Le foie gras de Gascogne
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Résumé
Un couple d'éleveurs évoque l'élevage intensif d'oies, et la préparation des foies gras. Après un détour par le marché au gras de Gimont, s'égrènent les étapes de production dans une conserverie, du pesage des morceaux d'oie au sertissage des boîtes destinées à l'exportation.
Date de publication du document :
01 nov. 2022
Date de diffusion :
05 févr. 1975
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Contexte historique
ParEthnologue
Si la cuisine gersoise est conditionnée par les produits de la ferme, elle est aussi fonction du rythme des saisons et du calendrier de production. Un aspect préoccupe : la conservation. Pour garantir un apport en viande tout au long de l’année, selon des procédés ancestraux, deux techniques sont utilisées en fonction des types de viandes : la salaison, notamment pour le porc et la viande confite dans sa propre graisse pour les oies et les canards. Car, tout comme le sel, la graisse conserve les chairs.
Tout un procédé de transformation est ainsi employé. Joseph de Pesquidoux décrit en 1914 : Les oies saignées, on les ouvre, on les fend, on les débarrasse de leurs foies, et on les découpe en quartiers : ailes, cuisses, poitrines et carcasses. On les étend dans un saloir, saupoudrées de gros sel. Elles s’y imprègnent de saumure, y arrivent à la saturation nécessaire à leur conservation, et on les retire ordinairement après les trois jours. On les fait fondre dans de grandes bassines de cuivre, lentement, sur du bois sec qui ne fume point, en tisonnant le feu. La bassine s’emplit d’un flot huileux bouillant ; la chair dépouillée flotte, et l’amalgame onctueux de la graisse, de la viande et du sel s’accomplit. On distribue le tout dans des pots de terre. Les quartiers s’enchevêtrent, et la graisse prend au-dessus son niveau et se congèle. On dirait de la neige nivelée. Dans quelques mois, cette graisse réchauffée sera un mets exquis : et cette neige, toute l’année, veloutera les sauces blondes
(Pesquidoux, 1981, p. 32-33).
Cette recette, transmise de grands-mères, en mères et en petites-filles, est toujours celle qui se pratique dans les cuisines familiales. La bassine en fer-blanc a remplacé celle en cuivre, la cuisinière au gaz le feu de bois, les bocaux en verre les pots en terre vernissée et les oies se sont substituées aux canards, plus faciles à élever.
Tous les morceaux sont valorisés. Les cuisses sont généralement accompagnées de pommes de terre sautées avec une persillade. Les manchons, les ailes, les cous et les becs servent aux ragoûts et aux soupes, dont la fameuse garbure. Il reste alors la carcasse, appelée « demoiselle » et ses deux aiguillettes. On les appelle les « demoiselles », mais en dehors du département, peu de personnes le savent. On les grille au feu de bois, on y ajoute un peu de fleur de sel de Guérande, du poivre, on les dépiaute avec les doigts et on les savoure comme une récompense.
Si l’élaboration du confit est localement encore encline à l’univers familial pour sa consommation courante, son commerce s’est largement étendu. Les méthodes de conservation en pots en ont permis l’export. Au XVIIIe siècle, faciles à transporter, les pots de cuisses d’oie étaient régulièrement offerts comme cadeaux entre familles nobles (Marache et Meyzie, 2016). Offrir une canardise est un usage toujours en vigueur. Au début du XXe siècle, en 1908, l’union d’un ferblantier et d’une charcutière à Gimont, place incontournable des échanges marchands de volailles engraissées : les marchés au gras, donne naissance aux premiers foies gras en boîte. Parfaitement adapté au transport, dès 1935, la commercialisation de conserves de foie gras se modernise et se fait par correspondance, une véritable innovation. Forte de son succès et pour sortir de l’hyper saisonnalité des fêtes de fin d’année, la conserverie s’étend ensuite aux recettes maisons : cassoulets, garbures et autres plats en sauce. Des emplois principalement féminins se créent.
Dans les années 1970, les premières grandes surfaces et leurs rayons alimentaires voient aussi le jour. La conserverie gersoise rayonne alors bien au-delà de son territoire de fabrication et les techniques de préparation artisanales s’adaptent à son industrialisation et à sa commercialisation à grande échelle. Ainsi, les grandes marques de conserverie gimontoises créent un réseau de boutiques aujourd’hui implanté partout dans le monde. Or, la production locale est insuffisante pour satisfaire la demande. L’importation est alors considérée comme une menace. Un plan de relance de la production de gras est ainsi envisagé pour aider les producteurs du Sud-Ouest à développer la filière.
Éclairage média
ParEthnologue
- Corinne Marache, Philippe Meyzie, « Voyage à travers le temps. L’oie du Sud-Ouest entre mémoire et histoire, XVIe-XXIe siècles », Annales de l’Académie polonaise des sciences, Centrum Upowszechnia- nia Nauki PAN, Paris, Centre scientifique de l’Académie polonaise des sciences, 2016, n° 18, pp.207-224. hal-02264332
Bibliographie
- Benjamin Cointre, O. Rozes, Le Livre de l’agriculteur gascon, Imprimeurs-Éditeurs d’Auch, Auch, 1922.
