L'irrigation dans le Languedoc et le Roussillon
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La construction du canal du Bas-Rhône, destiné à irriguer la plaine du Bas-Languedoc régulièrement touchée par la sécheresse, va transformer une région vouée à la monoculture de la vigne en une « Californie à la française ». Désormais, fruits et légumes abondamment arrosés permettent de diversifier l’agriculture locale.
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
22 sept. 1965
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Contexte historique
ParDirecteur de recherche CNRS, Laboratoire ART-Dev UMR 5281
Ce reportage consacré à l’irrigation dans le Languedoc et le Roussillon fait référence à l’une des deux plus grandes opérations d’aménagement du territoire à l’échelle régionale, décidées par l’État après la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit de la création en 1955 de la Compagnie nationale d’aménagement du Bas-Rhône et du Languedoc (CNBRL) et son œuvre majeure : la construction d’un vaste réseau d’irrigation réalisé sous le contrôle de Philippe Lamour, ancien haut fonctionnaire sous la Quatrième République et premier président de cette institution.
De quoi est-il question ? Il agit d’une vaste politique hydro-agricole destinée à transférer l’eau depuis le Rhône jusqu’au département de l’Aude via un canal d’irrigation. Comme le précise le journaliste, il fournit 75 mètres cubes par seconde, le débit de la Seine sous les ponts de Paris
, l’image est symbolique ! L’ensemble des ressources régionales en eau sont sollicitées puisque les fleuves Hérault, Orb et Aude sont également mis à contribution pour compléter plus à l’ouest le dispositif, le canal principal venant de l’Est et s’arrêtant aux portes de Montpellier. Ce modèle d’aménagement s’inspire de la Tennessee Valley Authority (TVA) créée en 1933 par le Président américain Roosevelt dans le cadre de sa politique du New Deal chargée de redynamiser, par la maîtrise et l’utilisation de l’eau, l’économie d’un territoire durement éprouvé par la crise économique et le krach de 1929.
Mais pourquoi une telle entreprise ? Le Bas-Languedoc malade, se meurt depuis des siècles
et il est plongé dans une profonde léthargie, comme le souligne le commentateur. À tel point que les habitants en ont même oublié l’œuvre des Romains. Des ceps rabougris, de maigres vendanges, du vin médiocre, des sécheresses persistantes, sans compter ces pauvres moutons et ces trop rares herbages
voilà comment est décrit le paysage régional. Il est temps de remplacer cette monoculture de la vigne jugée archaïque par une production agricole moderne et de réveiller cette belle endormie. L’opération prend une tournure médicale puisque le sérum miraculeux, qui va donc permettre cette réanimation, c’est l’eau ! Il s’agit selon l’expression consacrée de faire « verdir le désert » et, origine américaine oblige, de transformer la région du Bas-Rhône en une Californie à la française.
Ce miracle s’incarne, d’abord par la technique et la maîtrise de l’eau, avec un canal, des stations de pompage, un pont canal, des châteaux d’eau, des tuyaux souples, des asperseurs, etc., ces Romains des temps modernes
n’ont rien à envier à leurs illustres prédécesseurs. Et ils font même mieux avec 130 000 hectares ainsi récupérés remis en culture, et autant prévus à l’ouest grâce au concours des fleuves. Ils assurent l’eau partout et tout le temps
, le miracle de la pluie à volonté
! Plus fort que les divinités.
Ce miracle se voit également par la transformation paysagère qu’il réalise, se doublant d’une transformation qui comporte également une dimension sociale. Bénéficiant des savoir-faire techniques et des apports en capitaux des rapatriés d’Algérie, la compagnie BRL affiche des résultats au-delà des prévisions ; la pêche et la tomate ont remplacé la broussaille, les céréales et les graines fourragères l’ancienne garrigue. Autre symbole de cette transformation de l’agriculture en un vaste complexe agro-industriel et alimentaire, c’est la conserve dont on voit l’amoncellement vertigineux atteindre le toit des hangars. Cette conserve est complètement intégrée dans une chaîne logistique avec le marché-gare de Saint-Césaire près de Nîmes, et télématique avec le Télex. Cet ensemble permet de coller au mieux à la demande et de s’adapter en temps réel à la fluctuation des prix du marché. Une incarnation d’une économie agricole qui certes se modernise mais qui se globalise également par l’aspiration à alimenter et à conquérir les marchés européens et mondiaux.
Transcription
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