Du charbon à la matière plastique

14 février 1956
01m 11s
Réf. 00345

Notice

Résumé :

De nouvelles matières premières sont nées des dérivés du charbon, dont le plastique qui sert à la fabrication du fil de nylon mais également de plus en plus de matériaux de construction pour la maison.

Type de média :
Date de diffusion :
14 février 1956

Éclairage

Ce document diffusé en 1956 est particulièrement optimiste à l'égard de l'exploitation du charbon et de ses débouchés commerciaux.

Il évoque un double record : le record de la production pour la France : 58 millions de tonnes en 1955 (en fait le record historique s'établira en 1958 avec près de 59 millions de tonnes, la production amorcera ensuite sa décroissance), et le record de la productivité en Europe. La question de la productivité est importante et ses progrès ont contribué à la confiance des mineurs dans l'avenir. Ainsi par exemple, dès 1952 le bassin de Provence est lauréat de la productivité nationale. Il récidive en 1963 et 1971. En 1974, il est même le site à la productivité la plus élevée à l'échelon européen. Les mines françaises ont réalisé des prouesses en terme de productivité. Mais la productivité n'est que le ratio entre la quantité de charbon extraite et le nombre de mineurs. Cet indicateur ne dit rien sur le prix de revient de la tonne.

L'optimisme du commentaire porte aussi sur les débouchés commerciaux du charbon. Il souligne la place du charbon dans la production d'électricité d'origine thermique, mais surtout, il aborde avec conviction la perspective de nouveaux débouchés pour la production des mines. Il est vrai qu'avec ce matériau d'origine minérale la chimie industrielle est en mesure de fabriquer une palette très large de produits. C'est dans les années 1920 que se développe en France la carbochimie avec le complexe de Mazingarbe créé par la Compagnie de Béthune qui produit dès 1923 de l'ammoniac. Les Compagnies ouvrent neuf autres usines dans le Bassin minier et créent une société, Huile Goudrons et Dérivés (HGD), dédiée au traitement des dérivés chimiques de la houille et qui va devenir un des principaux acteurs de l'industrie chimique. A la nationalisation, Charbonnages de France (CdF) créent deux pôles chimiques : Mazingarbe et Saint-Avold en Moselle et HGD devient une filiale des Houillères du Bassin du Nord-Pas-de-Calais.

Des dérivés sont fabriqués à partir du benzène extrait du charbon. Sont cités ici le nylon et les PVC (polychlorures de vinyle) qui sont les molécules de base pour un très grand nombre de matières plastiques.

Le nylon a été inventé en 1935 par un ingénieur de la firme américaine Du Pont de Nemours. Chacun a en mémoire le grand engouement dans la France d'après-guerre pour cette nouvelle fibre textile, souple et résistante, dont les bas féminins ont été l'un des produits phares.

Quant aux matières plastiques, qui peuvent se décliner en une infinité de produits et d'usages, elles constituent en effet un débouché très large. Ici, sont cités des équipements sanitaires et mobiliers, mais bien d'autres pourraient être évoqués, y compris des pièces pour l'industrie mécanique.

Pour les commanditaires du document, l'enjeu est important. Il s'agit en quelque sorte d'accrocher le charbon au wagon de la société de consommation de masse. Cette nouvelle société, née aux États-Unis, prend forme en Europe occidentale au début des années 1950 et le bas de nylon est de ce point de vue très emblématique.

Plus encore nous dit le document, à propos d'images de baignoires et d'escaliers intérieurs en PVC, le document interroge : "Le charbon résoudra peut-être la crise du logement". L'insuffisance du nombre de logements accessibles aux moins riches, la "crise du logement", est en effet un des grands fléaux de la France de l'après-guerre. Il est vrai aussi que la priorité donnée à l'investissement industriel dans le contexte de la modernisation a amplifié le manque de logements. C'est d'ailleurs ce qui a suscité le fameux "appel de l'Abbé Pierre", le 1er février 1954. L'Abbé, ancien député chrétien démocrate (MRP), a suscité un immense élan de solidarité.

Ainsi, des produits dérivés du charbon sont placés au cœur de la modernité de la société française (le nylon et la consommation de masse) et du débat sociétal en cours (la crise du logement), tant il est vrai qu'on peut faire beaucoup de choses avec du charbon. Mais c'est sans doute sans compter avec la compétitivité des prix de revient. On peut aussi produire du nylon et des PVC à partir du pétrole et cette autre ressource revient nettement moins chère que l'utilisation du charbon. Charbonnages de France a compris à la fin des années 1950, avec le déclin charbonnier et la concurrence du pétrole, qu'il fallait diversifier ses activités avec la pétrochimie, c'est ainsi qu'est créé en 1968, CdF-Chimie regroupant l'ensemble de ses activités et filiales de ce secteur.

Philippe Mioche

Transcription

(Musique)
Journaliste
Avec une production record de 58 millions de tonnes de charbon en 1955, les mines françaises détiennent aussi le record européen de la productivité. A ces hauts rendements sont liés les progrès réalisés dans les différentes utilisations du charbon. La fourniture d’énergie électrique par les centrales thermiques répond aux besoins sans cesse accrus de l’industrie française. Parallèlement, sont nées de nouvelles matières premières dérivées du charbon.
(Musique)
Journaliste
Produit de la distillation de la houille, le benzène par exemple, traité en autoclave, se transforme en cristaux transparents puis en délicat fil de nylon. Ce fil si fin, si léger, c’est du charbon. Et pourquoi ne pas construire des maisons ? Ce bloc sanitaire fait partie d’un ensemble d’éléments en matière plastique qui constitueront la plus moderne des habitations dont on achève le prototype. Constructions en série, rapidité d’assemblage, confort exceptionnel en sont les principales caractéristiques. Le charbon, pourquoi pas, résoudra peut-être la crise du logement.