Les nouvelles implantations industrielles réalisées sur des anciens carreaux de mines

21 avril 1968
09m 02s
Réf. 00354

Notice

Résumé :

Enquête sur les nouvelles implantations industrielles réalisées dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais. Les puits qui ont fermé ont laissé des terrains et des bâtiments en friches. Sur ces sites, s'installent de nouvelles activités comme des menuiseries industrielles, des tissages, des ateliers de confection. Interview d'un dirigeant de la SIMA à Avion société spécialisée en tuyauterie industrielle.

Type de média :
Date de diffusion :
21 avril 1968
Source :

Éclairage

Ce document diffusé en 1968 traite de la reconversion des sites miniers après leur fermeture. Il s'ouvre sur des images de bâtiments délabrés, "tels deviennent les lieux d'où le travail se retire". Le document se voudrait sinistre mais on remarquera la beauté métallique des chevalements qui semblent partir à la conquête du ciel.

Cette entrée en matière permet de préparer le véritable sujet : celui des reconversions industrielles des sites miniers fermés. Ici sont cités Hénin-Liétard (fermé en 1968 – 1973) et Avion (groupe de Liévin, fermé en 1971 – 1974), deux sites des Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais (HBNPC). En effet, en dépit des efforts du monde de la mine, la récession charbonnière et la programmation des cessations d'activités sont entamées après 1958 et les fermetures de mines se succèdent.

Ce processus historique a fait l'objet d'anticipations par les Charbonnages de France (CdF), entreprise publique, qui ne voulait pas laisser à l'abandon ces espaces industriels riches d'hommes et d'histoire. Les Charbonnages de France ont créé une société pour encourager (et subventionner sous diverses formes) l'installation de nouvelles industries sur les anciens carreaux miniers. C'est la SOFIREM (Société Financière pour favoriser l'Industrialisation des Régions Minières) créée en 1966. Les nouvelles implantations sont aussi accompagnées par les collectivités locales. Dans le document la ville d'Hénin-Liétard (aujourd'hui Henin-Beaumont) est citée pour avoir facilité une implantation. Outre les autorisations administratives, les formes d'aide des collectivités peuvent porter notamment sur les réseaux (voirie, assainissement, etc.).

Les Charbonnages disposent d'atouts importants afin de solliciter de nouvelles activités, le document le confirme. Ces vastes espaces sont bien desservis. Il évoque aussi la disponibilité de la main d'œuvre et en effet les stratèges de la reconversion imaginaient que d'anciens mineurs pourraient travailler dans ces nouvelles activités. Mais il semble que le passage direct de la mine aux nouvelles entreprises ait été souvent plus difficile que prévu. Quoiqu'il en soit, on voit ici l'implantation d'une entreprise de tuyauterie industrielle et de chaudronnerie, la Sima à Avion et Lanciot, fabrique de pyjamas et de chemises. Certaines entreprises nouvellement installées n'ont pas eu une durée de vie très longue. La reconversion industrielle des sites miniers est un processus plus long que ne le suggère ce document.

