La formation ménagère et familiale des jeunes filles : le centre ménager de Masny
Notice
Christiane Rabiega se rend au centre ménager ouvert par les HBNPC à Masny qui forme les futures femmes de mineurs. La directrice, Mlle Gosset, présente les activités du Centre : cours pratiques de cuisine, de repassage, d'entretien, de puériculture. Des cours théoriques sont aussi prodigués : français, calcul, technique.
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Éclairage
L'activité des femmes autant que celle des hommes est encadrée par l'organisation des Houillères nationales du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais (HBNPC). Les écoles ménagères qu'elles ont crées sont l'une des particularités du monde de la mine et symptomatique de la place qu'il accorde à l'enseignement et aux femmes.
Les cités minières dotées d'écoles privées souvent confessionnelles n'ont guère valorisé l'éducation supérieure. Longtemps elles n'ont pas possédé de collège, favorisant plutôt une reproduction sociale à l'identique : mineur de père en fils. Les études des filles sont encore moins encouragées, et rares sont celles qui dépassent le certificat d'études. Symboles du foyer, filles de mineurs et futures femmes de mineurs, elles sont les garantes du repos et du bien être du mineur, gages de sa sécurité et de sa forme physique. Les Houillères sont conscientes de l'importance que revêtent l'alimentation, l'hygiène, la santé des enfants dans ce monde qui fonctionne sur une telle forme de reproduction sociale. Il n'est donc pas question ici de leur offrir une formation offrant des débouchés professionnels. On les préparent à des tâches ménagères classiques spécialement adaptées aux mode de vie d'une famille de mineur : savoir préparer des repas équilibrés pour l'ouvrier, apprendre les soins à donner à un bébé, apprendre à repasser les chemises, à confectionner des vêtements, mais aussi à gérer le budget familial, à connaître les droits du mineur et de la famille, à connaître le système de santé... autant d'activités présentées comme des activités professionnelles réclamant un savoir-faire.
A l'origine créées dans les années 1920 à l'époque des Compagnies minières et constituées sur le modèle des ouvroirs tenus par des religieuses ou des dames d'œuvre, les 22 centres d'enseignement ménager et familial des Houillères deviennent dans les années soixante "Écoles techniques de jeunes filles des HBNPC". Les jeunes filles de mineurs entre 14 et 18 ans, y suivent une scolarité de trois ans. Ces écoles seront intégrées, en 1972, aux collèges publics.
Le cadre lumineux et moderne de ces écoles offre une sorte de sas et de parenthèse agréable aux jeunes filles avant qu'elles ne quittent leur enfance dans une famille nombreuse où elles effectuaient déjà souvent des tâches domestiques pour leur vie de femmes et mères au foyer dans le même coron parfois.
Ce qui caractérise surtout le mode de vie des femmes de mineurs n'est pas ici présenté et enseigné. La journée de la femme de mineur diffère de celles des autres femmes d'ouvriers car elles occupent selon la formule heureuse de l'ethnologue Dominique Le Tirant , des "postes décalés", se levant très tôt pour préparer le départ du mineur et parfois celui des filles qui travaillent dans les entreprises textiles de l'agglomération roubaisienne.