Le musée de la Résistance à Vassieux-en-Vercors

08 mai 1990
04m 51s
Réf. 00452

Notice

Résumé :

A l'occasion du 45ème anniversaire du 8 mai dans le Vercors, ce reportage se consacre à ce haut lieu de la Résistance et de massacres. M. La Picirella, fondateur du musée de la Résistance, n'a de cesse de faire connaître ce sombre passé.

Date de diffusion :
08 mai 1990
Source :
FR3 (Collection: JT FR3 Alpes )

Éclairage

S'il y a dans la région Rhône-Alpes deux lieux qui symbolisent généralement la Résistance, dans ses épisodes héroïques et tragiques, ce sont bien les « maquis emblèmes » des Glières et du Vercors. En 1990, à l'occasion du 45ème anniversaire des massacres du Vercors, les cérémonies rendent hommage aux victimes militaires et civiles et rappellent à la population les épisodes dramatiques de l'été 1944.

Les images du reportage dont seules les dernières minutes ont été ici retenues ciblent les moments officiels de cette cérémonie. La caméra suit quelques instants l'hommage aux défunts rendu par les troupes et la musique militaire, en présence des personnalités et des acteurs encore vivants de cette histoire pendant que les images de la nécropole rappellent l'importance du nombre des morts du plateau. Les témoignages d'acteurs, même dans leur brièveté, veulent insister sur la place des maquis et l'importance de l'engagement de ces hommes pour la plupart, jeunes et inexpérimentés, Filmés dans le décor naturel de ces hauts lieux, ils rappellent les motifs de leur montée au maquis : la défense du territoire si ce n'est de leur patrie et surtout l'attachement aux valeurs de la résistance.

Le reportage consacre quelques minutes à un musée particulier : celui qu'un ancien maquisard, Joseph La Picirella a fondé à Vassieux, en 1973. Ce village martyr, détruit à 70 %, avec une centaine de ses habitants massacrés lors de l'assaut allemand de la fin juillet 1944 est celui qui, avec le village tout proche de la Chapelle en Vercors, a le plus souffert. Lieux majeurs des exactions portées envers les civils, ils en côtoient d'autres qui ont rythmé le martyrologe du Vercors : Saint Nizier, La grotte de la Luire, Valchevière, autant de lieux qui évoquent l'échec des maquis dont la stratégie privilégiait la spécificité du massif du Vercors réputé « citadelle imprenable ». En faisant appel aux dons des habitants, aux anciens maquisards ou à leurs descendants, Joseph La Picirella a constitué des collections qui sont toutes présentées dans des vitrines. Filmé devant une des pièces emblématiques de ce musée, la fresque peinte par un artiste local dans le style des années cinquante et représentant les principaux acteurs, il explique son projet : donner une expression aux personnes tant civiles que militaires, tuées durant la tragédie du Vercors. La caméra laisse deviner quelques uns des éléments présentés dans deux salles où s'accumulent les différents objets et images rassemblés par Joseph La Picirella. Les visiteurs semblent s'intéresser et s'attarder particulièrement devant les vitrines où sont exposées les photos d'identité ou les photos attestant des exactions sur les personnes. L'efficacité de cette présentation semble réelle. Le reportage choisit de le montrer avec l'interview d'une personne allemande, assez jeune, qui découvre cette facette de la guerre. En évoquant ces lieux de mémoire et en insistant sur la prise de conscience par les générations nées après la guerre, le journaliste s'inscrit dans le courant mémoriel à l'œuvre dans ces années. Au début de la décennie 1990, les maquis incarnent encore la Résistance avant que les recherches historiques ne tendent à minorer leur rôle au profit d'autres formes, notamment la résistance urbaine. En 1994, un nouveau mémorial est inauguré au col de La Chaud, et le musée de Joseph La Picirella est devenu musée départemental sous l'égide du Conseil Général de la Drôme.

