Agon, Balanchine et Xenakis
Notice
Double reportage filmé pendant une répétition de Agon de Balanchine sur la musique de Stravinski, dont le pas de deux est dansé par Patricia McBride et Jean-Pierre Bonnefous. En seconde partie, sympathique dialogue en français entre Xenakis et Balanchine discutant du rôle de la musique dans la danse.
Éclairage
Difficile de situer le lieu et la date exacte de cet excellent reportage. En première partie nous assistons à une répétition du pas de deux de Agon, créé en 1957 par le NYCB à New-York et entré au répertoire du Ballet de l'Opéra de Paris le 13 mars 1974, au cours d'un hommage à Stravinski, soit neuf mois après cette diffusion. Agon, composé pour le NYCB, est à la fois une œuvre très mathématique (Pas de quatre, double Pas de quatre, Danse des quatre trios etc...) et un hommage aux danses de cour françaises (Sarabande, Gaillarde et Bransles), le tout dans un langage dodécaphonique (les douze notes de la gamme y sont de valeur égale).
Sur cette partition Balanchine a créé un ballet pour douze danseurs, en douze brefs mouvements, à l'exception d'un très ingénieux pas de deux de six minutes pour un couple de solistes, ici Jean-Pierre Bonnefous et Patricia McBride. Remarquablement filmés pendant une répétition dans un studio de télévision, les deux artistes nous permettent d'admirer l'art et l'ingéniosité du chorégraphe. Pendant tout ce duo Jean-Pierre Bonnefous et Patricia McBride se tiennent par la main sans se lâcher, et exécutent des mouvements entrelacés, des portés, et une célèbre figure où le danseur, tout en tenant d'une main sa partenaire, s'allonge au sol, pivote de quatre-vingt dix degrés à petits pas, tandis qu'elle se tient en arabesque sur pointe à cent quatre vingt degrés ! L'originalité et l'invention du chorégraphe se retrouvent aussi dans l'ingéniosité des enchaînements. Tout est mis en valeur, les courbes de Patricia McBride, les entrelacs de mains, comme filmés au ralenti.
Jean-Pierre Bonnefous, né en France en 1943, est un pur produit de l'Ecole de Danse et du Ballet de l'Opéra de Paris où il est nommé étoile en 1965. Ce grand et beau blond se fait vite remarquer dans de nombreuses créations de Maurice Béjart (Webern Opus V) et Roland Petit (Notre-Dame de Paris). En 1970 Balanchine l'engage comme « Principal » au New York City Ballet, où pendant dix ans il danse tout le répertoire et crée quelques pièces de Jerome Robbins. En 1980, il quitte le NYCB avec sa partenaire, sur scène comme dans la vie, Patricia McBride, pour diriger le département de la danse à l'Université d'Indianapolis, puis en 1996, tous deux sont nommés directeurs artistiques du North Carolina Dance Theater.
D'un an à peine plus âgée que son mari, Patricia McBride est elle un pur produit de l'Ecole de l'American Ballet et du NYCB où elle est engagée à 17 ans et promue « Principal » deux ans plus tard. Elle devient une des interprètes favorites de Balanchine qui admire sa technique, sa vivacité et son lyrisme. Patricia crée une quinzaine de ses ballets et une demi douzaine de Robbins dont Dances at a Gathering, In the Night et The Goldberg Variations. Elle se produit au NYCB jusqu'en 1989, et se retire de la scène après trente années passées au NYCB.
La seconde partie de ce documentaire propose un bref entretient en français entre George Balanchine et le compositeur grec Iannis Xenakis. Tous deux se connaissent depuis plusieurs années, et en 1968 Balanchine crée au NYCB deux ballets sur de courtes partitions de Xenakis : Metastaseis et Pithoprakta. Sujet de leur conversation : le rôle de la musique dans le ballet. Pour finir le chorégraphe trouve cette jolie définition : « La musique, c'est comme si vous aviez un magnifique lit pour dormir. Mais il n'y a pas que le lit qui existe, votre corps est quelque chose aussi : alors il faut le mettre bien dedans, avec des coussins.... ».