Le circuit Germinal à Denain

22 août 1980
03m 01s
Réf. 00085

Notice

Résumé :

Une association de sauvegarde du patrimoine minier s'est créée à Denain et elle propose un circuit dans la ville. Il passe par la cité Chabaud-Latour, le coron à Gaillette, la fosse Terrier et la fosse Mathilde, la centrale de la fosse Napoléon, la gare des mines, le coron Jean Bart, où vécut Jules Mousseron, qui a inspiré Zola pour Germinal. Le circuit se termine au terril Renard.

Date de diffusion :
22 août 1980
Source :

Éclairage

Ce reportage est l'un des premiers à évoquer clairement la préservation du patrimoine minier et industriel. Une vue des hauts-fourneaux des forges et aciéries de Denain-Anzin, encore actifs à l'image mais fermés en juillet 1980 (et donc inactifs au moment de la diffusion de ce reportage en août) rappelle la vocation double, industrielle et minière, de Denain. Le reportage cible ensuite plusieurs rues de corons pour introduire son propos patrimonial.

Ce besoin patrimonial s'inscrit dans le mouvement de réhabilitation qui touche surtout les cités minières les plus récentes alors que les plus anciennes, notamment les corons, sont, en raison de leur grande vétusté, souvent détruits. Cette disparition progressive a motivé la création d'une association de protection de ce patrimoine, dans une tendance habituelle en matière de patrimoine industriel et minier. En effet, depuis sa reconnaissance, dès les années 1950 au Royaume-Uni, le patrimoine minier et/ou industriel est souvent, dans un premier temps, porté par des associations locales. Elles sont constituées essentiellement de locaux et de passionnés inquiets de la disparition rapide du paysage industriel dans lequel ils ont évolué depuis plus d'une centaine d'années et qui fait partie de leur identité.

L'élargissement de cette sensibilisation au patrimoine industriel et minier vers les autorités locales, régionales et nationales et, plus encore, vers le grand public, est lent et difficile. Il est par exemple significatif que la municipalité de Denain, à la date du reportage, envisage de créer un musée du chemin de fer – aujourd'hui réalisé – sur l'ancienne gare des Mines, mais pas un musée de la mine ou de l'industrie... Les particularités mêmes de ce patrimoine, souffrant d'une image négative liée aux pollutions, à l'aliénation qu'a pu générer un paternalisme excessif, ou encore au sentiment d'échec associé aux fermetures, en sont les causes. Ce mouvement est cependant inexorable et aboutit, plus de 30 ans plus tard, à l'inscription du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco.

La sensibilisation au patrimoine industriel est ici astucieusement liée au patrimoine littéraire, en particulier au romanGerminal d'Émile Zola, reconnu depuis longtemps et qui ne souffre d'aucune contestation. Ainsi, le reportage présente-t-il un circuit de découverte, opportunément nommé "circuit Germinal" et créé par l'association évoquée plus haut. Le circuit cible un public encore un peu spécifique, comme l'emploi des mots " scolaire" et "étudier" semble l'indiquer ; on n'imagine pas encore en effet que ce type de patrimoine puisse toucher le grand public. Malgré cette nuance, le circuit est particulièrement complet car il relie tous les éléments du système minier.

Les premières réalisations présentées sont les plus pérennes, c'est-à-dire les cités ouvrières, avec leurs jardins et leurs appendices, notamment les toilettes extérieures bien visibles dans le reportage. Il s'agit de la cité Chabaud-Latour, donc la partie plus ancienne est justement constituée de corons datant des années 1870 (ceux de 1825 évoquées dans le reportage ont en fait disparu depuis longtemps) et du coron à Gaillette, réservé aux contremaîtres, les porions, et qui illustre la transcription de la hiérarchie de l'entreprise, ici la Compagnie des mines d'Anzin, dans l'habitat.

Les images et le commentaire présentent ensuite les restes de différentes fosses de la commune (Périer, Mathilde, Napoléon), cœurs des systèmes miniers, mais dont il ne reste quasiment rien aujourd'hui. Les éléments annexes du système, eux aussi le plus souvent disparus, sont ensuite évoqués rapidement : de la centrale électrique de la fosse Napoléon au terril Renard visité par Zola et qui atteint aujourd'hui 76m et non plus 120 comme en 1980, en passant par la gare des Mines, le salon des Arts, représentatif des cafés qui s'étaient multipliés dans ces villes-mines, et le coron Jean Bart, heureusement préservé en raison de son architecture remarquable. Il a abrité un temps, outre le fameux poète de la mine Jules. Mousseron, une coopérative, autre élément classique du système minier ou industriel et dont on remarque un morceau de l'enseigne sur le reportage. Ce coron est aujourd'hui réhabilité en un Conservatoire Municipal de Musique.

Simon Edelblutte

Transcription

Gérard Defives
Ces hauts fourneaux ont cessé de fumer. Mais Denain restera pour toujours la cité feumière, la cité du feu, comme l’appelait le poète mineur Jules Mousseron, par opposition à Paris, ville lumière. Le charbon, lui, a cessé d’être exploité en 1948 mais tout dans Denain évoque encore la cité minière. Les Houillères, propriétaires de corons réhabilitent les pavillons construits à la fin du siècle dernier ou au début de celui-ci, mais les corons en bande, plus anciens et plus petits, disparaissent rapidement. C’est pourquoi une association s’est créée à Denain pour sauvegarder une partie de ce patrimoine, témoin d’un passé laborieux. Ces corons ont inspiré Zola, c’est ici qu’il situe son roman Germinal . Germinal, c’est aussi le nom du circuit que cette association vient de créer à l’intention des visiteurs, adultes ou scolaires, désireux d’étudier cette architecture industrielle si caractéristique. La cité Chabaud-Latour a été construite à partir de 1825 autour de la fosse du même nom. Sauvée de la démolition grâce à un comité de défense, elle est actuellement en cours de réhabilitation. Véritable ville dans la ville, Chabaud-Latour a toujours eu sa vie propre. Depuis quelques dizaines d’années, elle a même son maire, comme Montmartre. Jadis, c’était le maître garde qui était le vrai patron de la cité. Il faisait respecter les règlements et gare à qui, par exemple, ne balayait pas son fil d’eau. Le Coron à Gaillettes était habité par des porions qui recevaient du charbon avec qualité supérieure, d’où le nom du Coron à Gaillettes. Les maisons sont vastes et le jardin n’est pas situé derrière mais devant, séparé de l’habitation par un chemin. Voici ce qui reste de la fosse Perrier, toute proche, le bâtiment de la fosse Mathilde, un peu plus ancien et plus lourd, date de 1831. L’ancienne Centrale de la fosse Napoléon a été construite en 1833.
(Musique)
Gérard Defives
Voici la gare des mines. C’est ici qu’a été installée en 1835 la première ligne française à écartement normal. La municipalité de Denain voudrait y installer un musée du chemin de fer.
(Musique)
Gérard Defives
Le coron Jean Bart que la municipalité va rénover pour abriter l’Ecole de musique présente une façade très ouvragée. C’est ici qu’a vécu Jules Mousseron, poète de la mine et créateur du célèbre personnage de Cafougnette.
(Musique)
Gérard Defives
Le Salon des arts, dont l’arrière-salle accueillait encore des combats de coqs au début des années 20, aurait besoin d’un bon ravalement.
(Musique)
Gérard Defives
Le terril Renard, 120 mètres de hauteur, le plus haut de la compagnie des mines d’Anzin, est en voie de colonisation par la végétation, mais il brûle encore. Zola l’a visité, et c’est ici que s’achève le circuit Germinal.
(Musique)