Edmond Hervé en visite dans le Bassin minier
Notice
Au terme d'une journée de travail dans le Bassin minier, Edmond Hervé, ministre chargé des problèmes énergétiques a expliqué qu'il fallait arrêter le déclin de l'activité charbonnière puis relancer l'activité. Sur la question des réserves de charbon, Edmond Hervé répond que des chiffres très différents sont présentés, il propose donc que syndicats, élus, représentants du gouvernement se mettent autour d'une même table et analysent les estimations. Il donne ensuite sa position quant au surcoût à la thermie. Le matin, le ministre est descendu à la fosse 3 de Méricourt à la taille Edmond. Puis il a rencontré entre autres les organisations syndicales : réactions de Jean Pruvost pour la CFDT sur la relance et de Claude Bouin pour la CGT sur le changement en cours.
Éclairage
L'arrivée au pouvoir de François Mitterrand en mai 1981 s'est traduite par de multiples réformes dans le domaine des mœurs (abolition de la peine de mort, remboursement de l'interruption volontaire de grossesse par la sécurité sociale, dépénalisation de l'homosexualité), des conditions de travail (39h, cinquième semaine de congés payés, lois Auroux) et des structures économiques (nationalisations des principales banques et de nombreuses entreprises industrielles). Devant l'immensité de la tâche, le gouvernement dirigé par Pierre Mauroy a mis en œuvre ces mesures progressivement entre 1981 et 1982.
Le dossier de l'exploitation charbonnière commence a être traité à la fin de 1981 par le gouvernement. Edmond Hervé est le ministre délégué à l'énergie auprès du ministre de l'industrie, Pierre Dreyfus. Il est chargé de porter la bonne parole : celle d'une relance de l'activité charbonnière, en rupture avec la politique de déclin de l'extraction inaugurée par le plan Jeanneney de 1960, et constamment réaffirmée depuis. Il annonce l'affectation de 10 millions de francs à cette politique et l'embauche de 1 000 personnes, soit un programme encore modeste. En effet, les effectifs des Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais sont passés d'un maximum après-guerre de 220 000 en 1947 à 40 000 en 1974.
Pour justifier ce changement de politique, Edmond Hervé répond aux questions des journalistes dans le cadre de l'école des Mines de Douai. Deux questions lui sont posées, celle des réserves de charbon et celle du coût d'exploitation. Sur la première, il adopte l'attitude traditionnelle des opposants à la régression charbonnière (avancée notamment par Marcel Barrois en 1969), en demandant une table-ronde pour tirer au clair cette question. Les services des mines n'ont toutefois pas attendu cette exigence rhétorique pour établir les limites géologiques du gisement du Nord-Pas-de-Calais, constitué de couches minces et faillées. Il est moins facile à exploiter que celui de la Ruhr ou même de la Lorraine, où le rendement est plus de deux fois supérieur (4 à 5 tonnes par poste et par jour contre moins de 2 dans le Nord). C'est d'ailleurs à cette époque qu'est décidé de relancer les investissements techniques dans ce bassin de l'Est, où une productivité supérieure à 6 tonnes par poste et par jour sera atteinte dans les années 1990. La seconde question, qui résulte naturellement de ces handicaps géologiques, est celle du coût de revient. Elle est éludée par l'impératif de l'emploi, réaffirmé par le ministre. Effectivement, le taux de chômage, qui était resté longtemps inférieur à 3% jusqu'en 1974, monte régulièrement depuis la crise pétrolière pour atteindre 7% en 1981 et 8% en 1982. Naturellement les deux syndicalistes interrogés après les déclarations du ministre insistent sur ce problème de l'emploi et soulignent les insuffisances des engagements financiers gouvernementaux, même s'ils considèrent que la dynamique est positive. Les travailleurs des mines profitent d'ailleurs des réformes sociales, avec une réduction du temps de travail et une augmentation des congés payés. Le réformisme gouvernemental s'accentue en 1982 avec la nomination d'un communiste, Georges Valbon, à la tête des Charbonnages de France au mois de février de cette même année, et la relance de l'exploitation dans quelques puits. Le déclin charbonnier est ainsi repoussé.