Les Houillères : conséquences de l'exploitation minière

02 décembre 1992
02m 44s
Réf. 00269

Notice

Résumé :

Les Charbonnages de France assureront la surveillance et les conséquences de deux siècles et demi d'exploitation, Jack Verlaine, directeur des HBNPC l'assure. Les conséquences sont diverses : affaissements de terrain, surveillance du grisou, des eaux dans les galeries abandonnées. Dans certaines zones comme à Sin-le-Noble, le sol s'est affaissé et le sens des cours d'eau s'est inversé. Jean Faille explique que le relevage des eaux devra être assuré éternellement. Jean-Pierre Kucheida affirme que c'est celui qui a exploité qui doit en avoir la responsabilité, comme en Lorraine et conclu : "si les Charbonnages disparaissaient, c'est l'État qui serait responsable".

Date de diffusion :
02 décembre 1992

Éclairage

Les 150 ans d'exploitation du charbon dans le Nord-Pas-de-Calais ont eu aussi d'importantes conséquences environnementales (1). À la surface, la multiplication des infrastructures minières, la densification de la population et l'urbanisation ont contribué à la pollution des eaux et des sols. Néanmoins les séquelles les plus graves et les plus durables (certaines sont quasiment irréversibles) proviennent de l'activité extractive elle-même et de son impact sur le sous-sol. A court et moyen terme, il s'agit des problèmes de sécurité que posent les puits comblés après leur arrêt et surtout des dégâts causés par les affaissements miniers (dépressions en surface dues aux vides créées en profondeur par l'exploitation). A plus long terme, les problèmes majeurs relèvent des évolutions hydrologiques entraînées par l'extraction. Les affaissements de surface et le ruissellement des eaux amènent la création de nouvelles zones inondables ou définitivement inondées (lacs urbains). En dessous de la surface, les réarrangements structuraux des terrains houillers perturbent, souvent de manière définitive, le régime de circulation des eaux. S'imposent enfin le problème des eaux d'exhaure, c'est-à-dire les volumes impressionnants d'eau injectés par l'homme pour les besoins de l'exploitation ou infiltrés naturellement et qui devaient être pompés pour permettre le travail des hommes. L'arrêt de l'exploitation entraîne en général celui des pompages d'exhaure, ce qui peut, là encore, avoir un impact sur les réseaux hydrographiques souterrains et sur la qualité des eaux.

Ces problèmes multiples sont devenus de plus en plus sensibles aux yeux de la population, des élus et des administrateurs de l'ex-Bassin minier pour deux raisons : d'une part l'attention grandissante portée aux questions environnementales, d'autre part les interrogations concernant les responsabilités et le suivi de ces séquelles après la fin du charbon. Suivant les dispositions du Code minier (adopté en 1956), l'exploitant est tenu de prendre les mesures nécessaires pour prévenir les dégâts occasionnés par l'exploitation ; il demeure chargé des travaux de mise en sécurité au moment de l'arrêt des travaux et reste par la suite responsable des dommages causés. Le problème survient quand l'exploitant disparaît. C'est le cas au moment où est tourné ce reportage, puisque l'établissement public des Houillères du Bassin Nord-Pas-de-Calais doit cesser toute activité le 31 décembre 1992. A cette date cependant, on travaille encore dans certains puits, par exemple en Lorraine, et les Charbonnages de France continuent donc d'exister. C'est cet établissement qui est censé réendosser toutes les responsabilités environnementales exercées auparavant par les Houillères du Bassin. Pourtant l'inquiétude des élus – ici représentés par Jean-Pierre Kucheida, le député-maire socialiste de Liévin – persiste : leur interlocuteur devient plus lointain et de toute façon la fin définitive de l'exploitation du charbon à cette date est déjà programmée. La question n'est réglée qu'avec la loi du 30 mars 1999, dite "loi après-mine", qui transfère les responsabilités de l'exploitant en matière de surveillance et de prévention des risques à l'État. C'est aujourd'hui la situation qui prévaut, même si les acteurs locaux (collectivités, organismes tels que la Mission Bassin Minier, créée en 2000) témoignent aussi d'une réelle activité dans ce domaine, notamment pour ce qui touche à la gestion des eaux. L'ex-Bassin minier est devenu aujourd'hui un terrain d'expérience pour faire évoluer l'aménagement du territoire en fonction de risques environnementaux dus au passé mais qui pèsent encore sur le présent et sur l'avenir.

(1) Valérie Deldèvre, "L'environnement. À chacun son image", dans Jean-Claude Rabier (dir.), La remonte : le bassin minier Nord-Pas-de-Calais entre passé et avenir, Villeneuve d'Ascq, Presses du Septentrion, 2002, p. 165-175.

Marion Fontaine

Transcription

Michel Barre
Le 31 décembre, les HBNPC ne partiront pas en catimini. C’est Charbonnages de France qui assurera la surveillance et éventuellement les réparations des conséquences de 2 siècles et demi d’exploitation.
Jack Verlaine
Nous laisserons en place à Billy-Montigny les équipes, disons, de cadres et de techniciens nécessaires pour traiter tout à fait correctement les conséquences des séquelles de, les conséquences de l’exploitation.
Michel Barre
Ces conséquences n’auront pas toutes la même durée. Les affaissements se stabiliseront dans quatre ou cinq ans mais il faudra plus longtemps pour s’assurer de la sécurité des 220 puits fermés avant 1900. Sur les 600 puits du bassin, un peu plus de 350 sont déjà contrôlés tant pour le grisou que pour la tenue des remblais. La surveillance de la montée des eaux dans les galeries abandonnées et de la pression du grisou qui s’y dégage va nécessiter une trentaine de sondages dont deux tiers sont déjà réalisés. Mais cette surveillance devra s’exercer pendant encore 30 à 50 ans. Enfin, dans certaines zones, on ne pourra jamais arrêter le relevage des eaux de ruissellement. Ici, à Sin-le-Noble, le sol est descendu de 7 mètres et le sens des cours d’eau s’est inversé. L’an dernier, les 62 stations des Houillères, par l’intermédiaire des sous-traitants, ont pompé 70 millions de mètres cubes.
Jean Faille
D’autres conséquences, correspondant en particulier aux stations de relevages des eaux, sont des conséquences qui seront à assurer, je dirais, quasi-éternellement sauf à revoir l’ensemble du réseau hydrographique de la région. Et donc, il faudra effectivement qu’à terme, une solution soit trouvée pour le maintien en activité de ces stations de relevage des eaux.
Jean-Pierre Kucheida
Nous avons pris toutes les précautions pour que au niveau de l’eau et de sa potabilité, et bien, ce soit donc celui qui a exploité une région, qui ait sa responsabilité, qui soit clairement et fortement affirmée. C’est chose faite et c’est déjà aujourd’hui appliqué en Lorraine, où la Société Lormines est obligée de continuer à pomper son eau alors qu’elle voulait naturellement s’en passer, le Préfet de la Meurthe-et-Moselle les a obligés. Et bien, ce sera la même chose dans le Nord et dans le Pas-de-Calais.
Michel Barre
Le service des Séquelles Techniques changera de nom en janvier prochain. Il gardera ses effectifs, 55 personnes, et ses crédits, 155 millions de francs, mais que se passera-t-il dans un avenir plus lointain ?
Jean-Pierre Kucheida
C’est celui qui a donné la concession au concessionnaire qui devient donc responsable de ces situations. C’est la loi française cela et ça signifie donc que en tout état de cause, si demain, dans 20, 30 ou 50 ans, Charbonnages disparaissait, c’est l’Etat qui devient responsable !