Une piste de ski artificiel sur un terril à Loisinord
Notice
Reportage sur la station de ski artificielle construite sur un ancien site minier à Noeux-les-Mines dans le Pas-de-Calais. Elle a une vocation sociale et permet de faire du ski à moindre frais tout en restant dans le Bassin minier. Jacques Villedary, maire et fondateur du site Loisinord, présente ce nouvel équipement. Dans l'avenir, il a comme projet d'amener de la neige en couvrant la piste.
Éclairage
L'implantation sur l'un des terrils de Noeux-les-Mines d'une piste de ski artificielle, intégrée dans un grand centre de loisirs sportif baptisé Loisinord, témoigne, sous une forme singulière, des dynamiques de réaménagement que connaît l'ex-Bassin minier à compter des années 1980. Jouent d'abord ici les projets de Jacques Villedary, maire socialiste de la ville à partir de 1983. Comme beaucoup de ses pareils, ce dernier arrive aux responsabilités dans un contexte marqué par la récession minière, à laquelle vient s'ajouter dans les années 1980 les effets de la crise économique. Sans doute la situation de Noeux-les-Mines comporte-t-elle certaines spécificités : les puits y ont été fermés de manière relativement précoce (1968 pour le dernier) et par ailleurs la ville est longtemps le siège d'une enseigne-phare de la grande distribution : Leroy-Merlin. La municipalité ne s'en trouve pas moins confrontée à des défis économiques et sociaux majeurs, et manifeste, par la voix de son maire, l'ambition d'opérer la sortie de la ville de sa période minière. Jacques Villedary se montre soucieux de préserver la mémoire et le patrimoine de cette période : c'est lui par exemple qui appuie la création d'un musée de la mine, inauguré en 1986. En même temps, il ne veut pas se limiter à la conservation patrimoniale et cherche à mener à bien la reconversion des anciens sites et friches industrielles minières. Ses projets sont portés par un contexte favorable. Nombre de collectivités locales se réapproprient alors notamment les terrils, pour les faire servir à de nouvelles fonctions, en particulier dans le domaine des loisirs.
Le plan d'eau de la base de Loisinord est inauguré en 1994 mais le plus original intervient deux ans après, lorsqu'en 1996 s'ouvre la piste de ski. On peut y voir une manière de tirer pleinement les conséquences de l'aspect de montagne artificielle qui est surtout celui des terrils les plus récents. En cherchant plus en amont, on y trouvera peut-être la trace d'une vieille ambition, très présente à gauche (par exemple au moment du Front Populaire) mais aussi dans certaines initiatives sociales des Houillères du Nord-Pas-de-Calais : parvenir enfin à démocratiser l'activité très élitiste que constituent les sports d'hiver. On y décèle enfin très nettement la tentation de changer les couleurs de l'image de la ville, du noir associé au charbon, au vert de la piste synthétique, au blanc associé au ski et au bleu du plan d'eau. L'initiative a en tous les cas connu du succès et s'est imposé dans la durée. La base de Loisinord est devenue un complexe couvrant des activités plurielles : sports nautiques et sports de glisse, mais aussi un centre d'animation et d'hébergement ainsi qu'un circuit automobile et de nombreuses enseignes commerciales. La reconversion d'une région traditionnellement marquée par le travail industriel vers les loisirs ne va cependant pas sans difficultés. Elle ne compense pas le départ d'autres activités (le siège de Leroy-Merlin a quitté durant la dernière décennie Noeux-les-Mines, laissant une nouvelle friche à gérer). Elle est marquée par la fluctuation de la fréquentation, la difficulté parfois à supporter dans la durée le poids de ces grands équipements et enfin la concurrence susceptible d'exister entre eux. Beaucoup d'élus comptent aujourd'hui sur l'ouverture du Louvre-Lens, en décembre 2012, pour donner une nouvelle dynamique à cet ensemble.