Carolyn Carlson danse Blue Lady
Notice
En 1988, programmée au festival Danse Emoi, à Limoges, Carolyn Carlson tourne son solo-fétiche Blue Lady (1983). En répétition dans un studio, elle évoque au micro de la journaliste son énergie, son désir de faire vivre une expérience au public. Quelques images du spectacle concluent le reportage.
Éclairage
Sa silhouette longiligne et tranchante, son visage taillé et expressif, ses bras qui plient et déplient, ont tatoué la mémoire de nombreux spectateurs. Créé en 1983, Blue Lady reste la signature de Carolyn Carlson. Entre danse et théâtre, sur le fil d'un geste abstrait nourri d'une vie intérieure chargée, Blue Lady, né à Venise où la Carlson s'était réfugiée pour travailler en 1980, traverse le temps, conservant sa saveur urgente. Elle le dansera pendant dix ans. Sur la musique lyrique de René Aubry, ce solo, proche d'un monologue théâtral, est aussi un autoportrait en creux, celui d'une femme aux prises avec ses voix intérieures et habitée par tous les âges qu'elle a ou va traverser.
En 2008, Carlson décide de transmettre Blue Lady à un homme, le chorégraphe finlandais Tero Saarinen. Ensemble, ils travaillent pendant six mois, visionnent les vidéos de la pièce. Les difficultés techniques – en particulier, des tours sur soi proches, selon Saarinen, d'un mouvement perpétuel – sont nombreuses. Pas question pour le danseur de se comparer à Carlson mais de trouver ses propres codes d'accès à la pièce. Pendant cette longue recherche, Saarinen a plongé dans son passé d'orphelin. "Je n'ai pas connu ma mère, disait-il. J'ai eu étrangement la sensation de la rencontrer en interprétant ce personnage mélancolique et grave de Blue Lady. Cela m'a permis de trouver un sens à ma danse".
Avec fougue et respect, Tera Saarinen emporte cette pièce vers des sommets émotionnels en restant au plus près de l'énergie originelle. Parallèlement, un autre danseur Jacky Berger a également endossé Blue Lady et tourne en alternance avec Saarinen. En osant confier ce solo ultra-féminin à un homme, Carolyn Carlson a non seulement fait la preuve de la solidité de son écriture mais aussi du caractère universel des émotions mises en jeu. Carolyn Carlson dirige depuis 2004 le Centre chorégraphique national de Roubaix. Parallèlement, elle tient les rênes de l'Atelier de Paris, qu'elle a ouvert en 1999, et où elle invite des danseurs pour des master-classes.