Le groupe Rodina
Infos
Résumé
Durant la Seconde Guerre mondiale, des milliers de prisonniers des pays de l'Est contraints au travail forcé, devaient extraire du minerai de fer de la mine du Syndicat de Tiercelet.
Parmi eux, les trente-sept jeunes femmes du groupe Rodina.
Jean-François Gelezuinas, de l'association historique industrielle du Hussigny, et René Barchi, historien, nous racontent leur histoire.
Date de publication du document :
Février 2022
Date de diffusion :
27 juin 2014
Éclairage
- Contexte historique
- Bibliographie
- Articles utilisant cette vidéo
- Parcours thématiques
Informations et crédits
- Type de média :
- Type du document :
- Collection :
- Source :
- Référence :
- 00081
Catégories
Thèmes
Lieux
Personnalités
Éclairage
Éclairage
- Contexte historique
- Bibliographie
- Articles utilisant cette vidéo
- Parcours thématiques
Contexte historique
ParProfesseur des universités émérite en Sciences de l'information et de la communication, Crem, Université de Lorraine
En russe, rodina signifie patrie. Tel est le nom donné par des Russes, Ukrainiennes ou Biélorusses, transférées comme travailleuses forcées par les Allemands en 1944 en Lorraine non annexée, qui avaient créé un groupe de résistance après leur évasion du camp d’Errouville près de Thil (Meurthe-et-Moselle). En 2014, le 70e anniversaire de la Libération et de cet événement peu connu est commémoré.
Suite au bombardement par les Alliés les 16 et 17 août 1943 de la base de Peenemünde (Allemagne) où étaient mises au point des bombes volantes (armes de représailles, Vergeltungswaffen, V1 et V2), la mine de Tiercelet, proche du réseau ferroviaire allemand en Moselle, abritait des installations souterraines pour fabriquer des missiles V1 et des composants d’avions. Ces ateliers d’assemblage devaient être opérationnels le 1er août 1944. Parmi les commanditaires de cette usine nommée Erz (minerai en allemand), puis Minette GMBH (appellation locale du minerai de fer), la firme Volkswagen. La « main d‘œuvre » provenait aussi des camps d’Auschwitz (Pologne), Neuengamme (Allemagne) et Natzweiler-Struthof (Alsace annexée), dont le camp de Thil était l’un des kommandos.
Les femmes en question étaient donc internées au camp d’Errouville, avec notamment des prisonniers et requis soviétiques. La vie y était très rude : nourriture réduite, travail épuisant et dangereux dans la mine (une cinquantaine d’internées sont mortes en avril 1944, suite à l’effondrement du plafond d’une galerie), discipline féroce. Mais la résistance s’organisait. Le 1er mai 1944, des femmes refusèrent de travailler. Des détenus décidèrent de s’évader après avoir créé un comité clandestin ; et ce, en lien avec le Comité central des prisonniers soviétiques et quelques ouvriers français communistes réquisitionnés. L’objectif ? Rejoindre des FTPF-MOI (Francs-tireurs et partisans français-Main d’œuvre immigrée) opérant dans les forêts avoisinantes. Ce fut le cas dans la nuit du 7au 8 mai 1944. Sur une centaine d’évadés, 27 hommes et 37 femmes (d’une vingtaine d’années en moyenne) iront au bout. Elles constituèrent un détachement – le seul exclusivement féminin en France, commandé par Nadiejda Lissoviets et Rozalia Fridzon – armé par des prises sur l’ennemi. À leur actif, durant quatre mois, des coups de main audacieux. À la Libération, le détachement Rodina hébergé à Verdun participa à un défilé à l’issue duquel chaque femme reçut une carte d’Engagé volontaire des Forces françaises de l’Intérieur (FFI). De 1945 à 1946, elles ont été rapatriées en URSS. Il faut attendre la déstalinisation (avoir combattu dans des forces étrangères était suspect) pour que leur action soit reconnue. Par exemple, lors du voyage en France de Nikita Khrouchtchev en 1960, Nadiejda Lissoviets est interviewée à la télévision ; elle rencontre le général de Gaulle à Moscou en 1966. Puis le silence s’installe de nouveau. La Perestroïka (reconstruction en russe, désigne les réformes engagées en URSS par le président Mikhaïl Gorbatchev de 1985 à 1991) change la donne et, en 1993, est créée l’association Combattants volontaires regroupant des anciens membres soviétiques de la Résistance française.