Anne-Marie Granet Abisset

Transcription

(Musique)
Journaliste
Geyer-Thivollet, Prévost, Dalloz, Chavant, Huet, et bien d’autres, les figures emblématiques ne manquent pas dans le Vercors. Mais la résistance réside avant tout dans sa troupe. De nombreux hommes ont moins de 20 ans en 1944.
(Musique)
Intervenant 1
La réussite d’un mouvement de résistance ou d’un maquis n’a de valeur qu’en fonction des hommes qui le composent. La troupe elle-même était très jeune. J’ai engagé moi-même des gosses qui avaient 15 ans, qui prétendaient en avoir 18 ; et je n’ai découvert leur véritable âge ainsi que leur identité qu’après la libération de Lyon.
Intervenant 2
C’est une expérience extraordinaire sur le plan humain que nous avons vécu, avec un soutien des populations qui je trouve admirable. Nous avons connu des conditions très difficiles ; mais que nous avons surmontées parce que nous étions soudés les uns aux autres. Et que nous avons également eu la joie de voir que, très rapidement, le territoire national retrouvait sa liberté.
(Musique)
Journaliste
463 patriotes sont morts au Vercors, 131 civils, 332 militaires. 46 ans après, d’eux, il reste le souvenir.
(Musique)
Journaliste
A Vassieux, un ancien maquisard, Joseph La Picirella, a voulu consacrer sa vie à la mémoire du maquis. Il a ouvert le seul musée de la résistance dans le Vercors, musée privée, qui fait désormais partie du patrimoine de la région.
(Musique)
Joseph (La) Picirella
Ce musée, je l’ai créé pour, tout simplement, pour immortaliser le sacrifice des victimes obscures. Parce qu’on parle toujours des chefs, des personnalités et j’ai voulu rendre un hommage particulier à toutes les victimes, aussi bien civiles que militaires.
Journaliste
En 1994, cinquantenaire, en 1944 donc, commémoration énorme, commémoration importante et cette fois-ci, les choses vont peut-être changer ?
Joseph (La) Picirella
Oui, c'est-à-dire qu’il va y avoir la création d’un site national historique du Vercors, de la résistance même, sous l’égide du palais de l’Elysée, donc du président de la République. Et c’est le préfet de la Drôme qui est chargé de mission pour coordonner ce projet qui sera financé en gros par les deux départements, Drôme et Isère.
Journaliste
Vous avez été consulté ?
Joseph (La) Picirella
J’ai été consulté, oui. On a d’abord formé un comité d’éthique. Et puis, maintenant, le projet est à l’étude. Et, il va y avoir… Surtout, je pense, ce qu’il sera le plus difficile à choisir, c’est le lieu d’implantation.
Journaliste
C'est-à-dire qu’il est peu probable que ce lieu soit ici. Vous allez devoir déménager en quelque sorte.
Joseph (La) Picirella
Là, disons que c’est à discuter. On ne peut pas prévoir maintenant. Personnellement, je pense qu’il vaudrait mieux, pour une question de pérennité, que le musée de la résistance ou du site national historique, si vous voulez, soit dans le secteur Nord.
Journaliste
Dans le musée de Jo, des centaines de visiteurs viennent se recueillir. Quelque fois, on y rencontre même des touristes allemands.
Inconnu 1
Avant, j’avais déjà une idée de la résistance française mais, je n’ai jamais vu des détails comme cela, que j’ai vu ici au musée.
Journaliste
C'est-à-dire ?
Inconnu 1
Par exemple, des photos des atrocités. Avant, on ne pouvait pas s’imaginer ce qui s’est passé. On croyait peut-être que c’était la guerre et que la guerre, bon, ce n’est pas quelque chose de normale mais quand même la guerre. Mais, ici, les photos que j’ai vues, c’est incroyable.
Journaliste
Est-ce que vos compatriotes allemands, et vous-même, avez une idée précise de ce qui a pu se passer dans le Vercors ?
Inconnu 1
Les faits historiques vous pensez ? Non, je crois que le Vercors, pour la France, est un centre de résistance, cela je le savais avant. Mais je ne savais pas exactement ce qui s’est passé ici.
(Musique)