Les Caprices de Marianne de Musset

17 avril 1989
02m 30s
Réf. 00337

Notice

Résumé :

Reportage sur Les Caprices de Marianne mis en scène par Bernard Murat, avec André Dussolier, Philippine Leroy-Beaulieu et François Chaumette. Interview d'André Dussolier et extraits de la pièce.

Date de diffusion :
17 avril 1989
Source :
A2 (Collection: MIDI 2 )

Éclairage

A l'origine, la pièce est restée près de 20 ans en sommeil avant de trouver la scène. Musset l'avait fait paraître en 1833 dans La Revue des Deux Mondes mais elle ne sera créée qu'en 1851 à la Comédie-Française, dans une version modifiée (la censure étant passée par là et Musset, après l'échec de La Nuit vénitienne, ayant un temps tourné le dos au théâtre). La pièce comporte 2 actes et porte en sous-titre l'étiquette d'une comédie, mais il faut plutôt y voir une forme exemplaire du drame romantique. La fable tient en quelques mots : à Naples, Cœlio rêve de conquérir le cœur de Marianne, mais cette dernière est mariée à Claudio qui, soupçonnant sa femme d'un amour coupable, poste des spadassins à l'entrée de chez lui. Cœlio assigne à son cousin Octave, dont les mœurs sont plutôt légères, le rôle du messager pour approcher Marianne, mais celle-ci tombe amoureuse d'Octave... Cœlio meurt dans le guet-apens tendu par Claudio en pensant que son ami l'a trahi. Octave, brisé par ce coup du sort, abandonne sa vie de libertin et repousse Marianne.

Le développement du sujet éloigne la pièce, on le voit, du registre comique, mais il y a pourtant de véritables scènes burlesques dans Les Caprices (dans le rapport entre maître et valet) et une critique acerbe des carcans sociaux. Ce mélange de ton et de registre et la façon dont Musset transporte son intrigue de lieu en lieu en jouant sur des effets de discontinuité sont tout à fait caractéristiques du drame tel que le défendent les littérateurs du Cénacle sous l'égide de Victor Hugo, et rappellent les constructions shakespeariennes, l'éloquence et les structures en miroir de Marivaux.

Tous les grands metteurs en scène se sont attelés à cette pièce : Copeau (1918), Baty (1935), Vilar (1958), Vitaly (1967), Vincent (1991), Maréchal (2008)... La mise en scène de Bernard Murat, présentée dans ce document, laisse apparaître, à travers André Dussolier, toute la complexité de la dramaturgie de Musset et son goût pour la construction duale du personnage, tiraillé entre libertinage et idéalisme, en proie au « mal du siècle » et voué à un destin tragique.

Céline Hersant

Transcription

Présentateur
Nous allons maintenant parler d’Alfred de Musset, Patricia, parce que cet homme là est toujours à la mode.
Présentatrice
Oui, avec le reportage de Georges Bégou sur Les Caprices de Marianne, dans les rôles principaux, Philippine Leroy-Beaulieu, François Chaumette, André Dussolier, particulièrement brillant dans le rôle d’Octave, voici ce reportage d’Yves Breux et de Georges Bégou.
Journaliste
Naples, carnaval, jeunesse plaisir, et Octave, le viveur, seulement épris de bonne fortune. Mais comme toujours, chez Musset, se présente le jeune homme vêtu de noir, qui lui ressemble comme un frère. Coelio est romantique, il aime Marianne désespérément et demande à Octave d’être son interprète auprès de la belle Marianne qui veut savoir la vérité sur son prétendant.
Philippine Leroy-Beaulieu
En vérité.
André Dussolier
Coelio est le meilleur de mes amis. Si je voulais vous faire envie, je vous dirais qu’il est beau comme le jour, jeune, noble et je ne mentirais pas mais je ne peux plus faire pitié. Octave, il est… il a dépassé Coelio. C'est-à-dire que Coelio est l’homme épris d’absolu, et puis Octave à la différence de Coelio qui mourra, puisqu’il ne peut pas faire correspondre l’absolu avec la réalité, et bien Octave lui, a décidé de s’enivrer, comme dirait Baudelaire, de vivre tous les instants et puis c’est un homme qui va vers la débauche. Donc, il y a un fond de douleur énorme en dessous et puis une fantaisie à la surface qui est constante. Et il n’a aucun principe, voyez ! Comme elle est bonne fille ! Un mot a suffit pour la faire sortir du couvent. Toute poudreuse encore, elle s’en est échappé pour me donner un quart d’heure d’oubli et mourir. Sa couronne virginale empourprée de cire, odorante est aussitôt tombée en poussière et je ne puis vous cacher, elle a failli passer toute entière sur mes lèvres dans la chaleur de son premier baiser. Marianne, Marianne, ne souriez pas, ne fermez pas votre coeur au premier éclair qui l’ait peut être traversé ! Ce caprice de bonté, ce moment précieux va s’évanouir. Vous avez prononcé le nom le Coelio. Vous avez pensé à lui dites-vous. Ah, si c’est une fantaisie, ne me la gâtez pas. Le bonheur d’un homme en dépend. Dans une époque je trouve très matérialiste, c’est agréable de se baigner chez Musset.