Amiens : la maison de la culture est "démocratisée"
Notice
Sur le plateau de Picardie Actualités en grève, Henry Metro fait le point sur la maison de la culture d'Amiens qui a été "démocratisée". Un débat a eu lieu dans lequel M. Berger, membre du comité de démocratisation, a demandé de nouvelles structures. Trois commissions ont été instituées à cet effet. Interrogé, M. Berger fait le point des revendications demandées par le comité. De son côté, Philippe Tiry, directeur de la MCA, estime que la maison de la culture doit être un lieu de contestation.
Éclairage
Triple mouvement de contestation – politique, sociale et culturelle – des valeurs traditionnelles de la société française, Mai 68 prend naissance dans le milieu étudiant parisien, tout d'abord à la faculté de Nanterre, ouverte en 1963 pour décongestionner la Sorbonne, où l'agitation a débuté le 22 mars. Le 2 mai, la faculté de Nanterre est fermée et le mouvement étudiant emmené par Daniel Cohn-Bendit se déplace au cœur de Paris. Le lendemain, le meeting organisé à la Sorbonne est évacué par les forces de l'ordre. Dès lors commencent les manifestations au Quartier Latin, avec ses barricades et affrontements entre CRS et révoltés. C'est au tour de la Sorbonne d'être fermée. A Amiens, le mouvement du printemps 1968 se déroule dans la continuité du mouvement parisien, à partir du 6 mai.
Le vent nouveau souffle en particulier sur la Maison de la culture d'Amiens (MCA), inaugurée en 1966 par André Malraux et qui a accueilli, en mars 1968, le colloque sur le système éducatif français, en présence d'Alain Peyrefitte, Ministre de l'éducation nationale. A partir du 19 mai, la MCA devient le lieu symbolique de la contestation étudiante et un lieu de discussion permanent. Un comité de démocratisation y est formé dès le 19 mai et un meeting est organisé le 21 mai. Les débats sont bruyants, confus et souvent houleux. Les étudiants maoïstes participent à ce chambard (1). Il est difficile pour les différents orateurs de se faire entendre. Philippe Tiry, le directeur de la MCA, tente jouer les conciliateurs mais doit quitter la scène du Grand théâtre sous les huées. Ils étudient de nouvelles structures pour la Maison de la Culture et remettent en cause la conception de la culture. Les discussions débouchent sur la création d'une commission provisoire d'administration de la Maison de la culture, qui entend se substituer au conseil d'administration en exercice. Un prix unique est fixé à trois francs. Il est également décidé que les animateurs et les adhérents établissent la programmation. C'est une véritable révolution culturelle qui est orchestrée : la MCA doit devenir la Maison du peuple. Le 24 mai, la MCA est fermée sur décision de son directeur. Le piquet de grève du personnel s'installe sur le parvis et les étudiants campent devant les portes. Dans la nuit du 27 au 28 mai, certains pénètrent de force dans la Maison de la culture et l'occupent, mais quelques heures seulement. Les jeunes sont embarqués par les forces de l'ordre, emmenés au commissariat central puis relâchés.
(1) On aperçoit au micro, Jean-Bernard Dupont, leader des étudiants maoïstes d'Amiens, président de l'AGEA-UNEF de 1968 à 1971.