Qu’en est-il de la mémoire de ces lieux et de ces résistantes ? Le camp est évacué vers d’autres début septembre 1944 (les déportés juifs et ceux venus de Peenemünde sont exécutés sur place). Quelques jours après, il est visité par la mission américaine Alsos qui enquêtait sur les recherches nucléaires allemandes. Laissé à l’abandon, le camp est vite démantelé. Cependant, il est évoqué au procès de Nuremberg (1945/1946). En 1946, des habitants de Thil entendent en préserver le souvenir. À l’issue d’une souscription, une crypte est inaugurée le 17 novembre. Le 15 décembre 1949, il est reconnu camp de concentration annexe de Natzweiler-Struthof. Et, le 16 août 1984, il est déclaré Nécropole nationale. Depuis 1996, existe une Association pour la mémoire et la reconnaissance du camp de concentration de Thil-Longwy qui agit de concert avec les collectivités territoriales. Un mémorial (Rodina y est présent) a été inauguré le 6 septembre 2015 à la mine, avec l’appui de l’Association historique industrielle de Hussigny-Godbrange et de l’Association républicaine des anciens combattants.
En ce qui concerne spécifiquement Rodina, l’initiative revient à René Barchi. Né à Thil, fils de résistants FTP-MOI, ingénieur et homme d’affaires retraité, il a travaillé à Moscou pour des sociétés françaises. Passionné d’histoire, il y a découvert un livre rare : Nos Gamines près de Verdun de Roman Yerokhine (années 1960). Il l’a traduit, a cherché des témoins et a fait connaître ce groupe en France, en Russie et Biélorussie, par des conférences, des publications et des documents audiovisuels. En novembre 2013, ONT– chaîne biélorusse – a réalisé à Thil un reportage diffusé en mai 2014 lors du 70e anniversaire de l’évasion. La dernière survivante, Alexandra Paramonova, a été nommée citoyenne d’honneur de Thil et son certificat lui a été remis à Novotcherkassk en juin 2014 par Anne Silvestri, maire (Front de gauche). En 2018, un film documentaire français est consacré à Rodina ; un autre, dont le groupe est la toile de fond, est produit en Russie en 2020 avec une coloration très nationaliste. Rodina est donc pleinement entré dans l’histoire et la mémoire, ou plutôt les mémoires internationales avec ce que cela comporte de facteurs politiques.
Bibliographie
- René Barchi, « Rodina : 37 déportées soviétiques résistantes en Lorraine », Le Courrier du Mémorial. Bulletin de liaison des Amis du Mémorial d’Alsace-Moselle, n° 35, 2020, p. 36-45.
- Youri Vinoguine, Alexandre Ignatov (dir.), Quand l’espoir venait de l’Est. Les maquisards russes en France se souviennent, Paris, Delga, coll. « Histoire », 2020.
- Roman Yerokhine, Nos gamines près de Verdun. Récit documentaire, Minsk, Yu. M. Sapojkov, 2006 (en russe).
- Mikhaïl Matrossov [Réalisateur], 2020, La Patrie [Film].
- Jean-Louis Sonzogni [Réalisateur], 2018, Rodina [Documentaire], Noliprod.
Transcription
Sur les mêmes thèmes
Date de la vidéo: 30 août 1992
Durée de la vidéo: 03M 25S
Commémoration de la Grève de 1942 à Dudelange
Date de la vidéo: 08 mai 1997
Durée de la vidéo: 01M 52S
Commémoration du 52e anniversaire de l'Armistice à Luxembourg
Date de la vidéo: 05 nov. 2003
Durée de la vidéo: 03M 16S
Aurélie Filippetti pour son livre Les derniers jours de la classe ouvrière
Date de la vidéo: 18 juin 2010
Durée de la vidéo: 02M 13S
Rénovation du blockhaus de Bois-du-Four sur la ligne Maginot
Date de la vidéo: 30 août 1992
Durée de la vidéo: 03M 25S
Commémoration de la Grève de 1942 à Dudelange
Date de la vidéo: 08 mai 1997
Durée de la vidéo: 01M 52S
Commémoration du 52e anniversaire de l'Armistice à Luxembourg
Sur les mêmes lieux
Date de la vidéo: 05 juin 2008
Durée de la vidéo: 02M 10S