Philippe Mioche

Transcription

(Musique)
Journaliste
Et bien non, il ne s’agit pas d’une séquence destinée à la sauvegarde des chefs-d’œuvre en péril. Bâtisses délabrées, carcasses éventrées, décors désaffectés,
(Musique)
Journaliste
Tels deviennent les lieux d’où le travail se retire.
(Musique)
Journaliste
Pourtant, tout est encore possible ici. Toutes les conditions demeurent pour qu’une activité reprenne. Implantations judicieuses, ressources proches en personnel et en énergie, communication facile, extensions d’entreprises absolument sans problème.
(Musique)
Journaliste
Et en effet, la vie reprend déjà dans des centrales, dans des fosses ou des bâtiments d’exploitation abandonnés par la mine.
(Musique)
Journaliste
Des entreprises diverses et parfois même assez inattendues s’y installent et tentent l’aventure. Ce sont des menuiseries industrielles, des tissages, ateliers de confections, transformations des matières plastiques, traitements des fibres synthétiques, qui remplacent peu à peu une activité jusqu’alors uniformément accès sur la production charbonnière.
(Musique)
Journaliste
Mais que pensent les pionniers de ce renouveau industriel ? Et bien, c’est la question que nous posons à l’un des dirigeants de la SIMA à Avion.
Intervenant 1
Notre société, spécialisée en construction de tuyauteries industrielles et de chaudronneries, avait besoin pour son extension de trouver un terrain pour édifier de nouvelles installations. D’autre part, nous étions intéressés par cette région qui offre des ressources extraordinaires au point de vue main d’œuvre. Nous nous sommes donc rapprochés des Houillères nationales et avons trouvé auprès de leurs services une compréhension et une collaboration qui nous ont permis en un temps record de construire ces installations que vous pouvez voir.
Journaliste
Monsieur [Thierry], vous avez procédé à l’installation d’une nouvelle entreprise sur un ancien carreau de mine d’Hénin-Liétard. De quelle entreprise s’agit-il ?
Intervenant 2
Il s’agit des établissements Lancio, et nous fabriquons dans cette usine des pyjamas et des chemises. Nous sommes surtout spécialisés dans des articles synthétiques. Nous employons à l’heure actuelle dans nos ateliers une centaine de personnes.
Journaliste
Dans quelle condition s’est passée votre installation ici ?
Intervenant 2
Notre installation a été très favorisée par les Houillères et par la municipalité d’Hénin-Liétard. La municipalité d’Hénin-Liétard s’est mise à notre disposition pour tous les problèmes qui pouvaient nous gêner dans la progression de l’installation de l’atelier. Pour ce qui est des Houillères, les Houillères nous ont facilité l’entreprise d’une façon vraiment très, très importante. Nous avons visité ces bâtiments pour la première fois le 15 mai. Nous n’étions pas encore disposés à les acheter à l’époque mais nous voulions voir les possibilités qu’il y avait dans cette région ; et après la visite de plusieurs bâtiments, nous sommes arrivés à nouveau, revenus sur celui-ci et avons demandé de l’avoir très rapidement. Un mois après, les premiers accords étaient signés et le 15 juillet, nous commencions les travaux. Nous avons débuté ici le 20 septembre, après avoir transformé tout l’atelier.
Journaliste
Y a-t-il des perspectives nouvelles à Hénin-Liétard, Monsieur Darchicourt, député maire nous répond.
Fernand Darchicourt
Oui, nous en avons une pour l’immédiat. L’affaire Quillery, qui ouvrira ses portes en principe début 69, qui créera 300 emplois nouveaux dont 60% pour l’élément masculin. Affaire intéressante parce que liée à l’automobile, ce qui nous donne une certaine garantie pour l’avenir. Affaire Quillery d’ailleurs, que nous avons pu mener à bien grâce à certains concours extérieurs. En particulier, la préfecture, la sous-préfecture, la Sofirem, dont c’est la première intervention en matière d’industrialisation de la région, la direction des Houillères et son président Monsieur Morandat, ainsi que Monsieur Billecocq, Commissaire régional à l’industrialisation. Affaire Quillery intéressante et que nous voudrions, pour notre part, considérer comme un point de départ pour la réindustrialisation de notre région. Mais elle ne règle pas pour autant l’ensemble du problème de l’emploi tel qu’il se pose à nous, car actuellement pour Hénin-Liétard et les environs, il y a quelque chose comme 900 demandeurs d’emplois, dont la grosse majorité est composée de jeunes gens et de jeunes filles. Ce qui veut dire que des mesures urgentes devont intervenir. Et puissent l’affaire Quillery et les initiatives de la Sofirem inspirer le gouvernement. Quelles pourraient être ces solutions ? Dans l’immédiat, à notre avis, freiner la récession minière telle qu’elle nous a été annoncée. Investir de manière massive et rapide. Implanter des industries nouvelles et par là même, créer des emplois nouveaux surtout pour les jeunes. Pousser activement à la formation professionnelle. Réaliser les travaux d’infrastructure routière nécessaire et en particulier la rocade minière dont on nous parle depuis 1958 mais dont les travaux n’ont pas encore commencé à ce jour. Et enfin, équiper d’urgence la zone industrielle de Douvrin Billy Berclau et à faire occuper cette zone par des industries nouvelles de gabarit international. C’est, je crois, parmi toutes les solutions celles qui nous paraissent essentielles pour relancer l’économie et rendre confiance à nos populations.
(Musique)
Journaliste
Une main d’œuvre active, des implantations fonctionnelles, des infrastructures immédiatement exploitables, voilà les armes sûres d’une région qui refuse la torpeur.