- Corinne Marache, Philippe Meyzie, Voyage à travers le temps. L’oie du Sud-Ouest entre mémoire et histoire, XVIe-XXIe siècles, Paris, Centre scientifique de l’Académie polonaise des sciences, 2016, n° 18, p. 207-224.
- Claude Lille Larroucau, Foie gras et développement territorial en Astarac : entre tradition et modernité, vers une reconquête de l’identité locale, mémoire de maîtrise, IUP Aménagement, Université de Pau et des Pays de l’Adour, 1997
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Intervenant 4
Alors, première opération, vous avez sorti le manteau.
Jean-Paul Terray
Fièrement dressé sur sa colline, Villemont, chef-lieu de canton, 3000 habitants, siège d’importantes conserveries et marchés réputés.
(Bruit)(Musique)
Inconnu 1
Il y a au moins, d’après les statistiques déjà, déjà faites sur les carnets, autour de 4000 et 4 500 canards sur le marché.
(Musique)
Inconnu 1
[Inaudible]
(Musique)
Inconnu 1
[Inaudible]
Inconnue 1
[Inaudible].
Inconnu 1
[Inaudible] ?
Inconnue 1
Oh oui.
Inconnu 1
Mais…
Inconnue 1
[Inaudible].
Inconnu 1
[Inaudible].
Inconnue 1
Oh oui.
Inconnu 1
[Inaudible].
Inconnue 1
[Inaudible] 700 grammes de moyenne [inaudible].
Intervenant
On peut dire que sur la plupart des marchés hebdomadaires, il y a, du mois de novembre au mois de mars, c’est-à-dire pendant la production, la production traditionnelle, des apports qui sont très importants.D’ailleurs, la plupart des municipalités où existe un marché, des chefs-lieux des cantons où existe un marché, l’ont fort bien compris, et organisent régulièrement des concours de gras qui témoignent de l’importance des apports qui sont réalisés sur les marchés.
Jean-Paul Terray
Ce sont des canards gras Monsieur.
Intervenant 2
C’est bien leur saison, c’est à cheval sur le mois de novembre et décembre, c’est le moment où le canard est le plus gros.Elle a des canards magnifiques, elle a une très belle race, qu'elles ont sélectionné.On le voit, ce sont de vrais mulards, voyez-vous, on le voit à la tête.
Inconnue 2
Il y a quinze jours, ils m’ont fait cinq kilos six-cent de moyenne.
Intervenant 2
Les canards ?
Inconnue 2
17 canards, oui.Cinq kilos six-cents.
Jean-Paul Terray
Comment choisit-on un canard gras ?
Intervenant 2
Et bien, ce n’est pas difficile.Vous avez d’abord, si vous avez l’oeil averti, vous voyez le foie à travers le canard.Voyez-vous, c’est un peu impensable, mais celui qui a l’oeil averti sait le voir.Et si vous n’avez pas l’oeil averti, et bien ma foi, vous tapez. Alors, vous partez, vous avez le bréchet qui est ici, vous descendez 5 centimètres au-dessous, et vous allez en tâtant tout doucement et au moment où ça n’est plus mou, c’est que le foie s’arrête.Alors ici, vous avez un foie qui fait 22 centimètres de long et vous avez à peu près 10 centimètres de largeur.Donc, vous allez avoir un foie de 650 grammes approximativement.Je peux me tromper, mais admettons qu’il fasse 600 grammes.
Inconnue 2
Ma marchande elle m’a dit qu’il m’avait fait 700 grammes de moyenne.
Intervenant 2
Maintenant, il faut se méfier, parce que lorsque l’on achète des canards, il y a des éleveurs qui sont assez rusés pour ramener le canard complètement avec une bandoulière comme ça.Alors, évidemment, vous avez le foie qui semble arrivé au fond et puis en réalité, il n’arrive qu’aux deux tiers de la bête.
Inconnue 3
Le foie d’oie n’est pas du tout comme le foie de canard, il déchette bien moins d’abord, et puis, il est plus onctueux, il est déjà plus cher.
Jean-Paul Terray
C’est une entreprise familiale ici ?
Intervenant 2
Ah oui, uniquement, uniquement.
Jean-Paul Terray
Il y a votre mère ?
Intervenant 2
Ma mère et ma femme.Nous sommes trois à nous occuper des oies pendant, disons deux mois et demi d’hiver.Alors là nous faisons pratiquement que ça, pratiquement.Donc, on la plume, on les échaude, on les plume, on les prépare, on nettoie et on débite après.On commercialise quoi.
Jean-Paul Terray
Vous commercialisez tout dans l’oie ?
Inconnu 2
Tout, tout.Le foie d’abord, on le met en boîte et puis on le confit.
(Musique)
Jean-Paul Terray
Combien de kilos de foie gras traitez-vous dans une saison ?
