Les chevalements du Bassin minier au Patrimoine mondial ?
Notice
Le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais est candidat au Patrimoine mondial de l'Unesco, 70 sites sont présentés dont les 21 chevalements sauvegardés sur les 600 qui existaient. Virginie Debrabant, du Centre historique minier, explique qu'ils symbolisaient l'Entreprise. Ce sont des associations qui luttent pour préserver ce patrimoine. A Wallers-Arenberg, le carreau de mine a été classé, mais les anciens mineurs ont malgré tout dû se battre, rapporte René Lukasiewicz, président des "Amis de Germinal". A Haisnes Guy Dubois, de l'association "Mémoire du fond" relate que la population a réagi quand le propriétaire a cisaillé les molettes du chevalement en béton de la fosse 6.
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Éclairage
A partir des années 2000, les chevalements, ou chevalets (le premier terme est en principe plus général que le second, mais l'usage de l'un ou l'autre dépend surtout des configurations locales) sont considérés, avec les terrils, comme l'un des principaux lieux de mémoire du monde minier (1). Le reportage concrétise d'ailleurs tout à fait cela, en intégrant l'historique des chevalements dans le processus alors en cours de classement du bassin du Nord-Pas-de-Calais au patrimoine mondial de l'Unesco. On s'amusera à noter que les dernières images sont rythmées par une chanson de Renaud, extraite de l'album Renaud cante el'Nord (1993) et intitulée "Les molettes".
Il faut pourtant noter que cette patrimonialisation des chevalements constitue une nette rupture. Longtemps ces derniers ont surtout été considérés comme les éléments, changeants en fonction de l'évolution des techniques, d'un cadre de travail. On peut toutefois penser qu'ils ont acquis, dès le temps de l'exploitation, une fonction symbolique, aux yeux des dirigeants des compagnies (comme signe de prestige) et aussi des mineurs (comme points de repère rythmant la vie quotidienne). Comme le note le reportage, de nombreux chevalements ont été abattus au moment de la fermeture des puits. La mise à bas d'installations aussi monumentales et aussi présentes dans le paysage a certainement créé un choc, qui a contribué à une prise de conscience concernant la nécessité de conserver ces lieux de la mémoire minière. Dès le début des années 1990, un certain nombre de chevalements sont inscrits à l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques. Outre les bâtiments et la tour du 11/19 de Loos-en-Gohelle et du 9-9bis d'Oignies, c'est le cas par exemple des trois chevalements de Wallers-Arenberg (Nord), qu'évoque le reportage. Ces trois chevalements témoignent de l'évolution des techniques et de l'architecture industrielles (deux d'entre eux datent de la fin du XIXe siècle, le troisième a été construit dans les années 1960). Ils doivent leur conservation à cette valeur de témoignage et à leur visibilité nationale, qu'ils tiennent de la course cycliste Paris-Roubaix et du film Germinal de Claude Berri (1993). Mais on observera aussi qu'ils ont été réappropriés, à l'instar de certains de leurs semblables, par les anciens mineurs (ici l'Association des amis de Germinal, mise en place à la suite du film). Bien après avoir perdu toute utilité, au sens fonctionnel du terme, les chevalements, à l'instar des beffrois du Nord, semblent ainsi garder, aux yeux de la population locale, leur rôle de point de repère et de rappel du lien qui longtemps a uni les travailleurs du fond au monde de la surface. Comme le montre cependant le reportage, la protection et la mise en valeur des chevalements demeurent inégales. Il reste que les collectivités locales, qui ont repris une partie d'entre eux, se sont montrées de plus en plus sensibles à leurs fonctions mémorielles et ont de plus en plus cherché à les préserver. Parmi les biens qui, à l'été 2012, ont été classés au Patrimoine mondial de l'Unesco, on compte 21 chevalements.
(1) Voir Olivier Kourchid, Hélène Melin, "Mobilisations et mémoire du travail dans une grande région : le Nord-Pas-de-Calais et son patrimoine industriel", Le Mouvement social, n°199, 2002, p. 37-59. Également, Les paysages de la mine, un patrimoine contesté ?, Lewarde, Éditions du Centre Historique Minier, 2009, en particulier p.20.