Le Refuge de l'Arche

Le chasseur qui a envoyé du plomb dans l’aile d’un cormoran en mai 68 au dessus de la Mayenne ne se doutait pas de la portée de son coup de fusil. En voulant nuire à un oiseau, il venait de sceller les fondations d’un des emblèmes français de la protection animale. Le Refuge de l’Arche, dans l’agglomération de Château-Gontier, dans la Mayenne, a été créé par Christian Huchedé, alors agent municipal, employé au service des sports. Avec cette initiative un peu folle, le fondateur de ce site unique en Europe, officiellement lancé en 1974 après cinq années expérimentales, voulait racheter la bêtise humaine. Vaste chantier. 47 ans plus tard, le refuge animalier, qui n’est pas un zoo, est passé d’une superficie d’un hectare à 22 désormais. La propriété foncière du site reste à la communauté de communes du Pays de Château-Gontier mais le Refuge de l’Arche est géré, depuis son origine, de façon totalement indépendante par une association : le Cepan (Club d’Etudes et de la Protection des Animaux et de la Nature). Reconnue d’utilité publique, elle permet aux passionnés de soutenir le Refuge en bénéficiant de déductions fiscales. En 2014, pour les 40 ans du Refuge, un livre préfacé par la comédienne Mylène Demongeot, présidente du comité d’honneur (qui regroupe de nombreuses personnalités et artistes soutenant le Refuge) a été édité. Il retrace les principales histoires d’animaux qui sont passés par ici en quatre décennies. Le Refuge de l’Arche ou l’empreinte du destin évoque aussi le chantier d’insertion au fil d’un chapitre intitulé : « Les cabossés de la vie ». Ce chantier vise à aider des femmes et des hommes à retrouver confiance en eux et dans l’univers du travail, au travers de leurs missions près des animaux. 

Autre grande originalité du Refuge de l’Arche : son centre de sauvegarde et de soins. Inauguré le samedi 16 avril 2011 par Valentine et Jacques Perrin, le Centre de sauvegarde de la faune sauvage locale accueille toute l’année des animaux blessés. Il a pour objectifs de les soigner et de les réinsérer dans leur milieu naturel. Il accueille principalement des oiseaux, mais aussi des mammifères. Son champ d’actions s’étend sur 3 départements : la Mayenne (53), la Sarthe (72), le Maine et Loire (49). Le Centre de sauvegarde est composé d’une zone pour l’accueil du public (uniquement réservée aux personnes dépositaires d’un animal blessé) et d’une autre pour les soins, constituée de plusieurs pièces : une salle de soins centralisée, une salle de chirurgie, un espace de stockage et de préparation des repas, une nurserie, une salle d’hospitalisation, une salle de convalescence et une salle de quarantaine.

En juillet 2008, lorsque les journalistes Pierre-Erik Cally et Rémi Guiné posent leur caméra et leurs questions dans les allées du Refuge, ce centre de soins n’existe pas encore mais la dynamique autour de ce projet structurant est lancée depuis bien longtemps par Christian Huchedé, par sa famille, par les salariés et les bénévoles. Jamais, ils n’auront cessé, tous ensemble, de faire grandir et évoluer le Refuge de l’Arche. Lors du reportage, monté par Céline Landreau, qui s’inscrit dans la série Cap à l’Ouest, diffusé le mercredi 23 juillet, Christian Huchedé pose de façon complice près du lion Baringo, véritable « gueule » emblématique des lieux. Baringo, qui vivait au Refuge de l’Arche depuis 2004 s’est éteint le dimanche 6 juin 2021 après avoir vécu ici durant 17 belles années. Un nouveau lion, Safran, est arrivé au Refuge le lundi 12 juillet dernier. 

Lors du tournage, le Refuge était déjà le premier site le plus visité de la Mayenne avec 100 000 visiteurs par an. Les crises sanitaires à répétition ont malheureusement atténué ces chiffres de fréquentation mais le Refuge reste le lieu le plus fréquenté du département avec une moyenne de 80 à 90 000 personnes par an. 

Le Refuge attire aussi des visages très connus comme le skippeur professionnel breton, Maxime Sorel qui était venu visiter les lieux en mars 2020. Le sportif a découvert pour la première fois le site et ses nombreux animaux. Fasciné par cette visite, Maxime Sorel devrait prochainement renouveler l’expérience et s’investir à son tour en intégrant le comité d’honneur. Déjà, en 1990, Michel Drucker et son épouse Dany Saval étaient devenus le parrain et la marraine du Refuge. Ils s’étaient déplacés à Château-Gontier drainant une foule considérable dans les allées du sanctuaire. 

Fort de 1300 pensionnaires issus de près de 150 espèces différentes, le Refuge de l’Arche a beau être niché en plein cœur de Château-Gontier sur Mayenne, le dépaysement y est total. Ici vous croiserez des lions, des tigres, des ours, des autruches, des loups mais aussi une cohorte d’oiseaux aux couleurs incroyables. Ce cadre verdoyant a été façonné à la force du temps par près de 2000 jeunes bénévoles, alors âgés de 10 à 18 ans, encadrés par des adultes, puis suppléés par des professionnels quand les normes devinrent implacables. Ici, vous ne verrez pas de dressage, de spectacles ou de numéros de cirque, mais vous pourrez observer les animaux dans un calme retrouvé. Après une vie souvent perturbée au contact de l’homme, ils coulent ici des jours heureux. Réputé en France et à l’étranger (800 reportages et émissions de télévision), le Refuge accueille aussi les animaux de la faune locale, trouvés blessés ou malades, et qui, après avoir été soignés, sont relâchés dans leur milieu naturel. 

Arpenter, gravir, niveler, escalader, serpenter : telles auront été les défis permanents de la famille Huchedé et de ses amis pour façonner la terre jusqu’à en obtenir la sculpture palpable d’un rêve. Lions ou oiseaux, reptiles ou singes, chouettes ou hiboux… échappés des griffes de l’humain, retrouvent dans ce Refuge leur dignité volée. 

• Jean-Marie Mulon, Le Refuge de l’Arche ou l’empreinte du destin, Collection ça restera entre nous, 2013
• Collection personnelle famille Huchedé 
• Site refuge-arche.org