Les Alliés à Rennes
Notice
Sous le commandement du Général Montgomery, les troupes alliées, acclamées par la foule, entrent à Rennes. En marge des manifestations de liesse populaire, les "traîtres" sont arrêtés et emprisonnés.
Éclairage
Si la Libération est un évènement militaire et politique, elle participe également du processus de reconstruction identitaire de toute une population. Le 4 août, en entrant dans la cité, l'armée américaine libère Rennes. La veille, dans la nuit, des représentants du GPRF (gouvernement provisoire de la République française), désignés dans la clandestinité, parviennent à obliger le préfet et la municipalité nommés par Vichy à leur céder la place. Les nouvelles autorités (le commissaire de la République Victor Le Gorgeu et le président de la délégation spéciale Yves Milon) accueillent donc les soldats américains au nom du gouvernement du général de Gaulle et de la Résistance.
L'enjeu est fondamental. La reconnaissance de ces responsables par les Alliés évite une administration militaire anglo-saxonne sur les territoires libérés (AMGOT), permettant ainsi de recouvrer immédiatement la souveraineté. L'opération réussit. Dans l'après-midi, les Rennais rassemblés place de la Mairie, face au drapeau tricolore croisé avec la bannière étoilée, acclament les représentants de la France libérée (dont Yves Milon, futur maire de Rennes de mai 1945 à mai 1953) réunis sur le balcon de l'Hôtel de ville aux côtés des officiers alliés. A Rennes, les résistants se réapproprient donc l'espace public en présence des Alliés. C'est une première étape du recouvrement de la fierté nationale. Les grands rassemblements et l'exhibition de symboles patriotiques rendent publique cette affirmation. Mais à cet instant, on ne compte que peu d'hommes parmi les Rennais : ils sont encore nombreux dans les camps de prisonniers de guerre en Allemagne, à travailler dans les usines allemandes comme requis du STO ou, hommes et femmes, à tenter de survivre dans les camps de concentration. Toujours place de l'Hôtel de ville, on peut alors croiser des FFI marchant au pas, le fusil sur l'épaule, tandis que l'épuration sous toutes ses formes se manifeste au grand jour, en particulier avec la tonte des cheveux des "mauvaises Françaises" dans les rues de la ville. Les tontes, organisées notamment dans les lieux de pouvoir, sont le plus souvent encadrées par les résistants locaux. A l'exemple de ce qui se passe pour les femmes, l'épuration concerne toutes les strates de la société : collaborationnistes, profiteurs. La présence des Alliés signifie donc la libération de l'occupant, l'épuration et le début d'un processus qui conduit au retour progressif à la démocratie républicaine.
Bibliographie :
- Luc Capdevila, "Des années sombres aux quartiers d'avenir (1939-1960)" dans Gauthier Aubert, Alain Croix et Michel Denis, Histoire de Rennes, PUR, Apogée, 2006.
- Fabien Lostec, Les manifestations de la Libération dans les Côtes-du-Nord : rites et symboles, Master II, Rennes 2, Marc Bergère (Dir), 2005.