londres, le compositeur et chef d'orchestre Pierre Boulez, qui dirige le spectacle, parle de sa conception du chef d'œuvre de Debussy, en insistant sur l'humanité des personnages.
- Europe > France
- Europe > Grande-Bretagne > Angleterre > Londres > Covent Garden
Éclairage
Dès sa création en 1902 à l'Opéra-Comique de Paris, devant un public majoritairement hostile, l'opéra Pelléas et Mélisande de Debussy a donné lieu à de nombreux malentendus. Inspiré d'une pièce de l'écrivain symboliste Maurice Maeterlinck se déroulant dans un Moyen-Age onirique, l'opéra de Debussy délaisse tout brio vocal pour rapprocher les lignes vocales des chanteurs du débit et des inflexions de la voix parlée, l'orchestre accompagnant les voix de manière économe la plupart du temps. On a ainsi pu railler l'absence de « mélodies » d'un opéra tout entier au service du texte et l'apparente facilité du chant qu'il requiert.
De même, la naïveté de certaines formulation de Maeterlinck, à la fois quotidiennes et poétiques, ont donné lieu à de nombreuses interprétations : après plusieurs décennies de spectacles devant des toiles peintes qui reflétaient un Moyen-Âge réaliste à travers des images de châteaux et de forêts, et des costumes inspirés de la peinture médiévale ou pré-raphaélite, vint le temps d'une certaine abstraction poétique qui revêtait le drame d'un manteau pastel et mythique.
A la fin des années 60, lorsque Pierre Boulez aborde pour la première fois l'opéra de Debussy, le goût est en train d'évoluer. Le compositeur et chef d'orchestre français, avec son habituelle précision rhétorique, en parle très bien. Il explique comment Debussy a cherché à briser les conventions de l'opéra afin que l'action avance, sans sacrifier à la violence de ce « théâtre de la cruauté » qui constitue une part non-négligeable du théâtre maeterlinckien. Boulez parle de la nécessité de trouver un équilibre entre réalisme et abstraction poétique. Il souligne aussi l'exigence vocale de la partition. A l'occasion de cette production anglaise, Pierre Boulez enregistrera d'ailleurs l'ouvrage, et il y reviendra en 1992 avec la complicité du metteur en scène Peter Stein, pour une production donnée à Cardiff et à Paris (au Théâtre du Châtelet).