Des supporters mayennais pour soutenir Manuela Montebrun

Jamais auparavant une femme n’avait donné son nom à un équipement olympique. Depuis juillet 2020, une installation sportive destinée à accueillir des épreuves des Jeux olympiques d’été à Paris en 2024 rend hommage à Alice Milliat. Sportive accomplie, elle s’est heurtée à l’hostilité de Pierre de Coubertin, pour qui les femmes ne devaient pratiquer le sport qu’afin d’acquérir souplesse et légèreté, loin de toute dimension compétitrice. Ainsi aucune femme ne prit part à la 1ère édition des Jeux olympiques modernes en 1896, et elles ne seront que 2 % des athlètes entre 1900 et 1920. Leur proportion progresse ensuite timidement jusqu’en 1948, mais sans jamais atteindre 10 %. Il faut attendre les Jeux de 2004 à Athènes pour les voir dépasser 40 % des athlètes engagés. L’édition de 2012 à Londres est la première dans laquelle elles concourent dans tous les sports, la boxe leur étant jusque-là interdite. Aux Jeux de Tokyo en 2020, des épreuves mixtes sont instituées dans plusieurs disciplines pour renforcer la parité. L’intégration des athlètes en situation de handicap a suivi une évolution un peu comparable, puisque les premières initiatives remontent à la fin de la seconde guerre mondiale et s’accélèrent depuis les années 1960 (voir la vidéo Vladimir Vinchon avant les Jeux paralympiques). Certains sports, comme l’hippisme (voir la vidéo Course hippique féminine à Nuillé-sur-Vicoin) ou l’athlétisme, semblent plus ouverts aux femmes.
Parmi les disciplines de l’athlétisme, les courses, sauts et marches bénéficient d’une plus grande popularité. Dans les lancers en revanche, les différences entre hommes et femmes sont flagrantes : le lancer du marteau est une discipline olympique masculine depuis 1900, mais son équivalent féminin apparaît seulement aux Jeux de Sydney en 2000, après avoir été introduit aux Championnats du monde l’année précédente. La force physique nécessaire au lancer et les règles très précises de cette discipline ne plaident pas pour en faire un sport grand public. En effet la forme de la poignée et la longueur du câble en acier qui y relie le boulet sont réglementées, enfin le poids du boulet est fixé à 7 kg pour les hommes et 4 pour les femmes. Quant au lancer, il doit être effectué sans que l’athlète ne sorte d'un cercle de lancement d'un diamètre de 2 m et le marteau doit quitter la cage pour atterrir dans une aire de lancer limitée à un angle de 35°. Pour toutes ces raisons, seuls quelques pays dominent la discipline depuis les années 1980, notamment ceux d’Europe de l’Est : Pologne, Russie, Biélorussie et états baltes.

De leur côté, les Championnats du monde d'athlétisme, créés en 1983, ont eu lieu tous les quatre ans jusqu’en 1991, puis tous les deux ans ensuite. La 9e édition s’est déroulée du 23 au 31 août 2003, au Stade de France près de Paris. 46 épreuves ont ainsi vu s’affronter plus de 1670 athlètes venus de près de 200 pays parmi lesquels la France finit sur la dernière marche du podium, derrière les États-Unis et la Russie, avec 8 médailles dont 3 d’or.

La Lavalloise Manuela Montebrun est alors âgée de 23 ans. Elle est au sommet de sa carrière sportive, débutée 10 ans plus tôt par le football puis le lancer de poids. Ayant ensuite découvert le marteau, elle conserve sa simplicité mais s’épanouit dans ce sport, selon le témoignage de son entraîneur Yves Mathieu. Victorieuse dans tous les meetings et auteure de la meilleure performance mondiale de la saison, elle fait logiquement partie des favorites pour les Championnats du monde 2003, qui plus est chez elle en France. Soutenue par une importante délégation de supporters mayennais venus en cars l’encourager, elle décroche la médaille de bronze avec un lancer à 70,92 m. Deux ans plus tard à Helsinki, elle remporte de nouveau le bronze mais, le mois précédent, elle avait établi un record de France à 74,66 m, qui n’a été battu qu’en 2018. En 2017, elle s’était vu attribuer a posteriori la médaille de bronze des Jeux olympiques de Pékin de 2008 : deux athlètes mieux classées qu’elle avaient finalement été disqualifiées pour dopage.

Cette médaille de 2003 est entrée dans l’histoire du sport français car c’est la première obtenue par une tricolore dans une épreuve de lancer depuis Micheline Ostermeyer en… 1948 ! Manuela Montebrun est d’ailleurs entrée aussi dans l’histoire du sport mayennais en donnant son nom au nouveau stade d’athlétisme de Laval fin octobre 2021.

• « Manuela Montebrun », fiche individuelle de sportive sur le site de la fédération française d’athlétisme [https://bases.athle.fr/asp.net/athletes.aspx?base=resultats&seq=504943564257465344554257].
• « Manuela Montebrun récupère le bronze des JO de Pékin », L’Équipe, 12 janvier 2017, https://www.lequipe.fr/Athletisme/Actualites/Manuela-montebrun-recupere-le-bronze-des-jo-de-pekin/768092
• « Alexandra Tavernier bat le record de France du marteau », L’Équipe, 12 août 2018 https://www.lequipe.fr/Athletisme/Actualites/Alexandra-tavernier-bat-le-record-de-france-du-marteau/930295
• Cédric Gagnon, Olivia Gélinas et Sandrine Vieira, « Les femmes aux Jeux olympiques : le long chemin de la parité », Le Devoir, 20 juillet 2021 [https://www.ledevoir.com/documents/special/2021-07-olympiques-parite/index.html].
• Gautier DEMOUVEAUX, « Qui est Alice Milliat, la pionnière du sport féminin aux Jeux olympiques ? », Ouest-France, 6 août 2021 [https://www.ouest-france.fr/leditiondusoir/2021-08-06/qui-est-alice-milliat-la-pionniere-du-sport-feminin-aux-jeux-olympiques].
• « Le stade d’athlétisme de Laval officiellement inauguré au nom de Manuela Montebrun ! », Stade Lavallois Athlétisme, 29 octobre 2021 [https://stadelavalloisathletisme.com/actu/le-stade-dathletisme-de-laval-officiellement-inaugure-au-nom-de-manuela-montebrun/].