Stage national de voile à La Grande-Motte

C’est en 1968 que les premiers habitants de La Grande-Motte s’installent et font vivre la station. Il en est de même des nombreux touristes qui seront attirés par la mer, le soleil, l’esthétique moderne des lieux et la pratique des activités nautiques les plus prisées (voile légère, voile sur habitable, aviron, pêche sportive, ski nautique, etc.). En 1969, le port de plaisance de La Grande-Motte, inauguré en 1967, est déjà opérationnel. Les premières images révèlent en arrière-plan du port le chantier des « Pyramides » dont on aperçoit les grues et les premières constructions. Le port lui-même n’est pas encore saturé de bateaux de plaisance, mais l’occupation des pontons est déjà significative de l’engouement pour la pratique de la voile en cette période de vacances de Noël.

A la fin des années 1960, le sport « voile » commence à se structurer en organisant des courses en solitaire ou en équipage. Très rapidement, le club de voile complétera ses prestations en développant les activités de course au large. Mais pourquoi la Fédération française de yachting à voile a-t-elle choisi La Grande-Motte pour l’entrainement de l’équipe de France ? Les conditions d’accueil au Yacht Club sont encore rudimentaires (bungalows sur la plage), mais c’est surtout le dynamisme et l’expertise des dirigeants dans l’organisation des entraînements et des compétitions dès 1967 qui retiennent l’attention des responsables fédéraux. 

La proposition d’organisation d’un stage de préparation olympique, soutenue par Philippe Soria, en tant que Conseiller technique régional, est retenue par les dirigeants de la ligue Languedoc-Roussillon et sera légitimée par les entraîneurs nationaux. Il faut également souligner que le régime des vents et le plan d’eau de la baie d’Aigues-Mortes, offrent des conditions de pratique très favorables aux entraînements de l’élite sportive nationale de la voile tout au long de l’année.

A trois ans des Jeux olympiques (J.O.) de Munich, les équipes de France de Finn et de Soling sont déjà dans la dynamique de préparation des épreuves sous la direction de leurs entraineurs : Philippe Soria (Finn, série olympique jusqu’en 2021) et Jean Guillot (Soling, série olympique de 1972 à 2000). Le Finn est un petit voilier d’origine suédoise pour les régates en solitaire, et le Soling un voilier de type « quillard » à trois équipiers. Les activités se déroulent à partir de l’école de voile située à proximité du port et regroupent une quarantaine de stagiaires.

Le commentaire de la séquence vidéo est réalisé par Alex Angel du journal télévisé de Languedoc-Roussillon. Philippe Soria, né en 1942 au Maroc, constitue une référence pour tous les stagiaires présents (équipe de France, Bataillon de Joinville et meilleurs régionaux) : lors de sa première participation olympique dans la série Finn aux J.O. de Mexico (1968) sur le plan d’eau d’Acapulco, il a été classé 8e après avoir gagné la première manche. 

Il est un précurseur en matière de préparation physique des athlètes. Dans le cadre de ses fonctions à la direction régionale de la jeunesse et des sports, il côtoie des spécialistes de la musculation, tels Roger Marchal et Aimé Terme, deux Conseillers techniques régionaux d’haltérophilie. En 1970, il publie un ouvrage, Musculation voile, consacré à la préparation physique spécifique du régatier. Ce livre est préfacé par le directeur de l’éducation physique et des sports de l’époque, Marceau Crespin :  À Philippe Soria reviendra le mérite d’avoir voulu codifier ce qui est déjà le début d’une méthode : en vrai sportif, conscient de ses problèmes, mais en ne se prenant pas trop au sérieux . 

L’entretien confirme la modestie de Philippe Soria qui, se projetant aux J.O. de Munich, déclare tout en rappelant son résultat aux épreuves d’Acapulco : même si ce n’est pas moi qui court, je souhaite que l’on fasse mieux . C’est l’attitude attendue de tout entraîneur qui œuvre pour la réussite des athlètes dont il a la charge. Elle permettra à Serge Maury d’être médaille d’or aux JO de Munich, champion d’Europe et du monde en Finn l’année suivante. D’autres champions du « Solitaire » sont cités en raison de leur appartenance à la région Languedoc-Roussillon, tels Jean Lapalu, Michel Acezat ou Bernard Carrière. Jean Lapalu fut champion de France en solitaire sur Finn en 1968, sans oublier les frères Abiad, champions de France sur 470.

Ce stage constitue une référence historique, car il accompagne la nouvelle politique fédérale de préparation aux J.O. Il témoigne également de la politique d’aménagement du pays (ports, tourisme, etc.) et de la mise en œuvre d’une formation à la compétition pour les jeunes générations. En termes de rayonnement, La Grande-Motte dépasse son image de station de plaisance et positionne le nautisme sportif au plus haut niveau.