Les huîtres en casier
11 mai 1998
04m 24s
Réf. 00227
Notice
Résumé :
Près de Talmont-Saint-Hilaire, l'association Estuaire proteste contre le projet de la commune de Jard-sur-Mer de créer des bassins de collecte d'eaux filtrées de la station d'épuration. Leur contre-projet consiste en la création de bassins de moindre profondeur, qui seraient plus efficace et moins menaçant pour les activités ostréicoles.
Type de média :
Date de diffusion :
11 mai 1998
Source :
FR3
(Collection:
JT soir Pays de la Loire
)
Personnalité(s) :
Lieux :
Éclairage
A partir des années 1960, l’ostréiculture a connu une modernisation avec le passage de l’élevage « à plat » (c’est à dire à même l’estran) vers l’élevage surélevé. La plupart des ostréiculteurs ont adopté l’élevage en poches grillagées en plastique. Sanglées sur des tables en ferraille, elles sont remplies de coquillages juvéniles et retournées périodiquement pour offrir à la lumière du jour une face débarrassée de la vase et des algues qui tendent inexorablement à proliférer. Une telle forme d’élevage aboutit à produire des huîtres légèrement allongées, car ayant grandi serrées les unes contre les autres. Dès 1915, les conditions particulières de l’estuaire du Payré, petit fleuve côtier proche de Talmont-Saint-Hilaire, avaient conduit les ostréiculteurs à développer un élevage surélevé : l’élevage en casier. L’omniprésence d’un sable prompt à s’accumuler et à ensevelir les élevages, qu’ils soient à plat ou sur des tables, fut à l’origine de cette adaptation. A La Guittière, port saunier devenu ostréicole, les élevages sur des pieux – les chantiers – supportaient des casiers, sortes de plateaux dont le fond est grillagé.
Ce type d’élevage cumule les contraintes techniques : il oblige les ostréiculteurs à mettre en œuvre des installations sans les dispenser des multiples opérations manuelles de l’élevage à plat. En effet, alors qu’il suffit de retourner les poches, les casiers nécessitent l’utilisation d’outils à main. Avec le boguet (la pelle des sauniers) ou la fourche, autrefois dédiés à l’élevage à plat, il s’agit de retourner délicatement les coquillages disposés en casier. Moins résistant et plus coûteux que la poche, le casier commande un élevage de moindre densité dont les huîtres font l’objet de soins plus attentifs (rinçage, brassage). Le squelette – la coquille – de l’huître se développe de manière plus régulière et la chair du coquillage suit sa courbe de croissance. Au final, les produits sont de catégories supérieures (norme AFNOR « fines » ou « spéciales ») avec des formes rondes et des coquilles pleines.
Dès 1993, à La Guittière, pêcheurs, chasseurs et ostréiculteurs s’étaient regroupés au sein de l'association Estuaire. Un label était en préparation en 1999, pour ce produit élevé et vendu en circuit court. Les conflits d’usage résultant du tourisme balnéaire vinrent alors s’inviter dans le dossier. Leur but était de redonner ses lettres de noblesse à l'huître élevée en casier, comme le faisaient les anciens. Mais, non loin de là, la commune de Jard-sur-mer projetait de créer des aménagements pour recueillir l'eau traitée par sa station d'épuration. La nombreuse population estivale rejette plus de polluants alors même que Le Payré connaît son étiage. Comme dans bien des points du littoral, la station est implantée dans une zone basse offrant la commodité d’un acheminement des eaux usées par effet de gravité. A Jard-sur-mer, cet équipement est proche du chenal de Bernard, qui se jette dans Le Payré, en amont des parcs ostréicoles.
En 1998, l’association, conseillée par des biologistes, soulignait les risques de contamination des huîtres. La crise s’est nouée autour des bassins destinés à stocker les eaux usées pour achever leur retraitement. Le projet de la mairie de Jard-sur-mer misait sur l’action des seuls ultraviolets (UV) pour éliminer les bactéries résiduelles. Contesté par Estuaire, ce système a été finalement délaissé au profit du lagunage, avec des bassins peu profonds, combinant l’action des UV et celle d’algues dévoreuses de bactéries. En dépit de cette avancée décisive, l’huître de casier n’est pas parvenue à s’imposer. Certes, elle a bien fait l’objet du dépôt d’une marque « Brune de casier » eu égard à la couleur de ses écailles (valves) qui sont tout à fait brunes. Cependant, les contraintes de l’élevage en casier l’ont rendu confidentiel. La technique des poches, plus pratique, moins coûteuse et plus productive, s’est imposée parmi les 19 entreprises qui vendent aujourd’hui leurs huîtres sous le label « huître de Vendée atlantique ».
Ce type d’élevage cumule les contraintes techniques : il oblige les ostréiculteurs à mettre en œuvre des installations sans les dispenser des multiples opérations manuelles de l’élevage à plat. En effet, alors qu’il suffit de retourner les poches, les casiers nécessitent l’utilisation d’outils à main. Avec le boguet (la pelle des sauniers) ou la fourche, autrefois dédiés à l’élevage à plat, il s’agit de retourner délicatement les coquillages disposés en casier. Moins résistant et plus coûteux que la poche, le casier commande un élevage de moindre densité dont les huîtres font l’objet de soins plus attentifs (rinçage, brassage). Le squelette – la coquille – de l’huître se développe de manière plus régulière et la chair du coquillage suit sa courbe de croissance. Au final, les produits sont de catégories supérieures (norme AFNOR « fines » ou « spéciales ») avec des formes rondes et des coquilles pleines.
Dès 1993, à La Guittière, pêcheurs, chasseurs et ostréiculteurs s’étaient regroupés au sein de l'association Estuaire. Un label était en préparation en 1999, pour ce produit élevé et vendu en circuit court. Les conflits d’usage résultant du tourisme balnéaire vinrent alors s’inviter dans le dossier. Leur but était de redonner ses lettres de noblesse à l'huître élevée en casier, comme le faisaient les anciens. Mais, non loin de là, la commune de Jard-sur-mer projetait de créer des aménagements pour recueillir l'eau traitée par sa station d'épuration. La nombreuse population estivale rejette plus de polluants alors même que Le Payré connaît son étiage. Comme dans bien des points du littoral, la station est implantée dans une zone basse offrant la commodité d’un acheminement des eaux usées par effet de gravité. A Jard-sur-mer, cet équipement est proche du chenal de Bernard, qui se jette dans Le Payré, en amont des parcs ostréicoles.
En 1998, l’association, conseillée par des biologistes, soulignait les risques de contamination des huîtres. La crise s’est nouée autour des bassins destinés à stocker les eaux usées pour achever leur retraitement. Le projet de la mairie de Jard-sur-mer misait sur l’action des seuls ultraviolets (UV) pour éliminer les bactéries résiduelles. Contesté par Estuaire, ce système a été finalement délaissé au profit du lagunage, avec des bassins peu profonds, combinant l’action des UV et celle d’algues dévoreuses de bactéries. En dépit de cette avancée décisive, l’huître de casier n’est pas parvenue à s’imposer. Certes, elle a bien fait l’objet du dépôt d’une marque « Brune de casier » eu égard à la couleur de ses écailles (valves) qui sont tout à fait brunes. Cependant, les contraintes de l’élevage en casier l’ont rendu confidentiel. La technique des poches, plus pratique, moins coûteuse et plus productive, s’est imposée parmi les 19 entreprises qui vendent aujourd’hui leurs huîtres sous le label « huître de Vendée atlantique ».
Thierry Sauzeau