Inauguration du musée en plein air de Sabres
Notice
Réalisé dans le cadre de l'aménagement de la vallée de la Leyre, pour la conservation et la valorisation de l'habitat traditionnel et du paysage landais d'autrefois, le musée de plein air de Sabres, futur écomusée de Marquèze, est inauguré le 30 septembre 1969 en présence du préfet de la région Aquitaine, Gabriel Delaunay.
Éclairage
En 1969, au cœur des Trente Glorieuses , la France est plongée dans la modernité industrielle et urbaine ; elle paraît se détourner de la ruralité. Les images et le message transmis lors de l'inauguration du musée de plein air de Marquèze, au cœur du tout jeune Parc naturel régional des Landes de Gascogne, prouvent le contraire.
En ce lieu isolé, aux confins des communes de Sabres et de Labouheyre, dans les Landes, ce "quartier" [1] est appelé à devenir le premier musée de l'environnement, un prototype du genre.
Sous l'égide de la DATAR [2] se met en place, dès 1966, une politique de redynamisation économique sociale et culturelle de vastes ensembles territoriaux en déshérence ; dans ce contexte s'ébauche ce programme ambitieux porté par Georges Henri Rivière [3] grandement influencé par le concept muséologique nordique de l'open air museum. Sous son impulsion, des projets s'esquissent. On abandonne l'idée de la "collection" de maisons landaises égrenées le long de la RN10 et tous les efforts se concentrent autour de cet airial [4] moribond, traversé par une voie ferrée, découvert récemment par Jean-Claude Ollagnier [5] : un écrin magnifique, un "endroit modèle" selon les termes employés par le préfet Delaunay le jour de l'inauguration.
Mais la conception des élus n'est pas celle qui prévaut dans l'esprit de Georges Henri Rivière qui pense déjà à la vocation profonde de cette entreprise originale. Car Marquèze n'est pas une ferme ni un lieu où l'on se contente de considérer ce qu'était une civilisation, dans le respect du passé. C'est, dès les origines - même si le mot n'apparaît pas encore - un "écomusée", une chose qu'un pouvoir et une population conçoivent, fabriquent et exploitent ensemble [6].
Musée de l'homme et de la nature, Marquèze [7] se veut aussi un lieu d'expériences, un laboratoire où se pérennisent les traditions, préservant et mettant en valeur le patrimoine naturel et culturel des populations du territoire pour lesquelles l'écomusée constitue un miroir.
L'homme et son espace de vie est donc au cœur de ce concept. Aussi, dès 1971, avec la collaboration de l'INRA, une première exposition temporaire sur l'apiculture connaît un grand succès, démontrant l'intérêt des locaux prêts à se réapproprier des savoir-faire. Suit l'implantation d'un verger conservatoire alors que l'airial s'anime grâce à la constitution d'un tinel [8]. "Les travaux et les jours" au temps de la civilisation agro-pastorale renvoient à un passé dans un esprit didactique qui préside toujours.
À l'heure de l'éco-responsabilité, Marquèze est un modèle, innovant dès ses origines. C'est ce qui en fait encore aujourd'hui sa réputation et sa force.
Notes :
[1] Ce terme correspond, dans les Landes, au hameau.
[2] Délégation à l'Aménagement du Territoire et à l'Action Régionale.
[3] Georges-Henri Rivière (1897-1985) est le fondateur du Musée national des Arts et Traditions populaires de Paris. Il joue un rôle important dans l'évolution de la muséographie moderne et dans le développement des musées d'ethnologie à l'échelle mondiale.
[4] Forme francisée du gascon airiau : "pelouse ombragée de chênes qui entoure toute habitation landaise située hors des bourgs".
[5] Jean-Claude Ollagnier est directeur du Parc naturel régional des Landes de Gascogne de 1968 à 1986.
[6] Définition donnée par Georges-Henri Rivière émanant de réflexions relevées au cours des colloques tenus au Creusot, de novembre 1975 à janvier 1976, in "CRACAP informations", n° 2/3, 1976.
[7] Du nom de baptême féminin gascon Marquesa, porté jusqu'à la fin du XVIIIe siècle.
[8] Forme francisée du gascon tinèu : "ménage, ferme avec tout ce qu'elle comporte, famille, domestiques et bétail".