Inconnue 3
Ça dépend des bêtes.
(Musique)
Inconnue 3
Il faut compter 7,800 grammes par oie.
(Musique)
Inconnu 3
Autrefois, c'est ce que dit maman, on faisait 10, 12 kilos.Mais là, c’est plus petit.
(Musique)
Jean-Paul Terray
Autre affaire familiale, mais de proportions plus considérables, cette conserverie de Gimont, créée en 1954, entreprise de vente par correspondance.Un développement constant a conduit à l’installation dans des locaux neufs plus vastes et adaptés à une production plus intensive, production qui a su toutefois conserver un caractère artisanal.Bilan, le chiffre d’affaires est passé de 1 600 000 Francs en 1970 à 11 000 000 en 1974, le personnel de 19 à 110 salariés, avec deux tiers de femmes.
(Bruit)
Pierre Dubarry
Quand je suis entré dans l’affaire familiale, j’avais, je suis entré très de bonne heure, mais j’ai pris part effectivement à l’âge de 26 ans.A l’âge de 26 ans, je me suis mis au travail et je crois qu’à cette époque-là, j’ai voulu tirer mon feu d’artifice.
(Bruit)
Pierre Dubarry
Au départ, donc j’ai dû, si vous voulez, trouver de nouvelles idées pour étendre la production, pour trouver de nouveaux marchés également.Il faut d’abord trouver de nouveaux marchés.Donc, j’ai cherché et il m’est venu à l’idée de proposer mes produits par télex.Pas pour communiquer, mais pour faire une étude de marché, ce qui m’a permis de savoir quels étaient les désirs de la clientèle et de pouvoir orienter mes propositions en ce sens.La raison pour laquelle, en dehors du foie gras, nous avons pu à cette époque-là ajouter à notre gamme des plats cuisinés, à base de produits régionaux exclusivement.
Intervenant 4
C’est un peu comme le canard mulard, mais c’est un canard croisé de sauvage et c’est un canard qui fait de très bons confits et de très bons foies gras.Il y a des personnes qui se font un monde pour préparer cette marchandise, alors que ce n’est rien du tout.Voyez-vous, il suffit de craquer une allumette ou un briquet, on met le feu, un peu d’alcool à brûler, on détrousse son canard, on en flambe les duvets, et lorsque le duvet est flambé, n’est-ce pas, il ne reste plus, avec un simple attirail qu’un couperet et un couteau, de couper le cou, de couper les ailes.Voici, on prend le dos, on fait une incision.
(Silence)(Bruit)
Intervenant 4
Et voilà.Deuxième opération, vous sortez le foie,d’un coup de couteau. Vous dégagez le cœur et vous sortez le foie.Faites attention de ne pas écraser le fiel.Et voici.Voilà, vous voyez ?Vous avez un beau foie qui pèse 600 grammes.Voici.
(Musique)
Intervenant 4
Tous les plats cuisinés peuvent se mettre en conserve, que ce soit des poulets rôtis, que ce soit des pintades en salmis, que ce soit des canards, que ce soit n’importe quoi.
(Musique)
Intervenant 4
Les cassoulets exactement, de la même façon, dès que le plat est fait, on le met en conserve, on le stérilise et on a un cassoulet extraordinaire.
(Musique)
Pierre Dubarry
Notre ambition de maintenir l’emploi en plein temps dans l’entreprise nous a orientés, si vous voulez, vers de nouveaux marchés.A chaque saison, nous offrons les produits de la saison.A Noël, bon, il n’y a pas de problème, c’est le foie gras.En janvier, février, mars, nous sommes en train de lancer une campagne sur la fête du cochon.À partir du mois d’avril, eh bien, ce sont les déjeuners sur l’herbe, avec des paniers campagnards, avec des produits emballés dans du foin, et au mois de septembre, et bien, c’est l’époque du gibier, les palombes, les lièvres, les lapins de Garenne, etc.
(Musique)
Pierre Dubarry
Le fait de se retrouver en milieu rural nous permet de vivre en contact de cette tradition que l’on essaie de faire passer au travers de nos propositions.Et le fait d’avoir des gens, si vous voulez, qui trouvent leur promotion sur place, qui eux-mêmes sont issus de ce terroir, offre une collaboration telle que nous vivons tous à l’unisson.
Intervenant
Si la production de [gare] est insuffisante, la production nationale, et que l’on est obligé d’importer des foies gras de l’étranger…
Inconnue 5
Je pense que nous, nous sommes au plafond, parce que 1000 oies, c’est un maximum.Si nous en manquions, il nous faudrait une autre personne.Si un enfant restait par exemple, ou alors une personne, en payant quoi.
Intervenant 2
Pour nous, 200 oies, ça nous donne déjà pas mal de travail, ça suffit.Pour le moment, ça suffit.
Inconnu 3
Parce que nous passons deux mois et demi d’hiver à ne faire que ça, gaver, tuer et cuisiner et expédier.Et cela nous fait beaucoup de travail.
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