Discours de Georges Pompidou à Rennes

22 mai 1969
03m 19s
Réf. 00212

Notice

Résumé :

Après l'échec du référendum du 27 avril, entraînant le départ de De Gaulle, Georges Pompidou, en visite à Rennes, annonce sa candidature aux prochaines élections présidentielles. Dans son discours, il réclame le soutien de tous ses partisans.

Date de diffusion :
22 mai 1969
Source :
Personnalité(s) :

Éclairage

Georges Pompidou (1911-1974), élève de l'École Normale Supérieure, obtient l'agrégation de lettres en 1934. Il devient professeur à Marseille puis à Paris, au lycée Henri IV, où il enseigne en classe préparatoire. En 1944, bien que n'ayant pas été résistant, il entre au cabinet du général de Gaulle. Maître des requêtes au Conseil d'Etat en 1946 puis directeur de la banque Rothschild, il reste attaché pendant toute la IVe République au général de Gaulle et devient l'un de ses plus proches conseillers.

Au moment où il est désigné Premier Ministre en 1962 à la place de Michel Debré, il est encore complètement inconnu du grand public. C'est peu à peu qu'il affirme sa personnalité politique. Soit que sa popularité grandissante portât ombrage au général de Gaulle, soit que celui-ci reprochât à son Premier Ministre de n'avoir pas su prévenir la crise de 1968, Pompidou est remplacé par Couve de Murville un mois après le début des "événements". En marge du pouvoir, il sait alors cristalliser sur lui les espoirs de tous ceux qui aspirent à un changement dans la continuité.

Quarante-huit heures après le départ du général désavoué par référendum en avril 1969, il annonce sa candidature à la présidence de la République. Exception faite de quelques tensions chez les gaullistes de gauche et des Républicains indépendants menés par Valéry Giscard d'Estaing, les ralliements posent peu de problèmes à Georges Pompidou. Par contre, la perspective électorale perturbe la gauche et fait réapparaître les divisions. Celle-ci se présente aux élections en ordre dispersé puisque le PSU, la SFIO, le PC et l'extrême-gauche présentent chacun un candidat. La campagne électorale a pour enjeu principal l'avenir du système mis en place par Charles de Gaulle et la définition de la fonction du prochain président de la République. Même si d'autres thèmes tels que l'Europe, l'industrialisation, les préoccupations des Français sont constamment présents, l'avenir constitutionnel demeure au centre de la campagne. Plus adroit que ses adversaires devant les caméras de télévision (un outil de communication encore neuf en 1969), Pompidou s'impose vite comme le favori des prochaines élections. Il est élu président de la République avec plus de 58% des voix au niveau national et 63% en Bretagne, devant Alain Poher, second candidat présent au deuxième tour.

C'est à partir des élections municipales de 1977, soit trois ans après la mort de Georges Pompidou et sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, que l'on assiste à un certain basculement vers la gauche en Bretagne, puisque plusieurs grandes villes tombent dans l'escarcelle du parti socialiste telle Rennes. Cette tendance se confirme en 1981 puisque la population qui opte pour François Mitterrand est surtout urbaine et qu'une nouvelle fois la Bretagne dans son entier vote davantage en faveur de Valéry Giscard-d'Estaing (50,8% au second tour des élections présidentielles), exception faite des Côtes-du-Nord qui accordent la majorité absolue au candidat socialiste avec plus de 55% des voix.

Fabien Lostec

Transcription

(Applaudissements)
Georges Pompidou
Nous sortons d'un référendum, d'un référendum où le général de Gaulle - et nous sommes beaucoup à le regretter - avait cru devoir engager sa fonction et sa personne, à propos de la loi sur la réforme régionale et du Sénat. L'ayant dit, s'y étant engagé, il l'a fait naturellement, lui. Mais, qui n'a senti le vide ainsi créé ? Qui ne comprend que sur le plan international et sur le plan national une page est tournée, et que nous devons nous interroger sur ce que pourra être l'avenir, sur ce que nous pourrons faire de l'avenir ? Déjà, certains se réjouissent, et comme dit Victor Hugo : « Les chevaux de la mort se mettent à hennir et sont contents car l'âge éclatant va finir ». Eh bien non, il faut qu'il ne finisse pas ! Il faut que nous essayons de sauver tout ce qui est essentiel, et qu'essayant de sauver tout ce qui est essentiel, nous essayons de marcher encore et toujours sur la voie du progrès. Pour nous, par respect pour ce qui a été fait hier, par nécessité aujourd'hui, et pour l'avenir, l'avenir de nos enfants.
(Applaudissements)
Georges Pompidou
C'est le 1er juin prochain le choix que vous aurez à faire. Voulez-vous choisir entre le retour au désordre, à l'impuissance, à l'incapacité de gouverner, quelle que soit la volonté des hommes, et même leur bonne volonté ? Voulez-vous au contraire que la France essaie librement, démocratiquement, mais avec l'ordre et la fermeté possible s'il le fallait, de progresser vers l'avenir ? C'est cela votre choix, c'est pour cela et pour cela seulement que j'ai osé poser ma candidature et non pas, croyez le bien, par goût des honneurs ou des palais nationaux. C'est pour cela que je vous demande de m'aider, de m'apporter votre concours dans cette campagne, autour de vous, auprès de vos amis, de m'apporter votre vote le 1er juin, et de me garder ensuite votre confiance. Et si j'ai tout cela, eh bien, je crois qu'avec de bonnes équipes, rénovées, rajeunies, avec une majorité élargie, avec le concours de tous les élus, partout et avec le conc..., la confiance du peuple, eh bien la France, quoi qu'elle ait pu perdre, aura devant elle un avenir de prospérité, de dignité et de bonheur !
(Applaudissements)